Magazine Le Mensuel

Nº 3053 du vendredi 13 mai 2016

Événement

Entre le CPL et le Hezbollah. Peut-on encore parler d’une alliance?

Il semble bien loin ce fameux 6 février 2006, ce jour où l’église Mar Mikhaël fut le témoin de la signature de l’accord entre le Courant patriotique libre et le Hezbollah, ainsi que de la fameuse accolade entre le général Michel Aoun et sayyed Hassan Nasrallah. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Des alliances se sont faites et d’autres se sont défaites.

Depuis 2006, la relation entre le CPL et le Hezbollah a connu beaucoup de secousses, mais aucune ne fut assez forte pour ébranler l’édifice. Il faut dire que le dossier de la présidentielle constitue la raison principale du changement dans le paysage politique et la redistribution des cartes au niveau des alliances, pour la première fois depuis le document d’entente. A la division entre 8 et 14 mars, a succédé une nouvelle répartition, encore plus profonde, entre sunnites, chiites et chrétiens. Pourtant, la grande secousse qui a fait voler en éclats le 14 mars est survenue à cause du clash entre ses principales composantes, sunnite (le Courant du futur) et chrétienne (Forces libanaises), au sujet de la présidentielle. Du côté du 8 mars, à la confrontation entre Michel Aoun et Sleiman Frangié, s’est approfondi le différend entre Aoun et Nabih Berry, alors que la relation entre le leader du Bloc du Changement et de la Réforme et sayyed Hassan Nasrallah n’a pas connu de graves dommages.
 

Blessures silencieuses
Pourtant, ces développements n’ont pas eu lieu sans laisser quelques blessures silencieuses qui sont restées sous contrôle.
En réalité, la relation entre le CPL et le Hezbollah a connu, depuis le début de l’année, plus de troubles qu’elle n’en a eu en dix ans, depuis la signature du document d’entente entre les deux partis. Des divergences sont apparues au point de créer un malentendu et de porter atteinte à la relation bilatérale, basée sur la confiance et le respect mutuels entre le général Aoun et sayyed Nasrallah.
Plusieurs éléments ont contribué à ce refroidissement dans les relations entre le CPL et le Hezbollah. L’accord de Maarab entre Michel Aoun et Samir Geagea a été le point de départ de ce malentendu. Bien que le Hezbollah n’ait fait aucune déclaration négative, son commandement et ses cercles ont scrupuleusement étudié les retombées de cet accord, qui semble de plus en plus ne pas se limiter à une entente sur un sujet ponctuel – qui est la présidence – mais qui crée, bel et bien, une nouvelle réalité, ayant des conséquences directes sur l’équation politique actuelle et l’équation chrétienne dans l’avenir.
Des doutes et des incertitudes ont commencé à pointer chez la base aouniste sur la position réelle du Hezbollah concernant l’élection du général Aoun et si le parti chiite était réellement disposé et capable de le faire parvenir à Baabda. Tout cela a commencé à apparaître après l’accord de Maarab. Sayyed Hassan Nasrallah a d’ailleurs clairement accusé Samir Geagea d’œuvrer pour créer une rupture entre le Hezbollah et le CPL.

 

La neutralité du CPL
Sur un autre plan, dans la confrontation qui oppose l’Arabie et le Hezbollah, le CPL se tient à l’écart, bien que Nasrallah ait manifesté sa compréhension, laissant à ses alliés la liberté du choix. Les contacts entre le président du CPL, le ministre Gebran Bassil, et l’ambassade d’Arabie, ainsi qu’avec le Courant du futur sont maintenus. A son tour, la visite d’une délégation du CPL au député Khaled Daher a été très mal perçue par le Hezbollah. Même la législation d’urgence ne fait pas l’unanimité entre le CPL et le Hezbollah. Alors que le parti de Nasrallah appuie la position de Nabih Berry, le CPL, en accord avec les FL, réclame en priorité une nouvelle loi électorale.
Malgré toute cette tension entre les deux alliés, ceci ne remet pas en cause leur alliance. D’ailleurs, cela se traduit déjà dans les élections municipales où le Hezbollah a donné ses voix aux aounistes même dans les listes où ils sont avec les Forces libanaises, et dans l’accord du Hezbollah sur la proportionnelle dans la nouvelle loi électorale.


«Ne misez pas sur le temps»
Quoi qu’on dise, la position du Hezbollah concernant l’élection présidentielle reste la même. Il réaffirme, à toutes les occasions, son appui au général Michel Aoun tant que celui-ci reste candidat et n’a pas décidé de se retirer. Dans son dernier discours, prononcé le 6 mai, sayyed Hassan Nasrallah a refusé toute polémique dans ce sens, affirmant qu’une partie de la solution du dossier de la présidence se trouve en Arabie et l’autre moitié se trouve au Liban. «Ne misez pas sur le temps, cela est inutile. Si certains misent sur le fait que quelqu’un peut faire pression sur l’Iran, la Syrie et nous, il se trompe lourdement. Les choses ne se passent pas ainsi. Au lieu de perdre votre temps et de tourner le dos, allez parler à la personne qu’il faut et mettez-vous d’accord avec elle. C’est ainsi que les choses avancent». 

Joëlle Seif

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