C’était il y a 44 ans. Le 28 décembre 1968, après de multiples menaces, Israël lance une opération commando contre l’Aéroport international de Beyrouth (AIB). Bilan: 13 avions civils détruits.
Il était 21 heures 30, le trafic à l’AIB était habituel. Rien ne laissait présager de ce qui allait se passer. Pourtant, très vite c’est la catastrophe. Un des avions de la MEA s’apprêtait à décoller lorsque les portes s’ouvrent devant un militaire libanais qui demande aux passagers de quitter l’avion immédiatement. Quelques minutes plus tard, l’appareil flambait au milieu de la piste de l’aéroport.
L’attaque israélienne est brutale. Bilan: 13 appareils complètement détruits en moins d’une demi-heure sans provoquer la moindre réaction des forces de sécurité libanaises.
Israël menaçait, depuis quelque temps, de s’en prendre au Liban en riposte aux fréquentes attaques des fedayin, mais personne ne s’attendait à une telle agression. Quatre hélicoptères israéliens s’approchent de la côte sans être repérés. Profitant du facteur surprise, ils surgissent sur l’AIB, dans un parfait ensemble. Ils avaient très bien orchestré leur opération. Deux des hélicoptères doivent s’assurer de n’être la cible d’aucune riposte pendant que les deux autres déposent des bombes incendiaires sur les 13 avions se trouvant sur la piste dont quelques-uns appareillaient pour le décollage. Une bombe placée sur un quatorzième appareil ne fonctionne pas. C’est la destruction de toute une flotte aérienne civile.
L’armée en retard
Une heure plus tard, l’armée est sur place, le chef de l’Etat, Charles Hélou, arrive à son tour. Il est accompagné de cheikh Pierre Gemayel, ministre de l’Intérieur. Atterrés, les deux responsables constatent les énormes dégâts causés par le commando israélien. Si les installations de l’AIB ne sont pas touchées, les carcasses des 13 avions témoignent de l’agression israélienne.
Le président Hélou, le Premier ministre Abdallah Yafi et le ministre Gemayel tiennent une réunion d’urgence. Le Liban décide de porter plainte devant le Conseil de sécurité contre Israël pour cet acte criminel portant atteinte à la sécurité du Liban et rappelle à l’Onu son devoir d’agir contre ce genre d’agression. Fouad Boutros, ministre de la Justice, est chargé d’exposer la situation au Conseil de sécurité.
Israël se défend en prenant prétexte de l’attaque par deux fedayin, arrivés de Beyrouth sur un vol d’Air France, contre un avion israélien d’El Al à l’aéroport d’Athènes. Le Liban paie ainsi le prix des actions des fedayin qui prenaient beaucoup d’ampleur sur son terrain. Il était tenu pour responsable de l’autorisation accordée aux membres du Front populaire pour la libération de la Palestine de s’entraîner sur son sol.
Le 31 décembre, le Conseil de sécurité rend son verdict. Il condamne l’agression israélienne à l’unanimité de ses membres et adresse à l’Etat hébreu un avertissement, le menaçant «d’autres mesures que le Conseil pourrait envisager si de tels actes se répétaient». Piètre consolation pour le Liban auquel est reconnu le droit à «une réparation appropriée pour les destructions subies».
Malgré l’armistice conclu en 1949, Israël n’a jamais hésité à agresser le Liban sous divers prétextes.
Mais le plus étrange, c’est l’absence d’une quelconque riposte des organes libanais contre cette agression. Le commando israélien est venu et reparti sans être nullement inquiété. Les médias ont tenté de sauver la face en affirmant que les Forces de sécurité intérieure (FSI) avaient tiré contre les agresseurs. Le 31 décembre, les fedayin lanceront huit roquettes sur la Haute-Galilée.
Cette première agression israélienne d’envergure sera suivie d’une longue série d’attaques, jusqu’à la première invasion israélienne du Liban, dix ans plus tard, en 1978.
Arlette Kassas
N.B: Les informations de cet article sont tirées du «Le Mémorial du Liban: Le mandat Charles Hélou» de Joseph Chami.
Manifestations de protestation
Suite à l’agression israélienne, les étudiants de l’Université arabe et des Makassed décident de faire la grève et demandent l’ouverture d’une enquête sur les raisons qui ont poussé les organes de sécurité à s’abstenir de répondre et de prendre des sanctions contre les responsables.