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Nº 2876 du vendredi 21 décembre 2012

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Yann Barthès, symbole de «l’infotainment» à la française.

Yann Barthès, qui règne sur Le Petit Journal de Canal+ depuis 2004, n’en finit pas de déranger. Et le public, conquis, en redemande. Magazine a rencontré le journaliste, animateur et producteur télé, au centre Skeyes à Beyrouth.  
 

L’info qu’il aura gardée de son court séjour à Beyrouth, c’est celle que d’autres journalistes auraient tue, ou alors celle qu’ils n’auraient même pas remarquée. Il l’a lancée sous forme de clin d’œil aux Libanais, dès l’émission du lundi 10 décembre: «A ceux qui nous regardent à Beyrouth, restez abonnés à Canal!».
 Barthès a bien pris soin, évidemment, d’esquisser des guillemets en prononçant le mot «abonnés». Au-delà de l’info de base, c’est-à-dire que Le Petit Journal a un public nombreux et fidèle au Liban, c’est bien entendu «l’autre» info qui intéresse notre homme: le fait qu’à Beyrouth, tout le monde ou presque a accès à Canal+ sans abonnement!
 On reconnaît bien là l’empreinte de l’infatigable sens de l’observation de Yann Barthès. Son mode opératoire? Aller chercher l’info là où personne ne songe la trouver. La livrer aux téléspectateurs, non pas dans le but de les amuser, mais pour dénoncer, pour lever le voile, pour combattre l’hypocrisie et la langue de bois.
Et le concept a tellement bien fonctionné que Canal lui a accordé, il y a un peu plus d’un an, un plateau séparé du Grand Journal et un créneau horaire de dix-huit minutes, en plein prime time, dix minutes seulement après le début des journaux télévisés des grandes chaînes…

Son look de jeune branché ne calme pas la méfiance…
C’est donc en véritable star du petit écran que le journaliste français était invité à Beyrouth, par le centre Skeyes et l’Institut français du Liban, pour donner une conférence sur un sujet qu’il est amené à aborder souvent: la satire politique relève-t-elle du simple registre du divertissement ou s’agit-il de journalisme? Pour Barthès, le doute n’est pas permis. Son Petit Journal n’est peut-être pas un journal télévisé classique, mais il n’en relate pas moins l’info. Celle qui se cache derrière ce qu’on veut bien montrer. Celle que l’on doit chercher, soutirer, fouiner, quitte à déranger, voire fâcher. Et les fâcheries avec le Petit Journal sont monnaie courante. De nombreuses personnalités politiques, de droite comme de gauche, se méfient de Barthès et de son équipe comme du diable! Certains ont même opposé un veto catégorique au journaliste et préfèrent éviter de croiser son chemin ou celui d’un membre de son équipe. C’est justement pour dévoiler ce que l’establishment, surtout politique, cherche à cacher, que Barthès s’évertue à trouver le détail qui fait mouche. Autant dire que peu de personnes arrivent à intimider notre homme! Son look de jeune branché ne réussit pas à calmer la méfiance de ses interlocuteurs qui se surprennent souvent, malgré eux, à surveiller de près leurs propres faits et gestes. Au risque de faire la Une du journal télévisé le plus décalé de France! François Bayrou, entre autres personnalités politiques françaises, en a fait les frais, en pleine campagne présidentielle. On se souvient en effet du buzz incroyable, suscité par le Petit Journal, qui a suivi le candidat à la sortie d’un meeting au cours duquel il vantait l’industrie automobile française, pour le filmer montant à bord d’une berline allemande! «C’était pour montrer l’absurdité de son discours… Je veux bien qu’on encourage la production française, mais consommer français? C’est absurde… Même lui ne pouvait pas s’y tenir». Le journaliste reconnaît que l’info qu’il a rendue publique n’a pas plu au principal intéressé, mais ce n’est pas cela qui va l’empêcher de continuer à sévir!
En tout cas, il promet de récidiver autant que possible, et tant qu’il y aura de l’info. Car la seule limite que se pose le présentateur du Petit Journal, c’est celle de l’info utile. Il se défend d’attaquer les gens sur le plan personnel, même si, souvent, la barrière se laisse allègrement franchir. Mais pour Yann Barthès, dans ce cas, ses caméras n’ont pas pour mission de railler, mais bien de raconter. Ainsi, si l’accent est mis sur le fait que l’ancien président Nicolas Sarkozy se met sur la pointe des pieds pour dire son discours, ce n’est pas pour se moquer de sa petite taille, mais pour montrer un état d’esprit… Il faut reconnaître que la brèche est tout de même petite et qu’il faut être Yann Barthès pour s’y engouffrer! Son concept du journal télévisé, en tout cas, plaît énormément aux Français, et pour cause: ça croustille, ce n’est pas de la fiction, ça fâche les personnes influentes et ça fait rire les gens… En un mot, l’antidote parfait contre la crise!  

