Port de Beyrouth
Une performance exceptionnelle depuis 2004
Les chiffres mieux que les mots prouvent les performances du port de Beyrouth en termes de revenus et de nombre de conteneurs traités. Ces indicateurs sont presque les seuls à être positifs dans une économie qui tourne au ralenti. Mieux encore, le port de Beyrouth a enregistré pour la période s’étendant de janvier à août 2012 un record, soit les meilleurs résultats depuis 2004 sur une période de huit mois (Voir le tableau ci-dessous).
Selon les dernières statistiques, les revenus cumulés du port de la capitale, de janvier à août 2012, se sont élevés à 116,7 millions de dollars, soit une hausse de 10,8% sur la même période de 2011. Ce pourcentage, ainsi que le volume de la marchandise à l’exportation et à l’importation traitée au port de Beyrouth, reflètent la croissance de l’activité du commerce. Cette croissance est d’autant plus évidente si l’on prend en considération le tonnage des marchandises et le nombre des conteneurs traités. Les deux indicateurs ont enregistré une hausse sur un an, à aout 2012, respectivement de 8% et 6,9%; atteignant 4798 tonnes et 417463 conteneurs, soit les proportions les plus élevées depuis 2004 sur la durée considérée. Toutefois, le nombre de navires qui ont accosté a reculé de 3,6% sur un an, représentant un nombre cumulé de 1400 à août 2012.
Vu les aléas sécuritaires du transport terrestre via la Syrie, qui se sont doublés d’une hausse des primes d’assurance et d’honoraires des chauffeurs de camions, les exportateurs, industriels et agriculteurs, se sont tournés vers le transport maritime et plus timidement vers le transport aérien pour toutes les opérations de transit. De toute façon, ils n’avaient pas d’autres alternatives, le Liban s’étant transformé en «une presqu’île». Près de 94% des exportations agricoles annuelles s’effectuaient avant les troubles en Syrie via ce pays vers l’hinterland arabe. Donc, les performances du port de Beyrouth devraient poursuivre une tendance haussière au cours de ce mois, qui est celui de la saison des exportations agricoles. D’ailleurs, le ministre de l’Agriculture, Hussein Hajj-Hassan, avait demandé à Idal de mener une étude mesurant le potentiel d’accommodation du port de Beyrouth à une croissance de son activité. Selon le président d’Idal, Nabil Itani, il est possible d’exporter via le port de la capitale 300000 tonnes de produits agricoles, alors que jusqu’au mois d’août, seulement 21000 tonnes avaient été embarquées.
Ceci dit, certaines embûches persistent. Les exportateurs agricoles libanais demeurent otages du transport terrestre pour leurs marchandises à destination de la Syrie, de la Jordanie et de l’Irak. Ils sont également confrontés au paramètre temps dans la mesure où l’arrivée à destination de leurs cargaisons nécessiterait certainement plus de six à sept jours par voie maritime. D’après certains experts, il faudrait mieux organiser les horaires de sortie des camions du port, le calendrier appliqué en ce moment entraînant une congestion des voitures utilitaires dans l’enceinte du port.
Il est normal que les fonctionnaires administratifs de l’établissement public aient prolongé leur horaire de travail, les produits agricoles d’origine libanaise font l’objet de la plus forte demande sur les marchés du monde arabe. Toujours est-il qu’il est important de souligner une difficulté de taille à laquelle font face les agriculteurs, à savoir que le navire cargo ne prend le large que si son chargement s’élève à plus 4500 tonnes, soit 200 conteneurs, ou l’équivalent des exportations d’une vingtaine d’agents via la voie terrestre.
Exploitation du gaz
La charrue devant les bœufs
Il est légitime que les Libanais s’interrogent pourquoi les responsables traînent les pieds dans le dossier du gaz et du pétrole. Ni le gouvernement de Najib Mikati ni celui de son prédécesseur Saad Hariri n’ont pris de mesures sérieuses pour accélérer le processus devant aboutir à l’extraction de ces deux matières.
Ceci est d’autant plus amer pour les Libanais, qu’il n’y a plus aucun doute sur l’existence de nappes de gaz exploitables. Sur la base du compte-rendu achevé la dernière semaine de septembre par les sociétés Spectrum et SPD , le ministre de l’Energie et de l’Eau, Gebran Bassil, a annoncé «la découverte de nappes de gaz d’une capacité de 12 mille milliards de m3 uniquement dans la zone sud des eaux territoriales qui pourraient couvrir les besoins des Libanais au cours des 90 prochaines années». Il a aussi révélé que la vente des études entreprises en deux dimensions à 26 compagnies internationales spécialisées dans l’extraction du pétrole et du gaz a permis de rapporter à l’Etat et aux deux sociétés Spectrum et SPD un montant de 90 millions de dollars.
Selon le secrétaire général du Conseil mondial de l’Energie, Rudy Baroudy, cité par le bulletin économique du Crédit Libanais, le volume probant existant de gaz (sur base des déclarations du ministre Bassil) vaut 100 milliards de dollars au prix actuel du marché. Ce volume pourrait être produit sur base d’une moyenne de 90000 barils par jour sur une durée de 20 ans, souligne cette source. De son côté l’expert économique Marwan Iskandar a considéré que malgré les fluctuations du prix du gaz en ce moment en raison de la découverte de nouvelles nappes de gaz dans le continent africain, le prix de gaz devrait atteindre le niveau de 6 à 7 dollars pour chaque 1000 m3.
Mais les responsables semblent mettre la charrue devant les bœufs. La première pomme de discorde tourne autour de l’affectation des revenus gaziers. Le plan de travail pour la réforme économico-sociale, présenté par le gouvernement, stipule clairement que les revenus du Fonds souverain alimenté par l’exploitation du gaz et du pétrole seraient affectés à l’extinction de la dette publique. En d’autres termes, les recettes de cette caisse ne seraient pas utilisées pour le financement de projets avant que le ratio dette publique/PIB ne soit sensiblement réduit. Un principe rejeté par d’autres blocs parlementaires, qui estiment que les nappes de gaz, qui sont une énergie non renouvelable, représentent «un capital». Ce capital devrait donc être a priori affecté au financement de projets d’investissements dans l’infrastructure du pays ou des projets d’investissements «fructueux». Les responsables qui défendent cette idée ont écarté toute hypothèse consistant à introduire les revenus de cette caisse souveraine dans le cadre de la Loi de Finance ou à financer des dépenses courantes.
Là où le bât blesse n’est pas seulement le fait que l’Autorité de régulation du pétrole n’ait pas encore été formée pour des considérations d’ordre confessionnel, comme tous les Libanais le savent à présent. L’Autorité est formée de six personnes chacune appartenant à une communauté religieuse différente alors que la présidence devrait être assurée selon un système de rotation. Selon la loi fondamentale de l’Autorité, les candidats habilités à se présenter doivent détenir un diplôme soit en Droit, soit en Gestion des affaires soit en Géologie. Et cerise sur le gâteau, ils doivent être âgés de 58 ans. Un âge où l’on se rapproche de la retraite alors que les jeunes diplômés libanais spécialisés dans ce domaine ne manquent pas et s’expatrient.
Liliane Mokbel