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Nº 2865 du vendredi 5 octobre 2012

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La stabilité, une priorité. L’Europe au chevet du Liban

Ces deux dernières semaines, les rencontres entre les responsables libanais et européens ont été l’occasion pour les représentants du Vieux Continent de réaffirmer leur présence auprès du pays, entre géostratégie et coopération.

Le Conseil européen des relations étrangères (CERE) est un think-tank européen qui s’est fixé pour objectif de promouvoir un débat éclairé à travers l’Europe sur le développement d’une véritable politique étrangère européenne intégrée, cohérente et efficace. Il y a quelques jours, le CERE a organisé à Londres un séminaire sur l’impact des bouleversements en Syrie sur le Liban depuis 1943 jusqu’à aujourd’hui. Une note rédigée par l’ancien journaliste Julien Barnes-Darcy résume la teneur des discussions. Le think-tank considère le Pays du Cèdre comme «l’un des pays les plus fragiles du Moyen-Orient». «Avec l’intensification de la guerre froide régionale qui oppose l’Arabie saoudite à l’Iran, qui voient le Liban comme un champ de bataille d’influence, le pays risque d’être happé dans un tourbillon incontrôlable». Mais lorsque l’analyse se concentre sur les acteurs politiques libanais, certaines assertions vont à l’encontre des canons de l’Administration américaine. L’Europe a sans aucun doute une vision particulière du Liban.

Une lecture nuancée
Après un descriptif des événements qui ont émaillé l’actualité du pays – de l’arrestation de Chadi Mawlawi à celle de Michel Samaha, en passant par les affrontements entre Jabal Mohsen et Bab el-Tebbaneh et l’enlèvement des pèlerins chiites à Alep – Barnes-Darcy s’intéresse aux objectifs de la majorité et de l’opposition. Il considère, à titre d’exemple, que «le 14 mars voit dans la crise du moment l’opportunité de renverser l’influence du Hezbollah et de réorienter le pays loin de l’axe de la Résistance». Plus loin, dans un paragraphe intitulé Fragmentation sunnite et affirmation de soi, l’auteur estimant que «le ressentiment des sunnites, frustrés par le nouvel équilibre des pouvoirs qui leur est défavorable, s’exprime aussi envers le leadership de Saad Hariri», une colère que récupèrent les «sunnites radicaux» comme Ahmad el-Assir. Un constat qui tranche avec «la discipline que le Hezbollah a su imposer dans ses rangs». La course qui oppose l’Iran, «enclin à renforcer son soutien au Hezbollah pour contrebalancer la chute éventuelle d’Assad» et les pays du Golfe «qui arment les salafistes au nord en soutien des rebelles en Syrie», risque de s’envenimer.
Dans ce contexte, que doit faire l’Europe, selon Barnes-Darcy? D’abord «continuer à discuter avec tout le monde» en soutenant le dialogue initié par le président Michel Sleiman et la politique de distanciation du Premier ministre Mikati. «L’Europe doit, en priorité, soutenir la neutralité dans l’intérêt d’une stabilité immédiate plutôt que de se ranger avec ses alliés régionaux dans le camp anti-Hezbollah», sur la base des contacts entretenus par plusieurs Etats-membres de l’Union avec le parti de Dieu, dont toutefois le soutien au régime d’Assad mérite désapprobation, il préconise la tenue des élections législatives prévues pour 2013, soutient les institutions de l’Etat et les réformes de structures nécessaires.
Sur le plan économique, Barnes-Darcy estime que l’Europe doit concentrer ses projets de développement au Nord et dans la région du Akkar, éviter les sanctions contre les banques libanaises clouées au pilori par les Etats-Unis et soutenir financièrement l’accueil des réfugiés syriens.

