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Nº 2881 du vendredi 25 janvier 2013

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Boutros Harb, député de Batroun. Nous craignons le report des élections

Pour le député Boutros Harb, le projet orthodoxe est de nature à diviser le pays et les Kataëb. Les Forces libanaises ont eu tort d’abandonner aussi vite le projet des cinquante circonscriptions. Le député indépendant fait le point sur les différentes éventualités législatives.

A l’issue de la nouvelle réunion des personnalités chrétiennes indépendantes, le ton du communiqué laissait filtrer la crainte d’un report des élections. Pensez-vous qu’au milieu de ce micmac cela peut arriver?
Dans un premier communiqué, nous avions défini notre position et expliqué les raisons de notre refus du projet orthodoxe. Il était normal donc que le ton soit modéré mais ferme. Notre réunion de mardi avait pour but de clarifier notre position, ce qui explique le ton plus haut du communiqué. Si nous avons attiré l’attention sur l’éventualité d’un report, c’est parce que nous craignons que le débat autour de la loi électorale ne nous mène au report. Nous avons mis en garde contre cette éventualité et avons affirmé notre attachement à l’échéance fixée et à l’élaboration de la loi électorale sur cette base. Nos craintes tiennent au fait que toute loi qui permettrait à un camp de gagner contre l’autre serait rejetée. La politique et le régime d’une majorité et d’une minorité seront alors torpillés.

Qui a intérêt à perdre du temps en opposant des veto?
Nous sommes pour un accord sur la loi électorale. Ceci n’élimine pas notre responsabilité dans l’élaboration d’une nouvelle loi et dans les risques d’élections sur la base de la loi de 1960 qui ne nous satisfait pas. C’est pourquoi nous avons été fermes. Nous craignons des manœuvres politiques et des querelles entraînant une incapacité à élaborer une nouvelle loi. Les forces du 8 mars ont déclaré récemment que si un accord sur une loi électorale n’était pas conclu, il n’y aurait pas de législatives, ajoutant que cela n’était pas la fin du monde. Ceci a marqué notre mémoire politique et nous a poussés à prendre position.

Vous avez parlé de contacts à établir et vous avez rendu visite à Bkerké. Qu’avez-vous conclu des conversations avec le patriarche Raï. Pour répondre aux questions relevées sur un réseau électronique, y a-t-il un changement dans la position du député Harb?
Je n’ai pas l’intention de répondre à tout ce que dit le Courant patriotique libre. Ce serait une perte de temps. Je n’ai pas besoin de me justifier. Notre position est claire. Nous croyons dans des élections sur la base d’une loi assurant aux chrétiens une bonne représentativité et acceptée par toutes les communautés. Nous considérons que la thèse orthodoxe est de nature à diviser les Libanais et menace la vie en commun. Ma visite au patriarche avait pour but de clarifier notre position. Il m’est apparu que le patriarche était conscient des dangers d’autant que le président de la République y est opposé.

Les forces du 8 mars parient peut-être sur le fait que le projet orthodoxe divise les rangs du 14 mars. Y a-t-il un froid entre vous, les Kataëb et les Forces libanaises?
Il existe des différences de vues en ce qui concerne la loi électorale mais ceci n’influe pas sur nos relations basées sur des principes et des objectifs nationaux indéfectibles avec les Kataëb et les FL.

Vous avez signé avec les Kataëb et les FL le projet portant sur les cinquante circonscriptions, ce projet verra-t-il le jour?
Si j’ai un reproche à faire aux Kataëb et aux FL c’est qu’ils ont vite abandonné ce projet rejeté par l’autre camp. Notre objectif est d’assurer la véritable représentativité chrétienne et de répondre aux plaintes des chrétiens qui n’ont pas le libre choix de leurs représentants. Ceci nous a poussés à trouver des formules de rechange. Nous avons tenté de travailler avec le CPL, les Marada et l’idée des petites circonscriptions a mûri. Nous en étions arrivés, dans le cadre du comité de Bkerké, à 47 circonscriptions, trois étant restées sous étude. Ils ont nié par la suite avoir accepté quoi que ce soit, ce qui n’est pas vrai. A la question de savoir ce qui pouvait assurer la meilleure représentativité, ils ont répondu que ce projet ferait gagner le 14 mars et leur ferait perdre. Nous ne sommes pas contre une loi qui fasse gagner le 8 mars si elle est équitable pour les chrétiens, le but étant d’être justes et de permettre aux chrétiens le libre choix de leurs députés. Le président Nabih Berry a déclaré qu’aucune loi ne pourrait passer au Parlement si elle doit faire gagner un camp au détriment d’un autre.

