Le 22 novembre 1943, après de multiples et importantes tentatives des autorités françaises de passer outre la volonté libanaise, le Liban obtenait son indépendance. Les troupes du mandat capitulent et le nouveau drapeau libanais remplace le tricolore de la France. Les relations entre le Liban et le pays mandataire depuis la Première Guerre mondiale sont régies par des accords, parfois bipartites, parfois tripartites, englobant la Syrie.
Malgré son indépendance, le Liban se sent toujours menacé. Les incidents se multiplient. Les tentatives d’assassinat aussi. Après de multiples problèmes confessionnels internes, liés surtout à la formation du Parlement, Damas, Le Caire et le général Spears, représentant la Grande-Bretagne, interviennent. La célèbre formule, six députés chrétiens pour cinq musulmans, voit le jour. En août 1943, la nouvelle Chambre est en place. Abdel-Hamid Karamé est élu député.
Le 10 décembre 1944, à Wadi Rihane, entre Mirriata et Ahna, le député de Tripoli échappe à un attentat… Karamé rentrait chez lui, accompagné de son frère, quand il fut la cible de tirs nourris. Il est touché au bas du visage. Son frère est atteint à la jambe. Mais ils échappent à l’attentat. Leurs blessures étant superficielles, ils continuent leur chemin jusqu’à Tripoli.
L’attentat suscite une indignation générale, une situation précaire régnant dans le pays. Les autorités s’activent rapidement et ouvrent une enquête. Habib Abi Chahla, chef du Parlement, se rend sur les lieux de l’incident avant de rejoindre le député au Nord pour recueillir son témoignage et celui de son frère.
L’affaire est déférée devant la Cour de justice, créée en avril 1944 et dissoute en mai 1946. Plusieurs arrestations sont faites, surtout parmi les membres des deux familles du Nord, Mokaddem et Omari.
Le chef du gouvernement Riad el-solh qualifie l’attentat de «très grave» et le dénonce vivement. Le jeune pays qu’était le Liban ne pouvait pas assumer des actes de cette envergure. La Chambre se réunit pour dénoncer un tel acte contre un de ses membres. Une affaire qui devait opposer Sami et Riad el-Solh.
Abi Chahla poursuit son enquête qui sera conclue quelques jours plus tard. Les agresseurs, quatre hommes, qui ont attaqué la voiture de Karamé et tiré sur lui et sur son frère, se sont réfugiés dans les montagnes du nord de la Syrie. Malgré la requête des autorités libanaises, les agresseurs ne sont pas arrêtés.
Un mois plus tard, le 9 janvier 1945,
Abdel-Hamid Karamé succède à Riad el-Solh, à la tête du gouvernement. Le nouveau Premier ministre est appelé à calmer les critiques, le cabinet Solh faisant l’objet d’une vaste campagne parlementaire contre lui. Mais la vie du nouveau gouvernement est de courte durée. Riad el-Solh revient à la tête du gouvernement en août 1945, après la démission de Abdel-Hamid Karamé. Ce dernier avait remis son tablier malgré le vote de confiance que la Chambre lui avait accordé. La crise politique battait son plein, et les ministres appuyés par le chef de
l’Etat lui menaient la vie dure. Il choisit de se retirer.
Le 1er septembre 1945, il crée un nouveau groupe parlementaire, «Le Parti de l’indépendance». Vingt-deux députés assistent à sa première réunion, au domicile d’Henri Pharaon. Le nouveau parti critique le pouvoir et se démarque de sa politique en luttant pour l’indépendance du pays dans ses frontières actuelles, soutenant la politique de coopération avec les pays arabes et le renforcement des liens avec les Nations unies.
Arlette Kassas
Les informations de cet article sont tirées d’articles sur Internet et du Mémorial du Liban – Le mandat Béchara el-Khoury, de Joseph Chami.
Abdel-Hamid Karamé
Abdel-Hamid Karamé, né le 23 octobre 1890, fait partie des figures politiques libanaises arrêtées par les Français au moment de l’indépendance de 1943. Elu député sunnite de Tripoli, puis Premier ministre, il est considéré comme l’une des personnalités politiques les plus connues de la période d’après le
mandat. Il décède en 1950. Ses deux fils, Rachid Karamé et Omar Karamé ont tous deux occupé le fauteuil de Premier ministre.