Dans un marché saturé et concurrentiel, les banques libanaises ont déployé une batterie de moyens de séduction d’une clientèle à majorité avertie. Ce qui rend encore plus difficile leur tâche d’attirer plus de comptes en banques et de constituer une base de clientèle captive en termes de produits de banque de détail.
Les établissements de crédit ont placé la relation au cœur des modes de vie de leurs clients, dans le sens d’une plus grande affinité avec eux. Les temps exigent «un marketing agressif». En revanche, ce marketing, aussi agressif soit-il, ne devrait pas engendrer une réaction contraire auprès de sa cible. Avec près de 55 banques opérationnelles, le paysage semble suffisamment bancarisé. Le Liban étant une base de dépôts, il s’agit de trouver des placements. L’exposition des établissements du secteur bancaire local à la dette publique, qui varie dans une fourchette entre 40% et 50%, est considérée comme élevée selon les critères internationaux. Parallèlement, en attendant un remaniement du projet de loi sur le partenariat public-privé censé booster la participation des banques à l’investissement, les agents du secteur bancaire se tournent vers la banque de détail. D’autant que leurs placements auprès de banques étrangères ne sont plus rentables comme auparavant. A priori, le segment de clientèle le plus recherché est «le bon client» ou ce qu’on appelle dans le jargon bancaire «le client, bon père de famille». Pour ce segment, la concurrence est farouche entre les «Top Ten». Les taux créditeurs sont sacrifiés à la baisse même si ce recul est sujet à un seuil. Certains paramètres liés aux risques crédits et aux coûts de la liquidité ne peuvent être marginalisés lors du calcul des taux. S’il est vrai que la banque et son partenaire-client peuvent se mettre d’accord sur un taux créditeur fixe pour une créance de courte durée généralement calculée sur base du libor plus 3% à 5%, il est difficile d’en faire autant pour les créances à long terme. «Malgré les aléas à prendre en compte, certaines banques cassent le coût du crédit causant suffisamment de tort aux autres agents du secteur», affirme un banquier de la place de Beyrouth. Pour ce qui est des taux débiteurs des banques, la concurrence va désormais au-delà de novembre et décembre, comme c’était la coutume afin de gonfler leur poste des dépôts dans leur bilan de fin d’année, pour se maintenir tout au long de l’année. Mais le changement réel de la stratégie marketing est celui du recours de certains établissements de crédit «au marketing du porte-à-porte». Ces établissements ont chargé des compagnies de courrier rapide de livrer à leur clientèle des lettres promotionnelles avec accusé de réception. Rien de vraiment étrange jusque-là. Mais la semaine dernière, une lettre promotionnelle destinée à la clientèle féminine d’une banque propose une assurance vie d’un montant de 20000 dollars pour les femmes qui seraient ultérieurement atteintes d’un cancer du sein. Là où le marketing de ce produit devient «choquant» est lorsque la lettre indique clairement que «si le réceptionneur de la lettre ne se manifeste pas d’ici le 28 février 2013, il sera considéré comme ayant souscrit à cette police et un montant de 6$/mois sera déduit de son compte». On est en droit de s’interroger si ce moyen s’inscrit encore dans les limites du marketing informatif et promotionnel?
Liliane Mokbel