Les années soixante-dix ont été marquées par plusieurs attentats et assassinats qui n’ont jamais été éclaircis. Beaucoup d’accusations, mais pas de preuves, même si le principal suspect reste le Mossad israélien.
Ghassan Kanafani écrivain, journaliste et activiste palestinien de 36 ans, trouve la mort dans l'explosion d'une bombe placée sous sa voiture dans une banlieue de Beyrouth. Il se trouvait avec sa nièce de 17 ans, Lamis Hussein Najm. Les Palestiniens pointent du doigt les services secrets israéliens.
Le 8 juillet 1972, Ghassan Kanafani quittait son domicile à Hazmiyé pour se rendre à son bureau au journal al-Hadaf, organe du Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP). Sa nièce Lamis avait insisté pour l'accompagner. Ils venaient juste de monter en voiture et de tourner la clef de contact lorsque la voiture a explosé, faisant un trou béant et provoquant des dégâts dans l'immeuble où il logeait avec sa femme danoise, Annie, et ses deux enfants: Fayez, 10 ans et Lily, 6 ans. Les enquêteurs auraient retrouvé sur les lieux un papier portant l'étoile de David et la phrase: «Avec les salutations de l'ambassade israélienne de Copenhague», en référence à la nationalité d’origine de son épouse. Le corps de Ghassan déchiqueté a été projeté à l’extérieur de la voiture. Les hommes de la sécurité ont retrouvé l'une de ses mains sur le toit d'un bâtiment voisin.
5 kg d’explosifs
L'enquête a révélé que l'explosif, estimé à 5 kg de TNT, avait été placé sous le siège de Ghassan Kanafani, dans la voiture, et une bombe en plastique sous l'échappement.
Le FPLP avait mené une opération à l'aéroport d’al-Lad faisant des victimes israéliennes. L'assassinat est perçu comme une riposte israélienne à l'opération. Ghassan Fayez Kanafani est né à Acre en 1936. Son père, avocat de profession, le place dans une école de missionnaires. Il vit à Jaffa jusqu'à la guerre de 1948 avant de s’exiler, avec ses parents, d'abord au Liban puis en Syrie où ils obtiennent le statut de réfugiés.
Recruté par Georges Habache lors d’une rencontre en 1953, il s’adonne à des activités politiques au sein du Mouvement nationaliste arabe (MNA). Cela lui vaut une expulsion en 1955, du département de littérature arabe de l'Université de Damas,
Il quitte alors pour le Koweït, où il occupe une chaire de professeur et édite le journal al-Raïdu MNA. Il retourne à Beyrouth en 1960 et édite, toujours pour le même mouvement, le journal al-Hurriya, avant de collaborer en 1962 au journal nassériste, al-Muharrir.Cinq ans plus tard, il rejoint le quotidien nassérien al-Anwaret fonde le journal al-Hadaf.
Il poursuit ses activités politiques et, en 1967, il devient le porte-parole du Front populaire de libération de la Palestine, l'aile palestinienne du MNA. Il en rédige le programme politique dans l’esprit marxiste-léniniste.
Les Israéliens pointés du doigt
Après l'assassinat de Kanafani, le journaliste français Michel Seurat écrit: «Les Israéliens s'enorgueillissent de ne jamais frapper au hasard. On peut donc penser qu'ils ont délibérément choisi de supprimer Ghassan Kanafani, et de considérer ce meurtre comme un hommage rendu, à leur manière, à cet intellectuel palestinien».
Le frère de la victime accuse la Première ministre israélienne de l’époque, Golda Meir, d’avoir donné son accord, et le ministre de la Défense Yhud Barak, d’avoir tout organisé.
Quelques années plus tard, en 1993, le général israélien Aharon Yarev reconnaît, dans une interview diffusée par la BBC, qu'il avait reçu des ordres directs de Golda Meir de liquider des personnalités palestiniennes où qu'ils se trouvent.
En octobre 2005, un rapport du journaliste Ethan Haber, publié dans Yediot Aharonot, faisait porter la responsabilité de l’assassinat aux Israéliens mené en riposte au kidnapping et à la tuerie des sportifs israéliens aux Jeux olympiques de Munich en 1972. En effet, le 5 septembre 1972, onze membres de la délégation olympique israélienne, un policier allemand et cinq membres d’un commando de l’organisation palestinienne «Septembre noir» avaient été tués dans une prise d’otages au Village olympique de Munich. Sauf que Kanafani avait été tué avant cette affaire et que, donc, son assassinat ne pouvait être lié à l’opération de Munich. Mais il ne faisait pas de doutes que les empreintes israéliennes y étaient claires.
A.K.
Ses œuvres
Ghassan Kanafani a publié dix-huit ouvrages et des centaines d’articles sur la culture, la politique et la lutte du peuple palestinien. Après son assassinat, tous ses livres ont été réédités en arabe et plusieurs de ses œuvres littéraires ont été traduites en dix-sept langues. Deux de ses romans ont été adaptés à l’écran. Il a également écrit plusieurs romans dont les héros sont des enfants. Un recueil de ses histoires courtes a été publié à Beyrouth, en 1978, sous le titre «Les enfants de Ghassan Kanafani».