Avec Sarkozy, une pression énorme
L’émission consacrée au président alors en exercice, Nicolas Sarkozy, en pleine campagne présidentielle, reste pour Yann Barthès l’une des séquences les plus importantes à ce jour de son parcours. Le journaliste confie à Magazine avoir ressenti une pression énorme, mais aussi une responsabilité importante, d’abord vis-à-vis des téléspectateurs, et ensuite par rapport à sa propre équipe. Il n’avait tout simplement pas le droit à l’erreur. «J’étais bien conscient de ma chance, d’avoir un président de la République sur mon plateau pendant une demi-heure. Mais en même temps, j’avais une pression très importante. Recevoir le président, c’est quand même important, c’est impressionnant… C’était l’émission la plus importante du Petit Journal depuis sa création».
L’ancien président lui-même était curieux de voir si le journaliste serait impressionné de l’avoir en face. Ce dont Yann Barthès se défend, même si une pression à peine perceptible se lisait quand même ce jour-là sur le visage de l’animateur. Sa réponse aux critiques? «Essayez donc d’avoir un président de la République en exercice sur votre plateau, en pleine campagne présidentielle, en prime time, pendant une demi-heure…». Nous serions tentés d’ajouter: et dont vous avez bien ri depuis cinq ans.

Joumana Nahas

 


L’interview apocalypse de Yann Barthès!

L’occasion était trop belle… Soumettre Yann Barthès à l’épreuve de l’interview apocalypse, qu’il fait subir à ses propres invités du Petit Journal, pendant les quelques jours qui précèdent la «fin du monde» selon le calendrier maya!

Nous sommes J-13… C’est votre interview apocalypse!
(Rires) C’est quelque chose qu’on prépare à l’avance normalement!

Ce sera plus dur pour vous! On y va… Quelle est la personnalité que vous aimeriez accompagner durant les dernières heures du monde?
J’aimerais bien picoler avec la reine d’Angleterre, à condition qu’elle se lâche bien sûr!

Votre dernier repas?
Des huîtres!

Fraîches sans doute…
Il vaut mieux ne pas partir malade en effet! Alors fraîches oui…
 
La dernière chanson?
Hallelujah de Jeff Buckley.

La dernière émission que vous regarderez?
Je suppose qu’il devrait y avoir le genre d’émission comme pour le passage à la nouvelle année, avec des rétrospectives, etc. puis le décompte final: 5,4,3… Puis tout le monde meurt!

Ça vous fait peur, la fin du monde?
(Etonné) Sérieux? Non, pas du tout! Maintenant, il se peut bien que l’avenir me donne tort, mais je n’y crois pas…

La dernière folie que vous feriez?
 J’irai faire un tour du monde avec les gens que j’aime.

Ce que vous ne feriez pas du tout?
Il y a tellement de choses que je ne ferais pas… Même si c’est la fin du monde…

Propos recueillis par J.N

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