Magazine Le Mensuel

Nº 2892 du vendredi 12 avril 2013

Spectacle

Scarabé de Virpi Pahkinen. Symbolique et cosmogonie du corps

La chorégraphe et danseuse finlandaise, Virpi Pahkinen, a présenté au théâtre Monnot, le 5 et 6 avril, sa dernière création, Scarabé, en duo avec Oscar Landström. Impressionnant jusqu’à l’incroyable!
Lumières éteintes. Projecteurs braqués sur scène. Et vous êtes immédiatement impressionné, happé par cette forme qui s’y trouve, une forme mi-humaine, mi-animale. Virpi Pahkinen donne l’impression de s’être réellement transformée en insecte, en coléoptère, en scarabée. Illusion artistique? Plutôt la capacité d’un corps, celui de Virpi, de donner naissance, de créer des formes inimaginables pour un corps humain. Chacun de ses muscles se tend de mille et une manières, se tend à l’infini jusqu’à la sensation du sublime, une partie épousant ou se distanciant de l’autre, la tête, le visage, le buste, les bras, les jambes, les mains, les doigts et jusqu’aux orteils. Femme caméléon, chorégraphe symbolique, danseuse androgyne, Virpi Pahkinen ouvre très grand les portes de l’imaginaire, de la médiation, de la perception et de l’interprétation.
Un tableau. Puis un autre. Virpi cède la place à son collaborateur Oscar Landström. Avant de se retrouver tous deux sur scène. Danse en duo, danse en duel, rituel initiatique, sur une musique aux accents forts, alternant nappes électroniques et longues séquences de koto, cithare japonaise d’origine chinoise ressemblant au qanun mais aux sonorités plus perçantes. Voilà les danseurs face à face, comme dans un jeu de miroir, leurs gestes finement ciselés s’opposent, se superposent, et leurs corps finissent par se joindre en une boucle de contraires résolus, de mort et de renaissance, de régénérescence, d’auto-engendrement.
Si Virpi Pahkinen s’interroge comme point de départ sur la transformation symbolique du scarabée et ses reflets dans notre univers, le spectateur, lui, se sent porté par autant d’envies de s’aventurer au détour de cette symbolique, qu’elle puise sa source dans la mythologie égyptienne ou la mythologie chinoise, sa sacralité et la complexité qu’elle continue de distiller à notre époque contemporaine. S’aventurer loin, encore plus loin dans les infinies possibilités du corps que Virpi vient de réveiller devant lui, dans la relation entre le corps et l’univers, le corps et la cosmogonie.

Liban Jazz accueille Tindersticks
Beyrouth en mode mélancolie

Dans le cadre de sa 10e édition, Liban Jazz a accueilli le 2 avril Tindersticks. Le groupe britannique a offert au public libanais une soirée supplémentaire au Music Hall, le lendemain. Fait rare pour notre plus grand plaisir.
Un simple «good evening» a suffi. L’épicentre des Tindersticks, Stuart Staples, a donné le ton. De la sobriété, de la sophistication, de l’élégance. Place à la musique seulement, sans discours, sans introduction, sans salutations exagérées. Et la musique des Tindersticks est un concentré d’élégance, de voyage, de chavirement, de jouissance, de mélancolie. Cette éternelle mélancolie qui distingue le groupe, ce groupe atypique qui, loin de suivre la mode du moment, des moments, parvient par là-même à rester toujours à la mode, indémodable, éternel.
Ambiance feutrée, éclairages ouatés, voix profonde et des sons de velours, qui s’électrisent tantôt avant de s’apaiser à nouveau et de garder l’auditeur dans un état d’hypnose langoureuse. Dying slowly, Medecine, Frozen… des chansons tirées de leur dernier album The Something rain et d’autres encore minutieusement choisies de leur discographie. Sur scène, il y avait une telle synergie, une telle osmose entre les musiciens qu’ils semblaient à la fois surfer sur un monde qui leur est bien propre, loin de tout et pourtant paradoxalement, ou plutôt du fait même de cette synergie, ils tissaient des liens et d’intenses correspondances avec leur public. Et le public libanais en redemandait encore, certains ayant tenu à assister aux deux concerts, du 2 et du 3 avril, puisque le répertoire était différent. Et que les Tindersticks étaient en concert à Beyrouth… Un événement qu’il ne fallait rater à aucun prix!

 

Nayla Rached

Related

Quelle famille de la compagnie Free-Vol. Au bénéfice d’associations caritatives

admin@mews

Dans la peau de Cyrano. La différence comme reflet de l’autre

admin@mews

3aj2et Seyr. Ou comment conduire à Beyrouth

admin@mews

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.