Magazine Le Mensuel

Nº 2869 du vendredi 2 novembre 2012

Confidences Moyen-Orient

Confidences Moyen-Orient

La France tourne la page de l’amitié
Depuis des années, Paris et Alger tentent à tout prix de tourner la page des tensions du passé. La visite effectuée par le président français, François Hollande, devait contribuer à cette fin. Mais, le président socialiste venait à peine de quitter la capitale algérienne qu’un nouveau malentendu survenait à la suite de l’annonce faite par Laurent Fabius. Ce dernier avait déclaré que Paris ne souhaitait plus signer l’accord d’amitié avec Alger, mais plutôt un accord stratégique de coopération conclu sept ans auparavant. Cet accord qui aurait dû être signé entre Jacques Chirac et Abdel-Aziz Bouteflika, avait été annulé à la dernière minute. Le poids de l’Histoire reste très lourd sur les deux rives de la Méditerranée.

Mohammad Morsi vient de commettre une nouvelle bourde. Le président égyptien a pris part en personne à une cérémonie religieuse durant laquelle on a prié pour que les juifs soient tous tués et anéantis. Morsi, en visite à Marsa Matrouh, a participé à une prière par laquelle l’imam a appelé Allah «à anéantir et à écraser tous les juifs». Le président du peuple égyptien, toutes confessions confondues, qui venait d’envoyer quelques jours plus tôt une lettre à son «ami» Shimon Peres, a cependant trouvé normal de prendre part à cette cérémonie. Morsi ne finit pas d’étonner par ses maladresses répétées, alors qu’il dirige un pays de 85 millions d’habitants et à la très riche Histoire, dans l’une des régions les plus chaudes du monde.

Mahmoud Abbas qui fait face aux pressions israéliennes, d’une part, et à celles du Hamas de l’autre, est monté au créneau pour dénoncer la visite effectuée par l’émir du Qatar à Gaza. Selon le président de l’Autorité palestinienne, cette visite contribuerait à aggraver les divisions internes. Il a souligné que les pays arabes feraient mieux d’aider à l’unification des rangs du peuple palestinien. Le Hamas, de fait, contrôle la bande de Gaza par la force depuis le coup militaire de 2009. Hamad Ben Khalifa Al Thani, qui apprécie très peu le président palestinien, aurait mieux fait, pour une fois, de ne pas laisser les considérations personnelles le guider.

Un grand sacrifice
Le roi jordanien Abdallah Ben al-Hussein, qui a hérité le pouvoir, ne semble pas en avoir acquis les qualités de son père. Face aux remous politiques qui secouent le royaume et aux appels au boycott des prochaines élections parlementaires, le roi n’a rien trouvé mieux à dire que le fait de prétendre à la gouvernance des Hachémites était un grand sacrifice. Lors d’une cérémonie officielle, Abdallah a ajouté: «Nous n’avons jamais voulu le pouvoir et nous considérons notre présence à la tête du royaume comme un grand sacrifice personnel». Si c’est vraiment le cas, le roi devrait abandonner ses fonctions puisque le peuple jordanien ne semble pas apprécier ce dévouement qui dure depuis 1921!

En pointillé…
Saad al-Katatni, un des dirigeants de la confrérie des Frères musulmans égyptiens, a laissé tomber le masque. En effet, l’organisation qui prétendait, depuis la chute du régime de Hosni Moubarak, ne pas vouloir imposer la charia islamique sur le pays a changé d’avis. Katatni, le chef du Parlement dissous sur décision judiciaire, et qui vient d’être élu chef du parti Liberté et Justice, a assuré que le but ultime de son organisation était de voir la loi d’Allah imposée à tous. Or, plus de dix millions d’Egyptiens sont des Coptes et si la charia était appliquée, leur situation deviendrait encore plus catastrophique, voire insupportable. Ces considérations n’inquiètent guère les disciples de Hassan al-Banna qui détiennent tous les pouvoirs au pays des Pharaons et qui tentent de changer à tout jamais la vie politique et sociale.

Khartoum encaisse
Depuis plusieurs années, le gouvernement soudanais fait face à un défi de taille: comment réagir face aux raids israéliens qui font plusieurs morts dans diverses régions du pays. Le régime soudanais, considéré très proche du mouvement palestinien Hamas, est soupçonné par l’Etat juif de fournir la bande de Gaza en armes et munitions. De même, Tel-Aviv pointe du doigt le rôle de l’Iran qui financerait, selon elle, tous ces projets tenus secrets. L’usine d’Al-Yarmouk, bâtie dans les années 90 par des experts iraniens, représente ainsi une des cibles préférées. C’est chose faite, puisque l’armée de l’air israélienne a détruit ce site sans aucune opposition de la part des défenses aériennes soudanaises. Khartoum a assuré qu’elle répondrait au temps et lieu opportuns. Un slogan vide de tout contenu, répété par un grand nombre de régimes arabes depuis les années 60.