L’aide économique
«Compte tenu des difficultés économiques de l’Europe, qui excluent l’augmentation des aides allouées, les investissements devraient être plus ciblés». L’Union a lancé en 2004 une Politique Européenne de Voisinage (PEV) qui s’applique aux voisins immédiats du continent. En plus des 91 millions d’euros destinés à la mise en place de réformes, 20 millions sont alloués aux projets de développement locaux, dans le budget 2011-2013, débloqués par la PEV pour le Liban.
Rappelons que l’Europe est le premier partenaire commercial du pays. En 2011, les échanges avec l’UE représentaient 29% des échanges commerciaux du Liban, soit un montant de 5,6 milliards d’euros; 5,2 milliards représentaient l’importation des produits européens. A ce titre, Barnes-Darcy préconise la signature d’un accord douanier avec le Liban sur le modèle turc.
L’économie est la pierre angulaire de la coopération entre le Liban et l’Union européenne. Le 26 septembre dernier s’est tenue à Bruxelles la Quatrième réunion du sous-comité UE-Liban sur les affaires économiques et financières. Du côté libanais, la présentation a porté sur l’impact des événements régionaux et de la situation économique mondiale sur l’économie libanaise, ainsi que sur les mesures prises par les autorités libanaises pour surmonter les difficultés rencontrées. Les autres thèmes abordés ont porté sur les mesures prises pour assurer une stabilité macroéconomique globale ainsi que sur les efforts de réduction de la dette, les réformes proposées en matière de gestion des finances publiques et la gestion globale du secteur financier. L’UE a souligné la nécessité de veiller à ce que le développement économique bénéficie à toutes les catégories de la société. Un nouveau plan d’action UE-Liban est actuellement en cours de discussion.

Les Européens en visite
Les 28 et 29 septembre, le Comité politique et de sécurité (CPS) du Conseil de l’Union européenne a effectué une visite au Liban. Le comité est dirigé par le président suédois du CPS, Olof Skoog, et comprend les ambassadeurs des 27 Etats membres de l’Union européenne basés à Bruxelles. La visite était axée sur la situation au Liban et les développements dans la région. Accompagné de l’ambassadeur Angelina Eichhorst, chef de la Délégation de l’Union européenne, le Comité politique et de sécurité s’est successivement réuni avec le président de la République, Michel Sleimane, le président du Parlement, Nabih Berry, le Premier ministre, Najib Mikati et le chef du bloc parlementaire du Futur l’ancien Premier ministre, Fouad Siniora. Le Comité a également rencontré des représentants des forces armées libanaises et des organisations internationales, et a participé à une table ronde avec des personnalités politiques, des universitaires et des représentants de la société civile.
Au cours de ses entretiens, le président du CPS a affirmé que les diplomates ont réitéré devant le chef du gouvernement l’attachement de l’Union européenne à l’unité, la stabilité, l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale du Liban. Il a également exprimé son soutien aux efforts déployés par le gouvernement pour «préserver la sécurité, surmonter les divisions et renforcer l’unité nationale et la paix civile, à travers notamment le dialogue national», avant d’inviter «l’ensemble des Libanais à œuvrer pour désamorcer les tensions internes et trouver des solutions permanentes et constructives aux dossiers fondamentaux en rapport avec l’unité nationale. Dans ce cadre, l’Union européenne insiste sur l’importance des institutions fortes, indépendantes, impartiales et démocratiques pour l’avenir du Liban».
Interrogé sur l’impact au Liban de la crise en Syrie, Skoog a répondu que lui et les diplomates qui l’accompagnent comprennent parfaitement la politique de distanciation suivie par le Liban vis-à-vis du dossier syrien. «Mais si cette tragédie était appelée à se poursuivre et à empirer, le Liban en sentirait davantage les effets».

J. A-R.

La Finul à fort accent européen
Sur les 11260 hommes qui composent la force intérimaire des Nations unies, une grande partie vient du Vieux Continent. Dirigée par l’Italien Paolo Serra, qui a succédé en janvier à l’Espagnol Alberto Asarta, la force compte notamment 1100 Italiens, 962 Espagnols, 919 Français et 355 Irlandais. L’Allemagne est également le plus grand contributeur à la force de la mission d’intervention navale, avec trois navires dépêchés au large des côtes libanaises.

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