Magazine Le Mensuel

Nº 2861 du vendredi 7 septembre 2012

general

Dr Dahesh. Prophète ou escroc?

L’Affaire qui a conduit au retrait de la nationalité du Docteur Dahesh sous le mandat du président Béchara el-Khoury a fait sensation au Liban durant les années quarante.

Docteur Dahesh a proclamé la naissance du Daheshisme, le 23 mars 1942. Aux yeux de ses fidèles disciples, témoins des nombreux miracles, c’était un prophète investi d’une mission spirituelle. Au nombre de ses disciples, Marie Haddad, sœur de Laure Chiha, épouse de celui qui devait devenir président de la République, Béchara el-Khoury.
Le 12 mai 1942, une conférence de Youssef el-Hajj au Club des Emigrés, aborde le sujet de Dr. Dahesh et évoque ses miracles. Quelques jours plus tard, le 1er juin 1942, à la suite d’une plainte non officielle, le procureur général de la République, Dimitri el-Hayek, donne au commissaire Fadel Azouri l’ordre d’ouvrir une «enquête préliminaire» pour décider si le Docteur Dahesh tombait ou non sous le coup de la loi du 9 mai 1939, qui interdit «la pratique lucrative du spiritisme et des sciences occultes» sous peine d’amende et d’emprisonnement.
Cette première enquête a conclu qu’il n’existait aucune infraction à la loi. Le rapport est remis au Parquet. Cependant, quelques semaines plus tard, le Haut clergé s’en mêle pour arrêter l’expansion du courant daheshiste dans le pays. Le journal des Jésuites, el-Bachir, entame sa première campagne contre Dr. Dahesh. Deux organes de presse, le journal el-Hadis et la revue humoristique el-Dabour, font écho à ces articles. Les Daheshistes portent plainte auprès du bureau de la Censure.
Le Parquet demande l’ouverture d’une seconde enquête. Le dossier Dahesh est renvoyé au commissaire Fadel Azouri. Le domicile de Docteur Dahesh est mis sous surveillance par le service de renseignement de la Police judiciaire.
Le rapport de la seconde enquête, remis fin octobre, qualifie la campagne de presse contre Dr. Dahesh de purement religieuse. Mais le procureur général renvoie au commissaire son dossier accompagné d’une note lui demandant de prendre en considération les dépositions des trois rédacteurs en chef des journaux qui ont écrit les articles contre Dr. Dahesh.   
Le 13 février 1943, le Q.G. de la Sûreté française perquisitionne le domicile du Docteur Dahesh. Celui-ci est convoqué au Commissariat français. L’Affaire Dahesh fait la une de la scène libanaise. Dr. Dahesh reçoit des conseils de quitter le pays pour un certain temps ou du moins d’arrêter ses activités. Il fait la sourde oreille. Il adresse, le 26 février 1943, une lettre au président de la République, Alfred Naccache, réclamant une ouverture publique de son dossier. L’opinion publique est divisée sur les activités du personnage. Est-il réellement un médium ou un simple escroc?
En mars 1944, les journaux déclenchent une campagne contre les sciences occultes. Un projet de loi est déposé au Parlement visant à interdire toute sorte d’activité liée d’une manière ou d’une autre au spiritisme ou à toute science occulte.
Le 29 août 1944, Dr. Dahesh est arrêté par la police, à la suite d’une rixe armée. Certains des partisans du daheshisme sont arrêtés aussi. Dr. Dahesh est expulsé du pays, et sa nationalité libanaise lui fut retirée pendant quelques années. Il mourut en 1984 à New York. A.K.

N.B: Les informations de cet article sont tirées d’un article de Georges H. Chakkour – Editions Jeune Lévrier, et du Mémorial du Liban-mandat de Béchara el-Khoury de Joseph Chami.

Né à Jérusalem
Né à Jérusalem en 1912, Dr. Dahesh ou Sélim el-Achi, révèle très tôt des dons de prestidigitateur. Il vient à Beyrouth en 1927 et exerce ses dons en Syrie dans plusieurs villes, avant de revenir à Beyrouth où il anime des soirées familiales puis des séances publiques. Il est condamné au Caire à huit mois de prison pour escroquerie. Il est expulsé d’Egypte, avec défense d’y retourner. Il revient au Liban en 1936 après un long parcours, et loue un appartement à Basta.     
Ecrivain et poète, c’était également un collectionneur dont la bibliothèque personnelle contenait plus d’un demi-million de volumes. Elle a été transférée en 1976, par voie maritime, à destination des Etats-Unis d’Amérique. Dans les années 90, un musée portant son nom est ouvert à New York.

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