El-Sebsi fait son mea-culpa
L’ancien Premier ministre tunisien, Beji Caid el-Sebsi, qui avait dirigé le pays après la fuite de Zine el-Abidine Ben Ali et qui avait fini par passer le pouvoir au mouvement islamiste Ennahda, a des remords. Ce changement de ton survient après les propos très durs du cheikh Rachid al-Gannouchi, accusant Sebsi de corrompu qui travaille toujours au profit des Ben Ali. Réponse du berger à la bergère, Sebsi s’est excusé auprès du peuple tunisien pour avoir qualifié le mouvement islamiste Ennahda de modéré, assurant que ses idéaux et sa façon de gouverner menaient droit à la guerre civile. Les derniers sondages placent le parti de l’ancien Premier ministre au coude à coude avec Ennahda, ce qui expliquerait la fureur du très controversé Gannouchi.

Le Qatar, un pays francophone!
Le quatorzième Sommet de la francophonie qui a eu lieu cette année dans la capitale congolaise, Kinshasa, n’est pas passé inaperçu. En effet, le pays hôte représente un mauvais élève au niveau des droits de l’homme puisque gouverné par un dictateur. De plus, les participants ont décidé, à la surprise générale, d’accepter le Qatar comme partenaire. Or, la langue de Molière n’est pas parlée dans la petite principauté du Qatar et Doha n’est même pas passée par les phases préliminaires comme ce fut le cas de l’Arménie, le dernier nouveau venu. Le pays hôte quant à lui assure ne pas être responsable de cette décision prise par Paris en coordination avec le secrétaire général de la francophonie Abdo Diouf. Les Qataris qui ont investi des sommes colossales en France durant les dix dernières années semblent avoir un objectif en tête. Mais lequel?

Ould va bien
Le président mauritanien, Mohammad Ould Abdel-Aziz, qui avait été blessé dans des circonstances très mystérieuses va beaucoup mieux. C’est du moins ce qu’assure le gouvernement de Nouakchott. Agé de 55 ans, le général au pouvoir depuis 2009 suite à un coup d’Etat, affirme qu’il sera très prochainement de retour au pays après l’opération qu’il a subie en France. Mais ce développement dramatique a suscité des inquiétudes et soulevé d’énormes questions sur ce qui s’est vraiment passé ce soir du 13 octobre, la version officielle laissant planer des doutes. Entre-temps, l’opposition se réorganise et tente d’unifier ses forces pour faire face à la machine de répression du régime qui ne tolère aucune dissidence et qui enfonce le pays dans une situation économique et politique catastrophique.

Ahmadinejad humilié
Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, qui passe ses derniers mois au pouvoir et encaisse, depuis le début de l’année, des coups durs de la part de l’aile ultraconservatrice du régime, vient d’être humilié encore une fois par le clan Larijani. En effet, le président qui avait demandé à visiter la prison d’Ivin, s’est vu refuser tout accès par ordre juridique. Les frères Larijani qui contrôlent le Parlement et la Cour suprême ne voulant pas lui permettre d’y rencontrer son conseiller médiatique détenu depuis le mois de septembre. Furieux, le président a noté que la justice dans son pays laissait à désirer. Il s’est demandé «si les droits du président de la République ne sont plus respectés, que peut-on alors dire de ceux des accusés?». Une réflexion importante, qui vient un peu tard de la part de celui qui a emprisonné tous ses opposants politiques alors qu’il jouissait encore de vrais pouvoirs.

7 milliards de dollars est le montant total des contrats militaires signés par le gouvernement irakien avec la Russie et la République tchèque, pour rendre à l’armée irakienne sa force d’antan. Mais ces accords n’ont pas plu aux forces politiques, surtout pas au Sayyed Mouktada al-Sadr, qui a violement critiqué le Premier ministre Nouri al-Maliki. Selon Sadr, ces accords ne sont pas seulement inutiles, mais ont constitué, en outre, une occasion de verser d’énormes pots-de-vin à des médiateurs très peu respectables. Le sayyed a ainsi demandé l’annulation de ces accords car selon lui «c’est le peuple irakien qui devrait bénéficier des ressources pétrolières et non quelques personnes au sein de l’Etat». Le gouvernement, quant à lui, refuse de faire marche arrière, assurant qu’il était nécessaire de doter le pays d’armes sophistiquées pour faire face à toute menace étrangère.

5000 manifestants alaouites turcs ont défilé au Luxembourg en signe de protestation contre la politique adoptée par le gouvernent islamiste de Recep Tayyip Erdogan dans le conflit syrien. Selon eux, Ankara ferait mieux de rester neutre et de ne pas prendre parti en faveur des mouvements d’opposition qui veulent renverser le régime du président Bachar el-Assad. Le pays d’Atatürk, qui compte plus de dix millions d’alaouites, fait face à de vives tensions sectaires depuis le déclenchement du conflit syrien, poussant le gouvernement à déplacer les camps de réfugiés situés dans des régions à majorité alaouites. Ces derniers s’opposent aussi à ce qu’ils considèrent être des tentatives du parti Justice et Développement au pouvoir d’islamiser l’Etat laïque et pointent du doigt la majorité sunnite qu’ils accusent de mener une politique de ségrégation contre eux. En réponse, Erdogan a présenté un plan en trois points visant à régler une fois pour toutes le problème. Il promet notamment de reconnaître les lieux de culte alaouites et de financer des projets dans leurs régions défavorisées. Des promesses toujours non respectées.

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