«Je pense que le Hezbollah est dans un précipice. Il a commis énormément de fautes à l’égard du peuple syrien. Celui qui est contre le peuple est dans l’erreur». Le verdict de Khaled Daher, député islamiste du Akkar, est sans appel.
Quelqu’un a menacé de vous écraser, ainsi que le président Hariri, comme des cafards…
Pourquoi le président Hariri se trouve-t-il hors du Liban? Il n’y a plus de tentatives d’attentats, mais des attentats réels depuis l’assassinat du général Wissam el-Hassan. Il existe des «Chabihha» dans les médias qui prennent la parole à la place du régime pour proférer des menaces, qu’il s’agisse de Taleb Ibrahim et avant lui de Bassam Abou Abdallah qui m’avait menacé des tanks syriens, et aussi Charif Chehadé… Tous ces «chabihha» du journalisme ne connaissent pas le langage politique ou la logique, ils utilisent l’accusation et la menace.
Votre avis sur la convocation par le juge Sakr Sakr du général Ali Mamelouk et du colonel Adnan?
C’est une bonne initiative qui signifie que le Liban tout entier n’est plus soumis au régime syrien comme par le passé. C’est un grand pas en avant. Je pense que même la position du président de la République signifie que nous avons un président du Liban qui prend des décisions défavorables au régime syrien.
Allez-vous réussir à faire expulser l’ambassadeur syrien et à réclamer la reconnaissance du CNS par le gouvernement?
L’expulsion de l’ambassadeur syrien du Liban est un devoir à la fois national et moral. National, parce qu’il sert le Liban de demain qui ouvrira une nouvelle page avec le peuple syrien à l’avenir alors qu’il sera débarrassé de Bachar el-Assad et de son régime criminel. Et moral, pour être aux côtés du peuple opprimé qui réclame la liberté. C’est pourquoi la position du président Saad Hariri et des forces du 14 mars est dans l’intérêt du Liban. Elle aura des conséquences positives à l’étape prochaine après la fin du régime.
Mais le régime syrien vous accuse de soutenir les groupes terroristes. Preuve en est les victimes qui ont péri à Tall kalakh…
Je crois que ceux-ci ont réagi aux crimes perpétrés par le régime depuis vingt-deux mois et aux agissements du Hezbollah qui a envoyé indirectement des armes et des combattants pour se battre -ils l’ont reconnu implicitement- aux côtés du régime via des forces armées organisées et des responsables sécuritaires du Hezb. Ceux qui sont tombés à Tall kalakh sont des jeunes pleins de zèle qui n’appartiennent à aucune organisation. Nul ne les a encouragés à y aller, ni le Moustaqbal, ni le 14 mars. Ils ont agi en réaction aux crimes du régime et à la honteuse intervention du Hezbollah contre le peuple syrien.
Comment avez-vous perçu l’exhortation de sayyed Hassan Nasrallah au mouvement al-Qaïda qu’il a mis en garde contre le piège qu’on lui tend en Syrie?
Je pense que le Hezbollah est dans un précipice. Il a commis énormément de fautes à l’égard du peuple syrien. Celui qui est contre le peuple est dans l’erreur, surtout que le Secrétaire général du Hezbollah a avoué qu’il combattait avec le régime et a accusé le peuple qui s’insurge contre la dictature d’exécuter un complot extérieur. Nul n’écoute ses conseils et on ne sait pas où il veut en venir en s’adressant à al-Qaïda. Qu’il soit plus clair, comme l’a dit le président Hariri. Le Hezbollah craint les contrecoups de l’étape prochaine.
Jusqu’à quand durera le retour au calme à Tripoli?
Le problème à Tripoli est celui du régime syrien qui déclenche la fitna quand il veut. Franchement, le régime et les armes du Hezbollah sont à l’origine de la fitna et de l’instabilité au Liban. C’est le régime qui a renversé le gouvernement d’union nationale, Bachar el-Assad l’a reconnu et mis un veto sur le président Hariri et les forces du 14 mars devant les médiateurs turc, qatari et français. C’était un coup d’Etat visant à dominer le Liban pour le rattacher à l’axe syro-iranien. Ce coup d’Etat a échoué avec le Printemps arabe qui a fleuri en Syrie affaiblissant le régime et qui le renversera. Le peuple syrien se bat aujourd’hui contre les Iraniens et les Russes.
Le boycott que vous pratiquez au Liban, va-t-il finir par faire chuter ce cabinet qui semble bien installé?
Non. Je pense que les résultats seront positifs. Le discours du Secrétaire général du Hezbollah était clair, il quémande le dialogue. Mais comment s’asseoir avec ceux qui ne respectent pas les décisions prises auparavant par la conférence du dialogue? Comment s’asseoir avec ceux qui refusent de livrer les meurtriers à la Justice? Avec ceux qui brandissent les armes contre l’Etat, les institutions et l’autre bord politique?
Propos recueillis par Saad Elias