Un enfant de 10 kg greffé d’un rein
Une première réussie à 100%
Pour la première fois au Liban, l’équipe médicale de l’Hôtel-Dieu de France a réussi une greffe d’un rein à un enfant de 10 kg seulement. C’est la mère de l’enfant qui a donné son rein compatible avec celui de son enfant.
Ibrahim est né avec une insuffisance rénale sévère qui a nécessité des séances quotidiennes de dialyse péritonéales que sa mère lui faisait à domicile à raison de douze heures par jour. Un traitement pénible, qui a permis toutefois à l’enfant de survivre et de prendre quelques kilos supplémentaires. Mais lorsque son cas s’est aggravé, son médecin traitant a suggéré aux parents la possibilité de lui greffer un rein. Après avoir pris connaissance des éventuels risques que pourrait encourir une telle intervention, la mère d’Ibrahim s’est portée volontaire et a donné son rein.
Selon le professeur Chebl Mourani, néphrologue pédiatre, la mère est en bonne santé et son rein de petite taille convenait à l’enfant. La greffe rénale est réalisée généralement chez les personnes en insuffisance rénale terminale, ne pouvant survivre sans des séances de dialyse. Au stade terminal, la greffe est le seul traitement qui permet aux malades de retrouver une vie quasi normale. Mais cette intervention nécessite un traitement immunosuppresseur à vie.
C’est la première fois qu’un enfant de 10 kg est greffé au Liban. Une réussite qui permettrait, selon les médecins, de sauver désormais les nourrissons de moins de 10 kg souffrant d’une insuffisance rénale terminale. L’opération a été un véritable succès. Ibrahim s’est réveillé tout de suite après l’opération, son rein a fonctionné et il avait une bonne température. L’intervention, réalisée, entre autres, par les docteurs Maroun Moukarzel et Bernard Gerbaka, s’est déroulée grâce à la contribution financière de la fondation humanitaire Al Walid Ben Talal. L’opération a duré près de cinq heures, sous la supervision d’une équipe de réanimateurs et d’anesthésistes, et a été un véritable exploit. Les traitements assurés à l’enfant lui permettront de mener désormais une vie normale. Nada Jureidini
Trois questions au Pr Chebl Mourani
Comment s’est déroulée l’intervention?
Deux équipes chirurgicales distinctes ont travaillé côte à côte. Alors qu’une première équipe enlevait le rein de l’enfant afin de le remplacer par celui de la mère, l’autre équipe enlevait celui de la mère pour gagner le plus de temps possible. La greffe a eu lieu à un intervalle de quelques secondes seulement, ce qui a permis au rein greffé de fonctionner directement. La greffe est une opération très délicate. Il fallait surveiller attentivement l’enfant qu’on a gardé aux soins intensifs durant dix jours consécutifs pour prévenir les éventuels risques.
Quelles sont généralement les complications liées à une greffe rénale?
Il y a des complications précoces et d’autres tardives. Parmi les complications précoces, qui peuvent mettre la vie du patient en danger, un choc septique, des infections bactériennes, une thrombose ou un rejet dans les premiers mois qui suivent l’intervention. Parmi les complications tardives, des infections bactériennes ou virales qui peuvent causer la mort du patient greffé telle que la varicelle ou autre. D’où l’importance d’un suivi médical pour prévenir ces complications et la nécessité de suivre un traitement immunosuppresseur à vie. Un rejet tardif de la greffe peut aussi avoir lieu. Mais toutes ces complications peuvent diminuer avec le temps.
La greffe rénale des enfants est-elle fréquente au Liban?
Près de 72 enfants ont déjà été greffés au Liban. Mais ces enfants étaient âgés de 3 ans et plus et leur poids était de 12 kg et plus. Dans ce cas précis, l’enfant pèse 10 kg seulement. En France, ces greffes se passent dans des centres spécialisés où un suivi particulier s’impose en raison d’un grand risque de mortalité et de morbidité. J’espère qu’au Liban, nous parviendrons à opérer les moins de 10 kg qui ont besoin d’un rein. C’est un défi que nous voulons relever. Propos recueillis par N.J.