Liban Jazz fête ses dix ans cette année. Pour le concert d’ouverture de cette édition particulière, le Music Hall accueillera, le 24 février, Michel Portal Quartet. Grâce à son charisme et sa virtuosité, ce musicien français, compositeur, interprète et l’un des grands maîtres de l’improvisation, rayonne au rang des grands musiciens du Jazz.
Quel est le secret de votre virtuosité atypique dans les techniques musicales?
Très jeune, j’étais passionné par la musique. Les instruments ne représentaient pour moi que des moyens variés pour satisfaire cette passion. Tout instrument possède des qualités spécifiques et j’aimais découvrir ceux auxquels j’étais particulièrement sensible.
Vous avez commencé à jouer la musique classique. Comment s’est faite la transition vers le jazz?
Dès mon jeune âge, c’est avec autant de plaisir que j’écoutais et pratiquais des types de musique différents. Pour moi, la musique n’avait pas de frontières. Lorsque j’étudiais la musique classique, j’écoutais beaucoup de jazz. Devenu musicien, je n’ai pas voulu me départir de cette passion initiale pour toute forme de musique.
En participant, en 1965, à l’enregistrement du disque Free jazz, controversé à l’époque, pensez-vous avoir contribué à scinder le monde du jazz?
La question – pour moi – n’était pas de chercher à scinder le monde du jazz. Il ne s’agissait pas de vouloir imposer un concept face à une esthétique plus traditionnelle. Mais de s’exprimer librement, d’être soi-même, en tentant d’éviter les codes préétablis.
Dans les années 70, vous avez créé, avec plusieurs musiciens, le Unit, qui prônait l’improvisation libre. Est-ce que vous étiez en train d’insuffler un vent de modernisme au jazz?
J’ai commencé assez tard à donner des concerts. Un jour ou l’autre, il faut essayer de se connaître, de se reconnaître entre musiciens, de s’affirmer dans un milieu du jazz plutôt verrouillé par un petit nombre à l’époque. Il arrive qu’on se dise parfois «pourquoi pas moi» si on a le sentiment d’avoir à dire quelque chose de personnel. J’ai probablement contribué à ouvrir des portes, à entraîner dans certaines directions.
Peut-on vous considérer comme une école basée sur le mélange des genres musicaux?
Le mélange des genres n’a jamais été, en soi, un objectif. Les mélanges musicaux sont venus en quelque sorte naturellement de mon désir de rencontrer des musiciens d’horizons très différents dont on a toujours quelque chose à apprendre et la volonté de partager la musique avec eux.
Vous avez remporté plusieurs prix qui ont contribué à signer votre réussite. Ces victoires sont-elles une belle récompense?
Oui, cela m’a fait plaisir.
Les musiques que vous avez composées pour des films, sont-elles vos meilleures bandes originales?
J’ai adoré faire des musiques de films. Je partais du jazz et de la musique classique pour rencontrer d’autres univers et j’aimais ce risque de savoir si je m’en sortirai ou pas. Je ne juge pas mes musiques de films. Mon objectif est de mettre en valeur l’image et l’esprit du film. Je me souviens plutôt de rencontres enrichissantes ou pour certaines décevantes.
Lorsque vous composez vos musiques, où est ce que vous cherchez vos thèmes?
Je tente de définir, d’abord, un climat psychologique selon l’environnement visuel et l’atmosphère des séquences du récit, et ensuite de les transposer musicalement. Parfois, les thèmes viennent facilement et s’imposent à moi; parfois, c’est plus aléatoire et difficile. En général, j’évite de forcer la musique dans un sens systématiquement mélodramatique.
Dans vos projets à venir, seriez-vous toujours en quête de nouvelles rencontres musicales?
Oui bien sûr, mais aujourd’hui je compte plutôt sur d’heureux hasards.
Qu’est-ce que vous attendez de la rencontre avec votre public libanais?
Je me fais une joie de rencontrer le public libanais que je ne connais pas. J’aime les découvertes.
Propos recueillis par Faten Baz-KERBAGE
Rendez-vous au Music Hall, le dimanche 24 février, à 21h.
Billets en vente au Virgin Megastore: (01) 999666.
Bio en bref
Michel Portal est un grand musicien français et l’un des maîtres de l’improvisation. Compositeur et interprète, la profusion de ses œuvres reste témoin de ses talents. Portal joue différents instruments: la clarinette, le saxophone, le bandonéon… Son parcours, qui a débuté dans la musique classique, date de son très jeune âge. Il a joué avec de nombreux grands musiciens d’univers variés et a composé plusieurs centaines de musiques de films et téléfilms dont trois qui ont obtenu un César de la meilleure musique de film (Le retour de Martin guerre, Les cavaliers de l’orage et Champ d’honneur).