Magazine Le Mensuel

Nº 2894 du vendredi 26 avril 2013

general

Entre les Merhebi et les Baarini. Vendetta au Akkar

Les vendettas entre les membres de familles rivales étaient courantes dans les années soixante-dix. La justice libanaise avait du mal à maîtriser la situation. L’esprit de clan prédominait. La région du Akkar n’échappait pas à ce phénomène. Les différends entre les Merhebi et les Baarini, sur des terrains appartenant aux deux familles, étaient monnaie courante.

Le 11 août 1974, un crime atroce secoue la région. Deux frères Merhebi, cousins de l’ancien député Talal Merhebi, sont abattus. Assaad, 22 ans, fêtait ses débuts dans le domaine du génie. Son frère Ahmad, 19 ans, célébrait son succès au baccalauréat. Tous deux dînaient en famille, dans leur résidence estivale, lorsque des inconnus surgissent et les abattent de sang-froid. Les deux jeunes gens étaient étrangers à la politique, mais il s’est avéré qu’un  conflit avait opposé leur père Omar Merhebi au clan des Baarini, quelques mois plus tôt. Ces derniers avaient squatté des terres lui appartenant et il avait eu gain de cause devant la justice. Il n’a pas pu, pourtant, être établi que des membres de la famille Baarini étaient responsables de cet atroce double meurtre.

L’affaire soulevée au Parlement
L’affaire secoue toute la classe politique. Elle est soulevée au Parlement par l’opposition qui saisit l’occasion de contester toute la politique du gouvernement. Kamal Joumblatt dénonce le pouvoir de s’être démis de son rôle. Une longue discussion, suivie d’un débat houleux, éclate au cours de la séance de la Chambre, et le départ du gouvernement, en faillite sur tous les plans, est vivement réclamé.
Le député du Akkar, Mikhaël Daher, interpelle le gouvernement et lui demande de rendre compte des mesures qu’il prend dans le domaine de la sécurité publique sur tout le territoire libanais et, notamment, dans la région du Akkar. Plusieurs incidents avaient eu lieu de façon quasi régulière dans diverses régions.
La tension politique se traduit sur le terrain. La région endeuillée traverse des moments difficiles et les appels à la justice se multiplient dénonçant les auteurs du double crime. Cette situation dure quelque temps. Le décès, quatre jours plus tard, de l’avocat Khaled Saghiyeh, blessé quelques mois auparavant par un tir lancé par le garde du corps de Sleiman el-Ali, le gendarme Akram Ali Dib, aggrave le conflit qui avait éclaté entre les deux hommes. Dib l’accusait d’être la cause de l’embuscade qui avait entraîné la mort de son frère en mai 1973. Le clerc de Saghiyeh avait été tué plus tôt dans son étude à Tripoli. L’affaire avait dégénéré.

Feu vert à l’armée
La tournure prise par les événements met la région à rude épreuve. Le gouvernement décide de bouger. L’opposition ne lui laissant pas de répit, il prend de nouvelles mesures et autorise l’Armée libanaise à prendre ses responsabilités. Le Conseil national de Défense se réunit et donne à l’armée le feu vert pour appliquer toutes les mesures qui s’imposent, sans restriction, afin de ramener l’ordre dans la région perturbée.
Trois mille soldats se dispersent dans les régions du Akkar à partir du 22 août, secondés par des éléments des Forces de sécurité intérieure. Ils mènent une opération de grande envergure. 160 arrestations sont effectuées, mais les principaux concernés et ceux jugés dangereux avaient réussi à s’échapper.  
De Saïda à Tripoli et à Baalbeck, la situation se dégradait. Il devenait de plus en plus difficile de rétablir l’ordre. Mais alors que l’affaire perdait de son acuité, le pays se dirigeait vers ce qui sera, quelques mois plus tard, la guerre de deux ans.

Arlette Kassas
 

N.B: Les informations citées dans cet article sont tirées du Mémorial du Liban: mandat de Sleiman Frangié de Joseph Chami.

Tension au Hermel
La tension sécuritaire s’en ressent jusqu’au Hermel où la présence d’armes entre les mains des tribus ne fait qu’accentuer la dégradation de la situation sécuritaire. Des appels sont lancés de partout pour ramener l’ordre dans le pays. Au Hermel, plusieurs incidents sont signalés. Les tribus des Allouch et des Nasereddine, en trêve depuis juin, grâce à l’initiative de l’imam Moussa Sadr, en viennent aux armes, utilisant les mitraillettes, les roquettes et les mortiers. Le trouble sécuritaire met le gouvernement à rude épreuve.

 

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