Pensez-vous qu’ils aient craint des surenchères que le général  Aoun pourrait exploiter dans la rue chrétienne?
Cette question doit être posée aux personnes concernées. Je ne suis pas en mesure de connaître les intentions.

Pour quelle raison les députés indépendants se sont-ils soudain prononcés contre le projet orthodoxe? Est-ce par peur de n’avoir aucun rôle ou parce qu’ils craignent de perdre?
Ceux qui étaient réunis ne craignent pas pour leur place politique. Je pense que beaucoup de chrétiens ne sont pas d’accord avec cette proposition. Notre position se fonde sur la formule d’un Liban permettant aux chrétiens de vivre libres et d’avoir un rôle dans les décisions nationales.

Certains s’étonnent que cheikh Boutros Harb, qui s’élève contre la vente des terrains d’une communauté à une autre, soit contre le projet orthodoxe?
La raison est la même. Mon projet avait pour but d’empêcher le cloisonnement des gens et la création de mini-Etats communautaires. Et c’est dans ce sens que je m’oppose au projet orthodoxe.

Comment évaluez-vous le travail de la Commission chargée d’étudier la loi électorale?
Ce qui s’y passe était prévisible. A mon avis, le Hezbollah marque des points car il savait d’avance que ni Walid Joumblatt ni le Courant du futur n’accepteraient le projet. Il offrait ainsi à l’opinion l’illusion qu’il se souciait des droits des chrétiens contrairement aux autres. Ceci n’est pas vrai. Le Courant du futur a approuvé la formule des cinquante circonscriptions et en a informé le patriarche. Ce sont Walid Joumblatt, Michel Aoun, le Hezbollah et Amal qui n’y étaient pas d’accord bien qu’elle assure aux chrétiens la véritable représentation dans le cadre de l’union nationale.

Le président Nabih Berry suggère des élections simultanées de sénateurs et de députés. Qu’en pensez-vous?
Une des clauses de l’accord de Taëf porte sur la création du Sénat qui garantit et rassure les chrétiens et les minorités. L’abrogation du confessionnalisme au Liban suppose des normes qui seront établies au Sénat au sein duquel toutes les communautés seraient représentées. Mais pourquoi la question se pose-t-elle aujourd’hui? Commençons par traiter le confessionnalisme au Parlement comme une étape vers le Sénat pour étudier son utilité. L’idée doit évidemment être creusée.

Ceci est-il possible actuellement?
Personnellement je ne pense pas que le moment soit propice. Il nous faut d’abord nous entendre sur le principe et réaliser des législatives sur la base d’une loi qui ne soit pas dictée par les armes et qui assure une juste répartition communautaire.

Vous aviez envisagé un projet électoral proposant l’élection de 99 sièges à la majorité et 29 à la proportionnelle. Ce projet peut-il aboutir?
J’ai proposé ce projet à l’opinion publique. Le président de la République a un projet ressemblant. Il propose l’élection de 86 députés à la majorité et le tiers à la proportionnelle mais non dans un Liban à circonscription unique. Rien n’empêche que cette idée fasse son chemin. Je l’ai avancée statistiques ou pronostics car je ne suis pas intéressé de savoir qui sera ou non député. Je ne crois pas qu’à l’ombre des armes, un projet du 14 mars puisse être accepté.

Etes-vous de ceux qui ont fait perdre l’occasion historique aux chrétiens de réaliser l’équilibre réel, comme le déclare le ministre Gebran Bassil qui a accusé certains indépendants d’infantilisme?
De tels propos venant d’un homme supposé respecter l’opinion publique et les gens sont honteux. C’est le dernier à pouvoir parler au nom des gens qui lui ont fait perdre plus d’une élection.

Le 14 mars subsistera-t-il?
Si Dieu le veut. Ce qui a rassemblé le 14 mars ce sont des principes nationaux qui perdurent. Ce n’est pas la première fois que les avis sont divisés au sein du 14 mars. L’importance et la force de ce mouvement c’est qu’il constitue une coalition démocratique qui compte plus d’une opinion. Mais en définitive la position est la même pour tous.

Propos recueillis par Saad Elias

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