Loi électorale, crise en Syrie, affaire du drone, prorogation du mandat présidentiel, aucun sujet n’est étranger au député Serge Toursarkissian. Mais il aime surtout «s’occuper» du ministre des Télécommunications, Nicolas Sehnaoui, à qui il «conseille» de ne pas se présenter aux législatives.
A votre avis, allons-nous conserver la loi électorale de 1960?
Il est prématuré de prévoir ce qui peut arriver. Donnons-nous un délai suffisant et nous prendrons les décisions qui s’imposent en prenant en compte la conjoncture actuelle, fort délicate. Nous ne vivons pas en Suisse et il existe chez nous de nombreuses sensibilités. La loi de 1960 a produit des majorités, et une minorité existante et des centristes qui œuvrent dans l’environnement politique actuel.
Que pensez-vous de la mise à l’index de la loi de 1960 par l’Eglise?
C’est la mise à l’index du patriarcat maronite. Avec tout le respect qu’on lui doit, il existe d’autres patriarches dans le pays et ils n’ont rien proscrit. L’interdiction frappant la loi de 1960, c’est bon, mais il existe d’autres communautés que nous devons consulter. Personne n’a demandé l’avis de nos deux patriarches Aram 1er et Nersess. Parler de mise à l’index alors que les communautés grecque-orthodoxe, grecque-catholique et arménienne ont été écartées, cela nous porte à nous interroger bien que nous accordons la priorité au patriarcat maronite qui représente les chrétiens. Mais sur certains détails, la concertation est recommandée.
Le président Berry relie les prochaines législatives à la présidentielle. Partagez-vous son analyse?
Il est certain que les législatives sont liées à 100% au prochain président de la République. Les candidats sont d’ailleurs affichés. Nous disons toujours que la candidature d’un militaire est possible, mais nous voulons garder une place pour l’action politique. Pourquoi le député Boutros Harb ne serait-il pas notre candidat?
Le président de la République a dit refuser la prorogation de son mandat. Votre commentaire…
J’ai dit que, pour ma part, je renouvellerai le mandat du président Sleiman, mais dans un cadre bien spécifique. Il se pourrait que le pays parvienne à une phase qui nécessite la prorogation du mandat présidentiel. Il se pourrait aussi qu’on n’y parvienne pas et que ce soit un autre officier qui se porte candidat. Mais j’estime qu’il est nécessaire qu’un homme politique prenne les rênes du pouvoir. Vous connaissez bien la formule: un peu d’interférences arabes et occidentales et un peu d’interférences internes et parlementaires… Toutes ces données produiront la personnalité du prochain président. Nous avons vu par le passé comment on fabrique les présidences.
Est-il vrai que le Hezbollah a adopté l’affaire du drone pour couvrir ses partisans tués dans les affrontements en Syrie?
L’affaire des victimes est grave. Nous avons entendu Sayyed Hassan Nasrallah parler de la présence de 30000 libanais et préciser “nous en tant que parti avons été contraints de participer à la bataille pour protéger nos fils”. Quelle que soit la raison, au final il s’agit d’un aveu clair de la présence d’éléments du Hezbollah qui combattent en Syrie, ce qui entraîne le Liban dans des batailles dont il doit se distancer. Je ne sais pas comment ils appuient le cabinet qui prône la distanciation tout en s’impliquant dans des actions militaires dans une région qui ne leur appartient pas, à l’heure où le devoir impose de demeurer à l’écart des affaires internes syriennes pour protéger le Liban. Le Hezb doit clarifier la situation.
Pourquoi critiquer le ministre des Télécommunications qui a rendu des services à Achrafié, notamment en ce qui concerne l’Internet?
Je l’ai surnommé le ministre de l’Internet des jardins publics. Il focalise sur les jardins et délaisse l’essentiel. Il occupe les gens dans les jardins. Il croit que les citoyens d’Achrafié ne comprennent rien à la politique et au développement. Qu’a-t-il fait d’autres que brancher l’Internet dans quelques jardins… De qui se moque-t-il? Ce sont des choses qui n’influencent pas les gens, à l’heure où il faut libérer le citoyen d’Achrafié. Il installe des appareils d’espionnage via les câbles de la Résistance qu’il appuie totalement. Ce ministre m’étonne. Certains organes ont même dit que le ministre espionne les députés d’Achrafié qui se comptent sur les doigts d’une main. Je lui ai réclamé des éclaircissements, mais il s’est abstenu de me répondre. Quant aux élections, Achrafié a déjà pris une position avancée en faveur du 14 mars. Point à la ligne. S’il veut devenir député, ce n’est pas la peine qu’il s’évertue à essayer. C’est difficile. Qu’il continue à travailler au ministère, c’est préférable pour lui. Peut-être qu’il redeviendra un jour ministre, mais pas des Télécommunications.
Propos recueillis par Saad Elias