Les changeurs se trouvent dans l’œil du cyclone depuis l’affaire de la Lebanese Canadian Bank. Sous la pression de la globalisation financière, de la bataille livrée par le Gafi (Action internationale pour la lutte contre le recyclage de l’argent sale) et de la surveillance étroite des transactions financières internationales imposée par les Etats-Unis, la BDL a émis une panoplie de circulaires visant à réorganiser le métier de changeur. Motif invoqué: les changeurs peuvent constituer «une plateforme de prédilection à des opérations de recyclage d’argent».
Dans une interview exclusive accordée à Magazine, Ramez Mecattaf, président de l’Association libanaise des changeurs (ALC), est catégorique sur la question épineuse du blanchiment d’argent, affirmant que «la valeur totale des transactions effectuées par le secteur des changeurs représente une partie infime de celles conclues par le secteur financier local. Ce qui signifie qu’il n’y a pas de fonds destinés à des opérations de recyclage de l’argent sale qui transitent par le canal des changeurs». De plus, renchérit-il, tous les acteurs du domaine financier au Liban, avec à leur tête la BDL et les banques commerciales, se montrent extrêmement vigilants au niveau de l’application des standards internationaux, promulgués notamment par le Gafi. Sous la pression de leurs correspondants à l’étranger, en l’occurrence aux Etats-Unis, les banques commerciales ont fermé tous les comptes des petits changeurs de la catégorie B. «Une panique des banques qui n’était en aucun cas justifiée», relève Ramez Mecattaf, qui soutient toutefois une réforme continue du secteur, évoquant ainsi des sessions de formation régulières d’information, dispensées aux changeurs.
La BDL a classé en deux grandes catégories les changeurs: A (50 sociétés de change) et B (350). Elle a imposé un capital minimum de 750 millions de livres aux sociétés A, en étendant leur champ d’action aux transactions d’achat et de vente de l’or, ainsi qu’aux opérations d’exportation et d’importation de monnaie en cash. Les sociétés B ont été subdivisées en deux subdivisions: la première comprend des sociétés dont le capital minimum requis est de 500 millions de livres, alors que pour la deuxième, le capital minimum requis est de 250 millions de livres. Les sociétés de la catégorie B1 sont autorisées, en plus des opérations de change habituelles, à procéder à des transactions portant sur l’or, tandis que les opérations de la catégorie B2 se limitent aux opérations de change habituelles. La BDL a également exigé la présence au sein de toutes les sociétés de change d’un «compliance officer» et d’un audit interne, en plus d’un audit externe. Des relevés mensuels, trimestriels et annuels doivent être présentés par tous les changeurs sans exception aux banques avec lesquelles ils traitent, ainsi qu’à trois entités de la Banque centrale, à savoir la Commission de contrôle bancaire (CCB), la Commission d’investigation spéciale et la Commission des marchés financiers. Leur bilan annuel est également présenté à la BDL. Parallèlement, la CCB effectue des tournées d’inspection annuelles des changeurs, qui portent nécessairement sur les 20 plus grandes sociétés en plus de plusieurs sociétés B. En l’espace de deux ans, toutes les sociétés sont passées au crible. Ceci dit, la BDL a accepté depuis quelques jours, à la demande insistante de l’ACL, d’amender la circulaire numéro 11022 du 17 mai 2012, accordant ainsi aux sociétés de change un délai de sursis de six mois à fin juin 2013 afin de se conformer aux directives de relèvement du capital. Le délai initial venait à expiration à la fin du mois en cours.
Nº 2875 du vendredi 14 décembre 2012
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