Séance parlementaire, formation du gouvernement, élection présidentielle, libération des otages libanais en Syrie: tour d’horizon avec Antoine Zahra, député des Forces libanaises pour la région de Batroun.
Votre commentaire sur le refus du ministre Ali Hassan Khalil de considérer la séance
parlementaire non constitutionnelle, comme l’a
précisé le président Siniora alors que les accords de Taëf, a dit Khalil, ont été adoptés en l’absence
de gouvernement…
Il existe une répartition des pouvoirs, un principe de séparation des pouvoirs et des prérogatives gouvernementales en matière de législation, comme précisé dans le règlement interne. Qui publiera les lois une fois entérinées? Un Premier ministre démissionnaire a-t-il le droit de signer et de publier des décrets? De plus, si une solution au problème de la publication des décrets sur la base de l’urgence est trouvée, qui peut garantir que les ministres, sous prétexte d’appliquer la volonté du Parlement, première institution constitutionnelle, ne reprennent leurs activités en invoquant l’application des nouvelles lois? Surtout que certains d’entre eux se comportent comme si leur ministère et l’Etat libanais font partie de leur propriété privée. Peut-on prendre le risque de légitimer leur présence? Un gouvernement non responsable n’est pas soumis au questionnement parce qu’il est démissionnaire et le chef du Parlement vient dire, nous voulons continuer?
Sur la question du quorum de la séance consacrée à l’élection présidentielle, vous semblez partager l’opinion du chef des Marada, Sleiman Frangié, qui prône un quorum à la moitié +1.
Nous n’avons pas encore tranché cette question. Nous y réfléchissons. Mais nous nous retrouvons avec l’ex-ministre Youssef Saadé pour refuser la prorogation du mandat présidentiel et insister sur la nécessité d’organiser l’élection dans les délais prévus dans les textes constitutionnels. Toutefois, nous ne partageons pas son avis quand il déclare que la vacance du pouvoir est préférable à la reconduction du mandat. Nous n’approuvons aucune forme de vacance du pouvoir. Nous sommes attachés au respect de la Constitution et appelons chaque député à assumer ses responsabilités. Elles consistent en la sauvegarde des institutions. Un député a le droit de s’absenter pour marquer un point, mais il n’a pas le droit d’entraver l’élection présidentielle. Le futur chef de l’Etat doit être fort, intègre, respectable et détaché de ses intérêts privés, honnête… surtout que le président Sleiman a rendu sa dignité à cette fonction à travers son comportement. Il n’est pas acceptable de reculer, il faut aller de l’avant.
Vos remarques sur l’affaire de la libération des otages d’Aazaz?
On a enregistré une première juridique au double plan local et international. On a dit au criminel: dépose tes armes et te voilà innocenté! C’est de cette façon qu’ils ont agi avec le régime syrien. Le simple démantèlement de son arsenal chimique a suffi pour qu’il ne soit plus un criminel. C’est ainsi qu’ils ont traité avec les ravisseurs de pilotes turcs. Il a suffi qu’ils remettent les otages, pour que leur crime soit annulé. Je me permets ici de saluer la courageuse position de l’Arabie saoudite qui s’est insurgée contre la conduite du Conseil de sécurité en refusant d’y siéger comme membre non permanent pour une durée d’un an.
Que pensez-vous des prévisions du président Assad, concernant le revirement de Walid Joumblatt à l’égard de Damas?
Je considère que je ne peux ni prévoir ni juger de la relation entre les deux hommes, elle est passée par de multiples phases d’amitié et d’adversité. Ce qui est constant chez Walid Joumblatt, en dépit des différentes perceptions des développements en Syrie, c’est qu’il condamne le président syrien et les crimes perpétrés par le régime contre son peuple. Quant à son positionnement politique, renouera-t-il ou non avec? Je ne dispose d’aucune prévision à ce sujet.
L’approbation par le député Joumblatt de la formule 9-9-6 pour la formation du gouvernement, est-elle une source d’inquiétude pour vous?
J’avais répondu au député Mohammad Raad. S’ils considèrent détenir la majorité avec Joumblatt, mabrouk! Ils ont déjà composé un gouvernement, qu’ils en forment un autre! Nous recherchons l’intérêt du Liban à travers notre droit et notre représentativité politique. Lorsqu’ils ont proposé l’équation 9-9-6, nous leur avons dit: oubliez-nous!
Aujourd’hui, ils reviennent à la charge pour mettre en avant leur majorité et pour fixer un délai. Nous n’attendons des miettes ni de Mohammad Raad, ni du Hezbollah, ni de la Syrie, ni de l’Iran… Nous sommes des détenteurs de droit et nous n’avons pas peur. Nous sommes attachés à nos positions et à notre place. Rira bien qui rira le dernier. Le Liban s’en sortira sûrement gagnant.
Propos recueillis par Saad Elias