Le 31 mai dernier, pour finir en beauté le mois de la Vierge, le Conseil maronite a inauguré la chapelle Notre-Dame Oum el-Nour dans le quartier de la Quarantaine. Rencontre avec son architecte Roland Ghostine.
L’histoire commence en 1954 lorsque Youssef Bechaalani offre une parcelle de terrain au Conseil maronite libanais. De ses vœux, il souhaite que soit érigée une chapelle dans un bâtiment destiné aux actions de bienfaisance du conseil. Ce n’est finalement qu’en 1996, sous l’impulsion du président du conseil Raymond Raphaël, que le centre social du Conseil maronite est enfin inauguré, certes sans la chapelle bien qu’un local lui ait été réservé en attendant son heure. Ce n’est qu’il y a quelques mois que son élaboration est remise à l’agenda du Conseil maronite par le président Wadih el-Khazen, mandaté depuis 2006. A l’unanimité, la décision est prise: le souhait du donateur sera respecté, une nouvelle chapelle sera érigée. Dans la foulée, Roland Ghostine est choisi pour être l’architecte en chef du chantier. «Quand le président Wadih el-Khazen m’a chargé des travaux, j’ai mis entre parenthèses tous mes autres projets pour la chapelle, déclare-t-il. C’était un local sans porte ni fenêtre, un dépôt délaissé. L’important était d’en imaginer une vision, un concept, et je peux dire que 98% de la conception de cette chapelle est venue d’une intuition divine».
Tout d’abord, le maître d’ouvrage s’affaire à rechercher sa pièce maîtresse: l’autel! «Je voulais choisir des éléments naturels qui reflèteraient l’esprit chrétien et dont le meilleur exemple pouvait être un tronc d’olivier sculpté et travaillé», dit-il. Fruit du hasard ou signe divin, c’est en montant à Zahlé pour un autre projet, qu’il aperçoit derrière une vitrine l’objet de toutes ses convoitises. «Un énorme tronc d’olivier, un travail de maître, une finition exceptionnelle, une œuvre d’artiste, de passionné, raconte-t-il. Georges Haddad en avait sculpté deux de cette grandeur, un qu’il avait gardé pour chez lui et le second mis en vente pour lequel il avait déjà reçu plusieurs propositions. Ayant été apparemment le seul à avoir remarqué tous les détails de la pièce, il a préféré me donner l’avantage». Il ne restait plus qu’à convaincre le conseil d’acquérir cette petite merveille à 10 000 dollars tout de même. «J’avais mis une option dessus sans même avoir l’avis favorable de celui-ci, avoue Ghostine. J’étais sûr qu’ils allaient accepter». Et l’architecte, habituellement spécialisé dans la restauration de demeures anciennes, ne s’était pas trompé.
A partir de là, tout était encore à faire. «Je voulais d’abord trouver ce que serait l’autel pour pouvoir concevoir le reste. C’était mon point de départ, explique-t-il. Rien ne m’a arrêté dans la limite du possible, j’ai tout conçu du premier clou aux calices. Le président Wadih el-Khazen a d’ailleurs été très impliqué tout au long du projet, précise-t-il. Il a fallu prévoir le carrelage, l’électricité, les boiseries, la sonorisation, le marbre martelé, enduire les murs pour pouvoir poser du granite adapté à celui de l’immeuble et puis bien sûr, équiper la chapelle de toutes les infrastructures nécessaires». Au total, plus de 145 000 dollars d’investissement. «Il faut dire que c’est un bâtiment particulier, regroupant les sièges sociaux de la Ligue maronite, du Conseil maronite ou encore de la Ligue maronite des immigrés, sans oublier, au quatrième étage, le centre de soins», mentionne-t-il.
A l’intérieur de la chapelle, pour atténuer la luminosité engendrée par tout un pan de mur composé de briques de verre et pour rendre l’atmosphère «plus pieuse», l’architecte décide de mettre en place derrière l’autel un panneau en aluminium illustré de feuilles de vignes. D’autre part, quatre vitraux devraient être commandés prochainement. Conçue sur deux niveaux, la chapelle est dotée d’une mezzanine avec sa balustrade, permettant à l’orgue électrique et à la chorale de prendre de la hauteur. Un niveau plus bas, les bancs en chêne massif ont été faits sur mesure pour durer. Aux murs, on distingue le chemin de croix représenté à travers quatorze cadres réalisés par Marianne Abou Jaoudé et puis, la statue de la Vierge Oum el-Nour, est encore aux abonnées absentes, confectionnée en Italie, elle ne devrait pas tarder à arriver. Quant aux cloches, il est déjà prévu qu’elles sonnent de plus belle, mais à travers les haut-parleurs placés à l’extérieur de son enceinte.
Et si sa programmation n’est toujours pas déterminée, la chapelle serait, en principe, rattachée à la paroisse voisine de Saint-Michel.
Delphine Darmency