Magazine Le Mensuel

Nº 2872 du vendredi 23 novembre 2012

Editorial

Le Liban dans le tourbillon

Soixante-neuf ans déjà! Le Liban célèbre encore une fois son indépendance. Défilé militaire, vœux des diplomates à la République, festivités nationales… Une date inoubliable dans son symbole… et après… Combien d’années le Liban a-t-il été réellement maître de son destin? Dans quel climat fêtons-nous ce 22 novembre 2012? Un pays divisé géographiquement entre le Sud et le Nord et politiquement entre deux forces que tout sépare. A la tribune officielle, qui verrons-nous, ce 22 novembre, aux côtés du chef de l’Etat? L’une ou l’autre des factions opposées? Les centristes, perdus dans cet imbroglio inextricable, en quête d’une sagesse quasi impossible? Le chef de l’Etat, conscient des dangers de l’heure, cherche difficilement à faire vibrer la corde nationaliste, hélas brisée pour le moment.
Un gouvernement monochrome, paralysé par ses propres contradictions, a succédé à une équipe dite d’union nationale, qui méritait très peu le qualificatif dont on avait voulu la doter au Sommet de Doha, un de plus, sous l’égide des Qataris. Où iront-ils chercher maintenant matière à se ressouder. Auprès de qui? Dans quel pays ami? Difficile tâche, sinon mission impossible. Tout est bon pour s’entre-déchirer. Une loi électorale à multiples facettes. Des projets lancés par les uns et les autres, au gré des egos et des intérêts. Perdu et n’arrivant plus à comprendre, le citoyen lambda donne sa langue au chat. Il espère et attend une élection improbable malgré, et peut-être, à cause des affirmations qui se veulent très rassurantes sur la tenue d’une opération, symbole de la démocratie s’il en est.
L’insécurité se déplace de région en région et rend très dure la mission d’une armée, appelée à sévir  aux quatre coins du pays ainsi qu’aux frontières, alors qu’elle manque dramatiquement de moyens. Les dirigeants politiques, et à leur tête, le ministre de l’Intérieur, officier de carrière lui-même, ne cessent d’annoncer un «prochain» contrôle sévère et une stricte répression de tout incident sur le terrain. Mais, rien n’arrête les fauteurs de troubles. Cerise sur le gâteau, découragés de réclamer le monopole des armes à l’institution militaire et, face à l’inébranlable détermination du Hezbollah à conserver les siennes, certains menacent de brandir les leurs. C’est ainsi que le moindre accrochage dégénère en pugilat.
Les manifestations de colère des citoyens contre des engagements qui ne sont pas respectés. Les grèves qui s’annoncent dans tous les secteurs économiques et le chômage qui en résulte ne sont-ils pas autant de bombes à retardement?
Le chef de l’Etat, dont le sens national et la détermination ne sont plus à prouver, n’a hélas qu’un seul moyen d’agir, celui de convaincre les antagonistes de se retrouver autour d’une même table, dite du dialogue. Ses rencontres séparées avec les principaux chefs de courants dont il a fait, et pour cause, la priorité des priorités, se heurtent à des arguments qui, pour justifiés qu’ils puissent être parfois, vu les expériences passées, n’en rendent pas moins vains tous les efforts du président de la République. Celui-ci, avec une patience inébranlable, poursuit son action avec l’espoir de ramener un peu de sagesse dans les rangs des responsables. Faute de vouloir donner un crédit au dialogue, les débats parlementaires ne seraient-ils pas les bienvenus et ne permettraient-ils pas aux contestataires de s’exprimer en toute liberté?
A l’heure où la région entière bouillonne, où les victimes civiles, femmes et enfants, en Syrie et à Gaza, ne se comptent plus, où Israël se fait de plus en plus agressif, le Liban est en proie à une crise économique et sociale particulièrement aiguë. Des rumeurs courent sur la possibilité pour certaines sociétés de mettre la clé sous la porte et les salariés dans la rue. Certaines l’ont déjà fait mais personne ne semble y prendre garde. Entouré de voisins pour le moins turbulents, le Liban déjà fragilisé à l’intérieur pourra-t-il résister à la contagion?
Reste le vague espoir de ramener les responsables à la raison, celui de les voir se retrouver au Vatican autour du patriarche maronite à la cérémonie qui le consacrera cardinal.

Mouna Béchara

 

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