Considéré le faucon du Courant du futur, le député Ahmad Fatfat reste intraitable sur la plupart des dossiers, même s’il est favorable aux contacts avec le président du Parlement,
Nabih Berry. Interview avec le député du Liban-Nord.
Quel était le but du dîner du Moustaqbal avec le patriarche maronite Béchara Raï?
Nous avions préparé la voie à cette visite à travers des contacts permanents avec le patriarche Raï, et avec les autres forces politiques avec lesquelles nous entretenons des relations. Tout le monde est conscient de l’importance de l’instance de Bkerké en cette période délicate. Cette instance avait proposé une loi électorale et insisté sur l’élection présidentielle. Le débat s’inscrit dans ce cadre. Très franchement, nous redoutons le vide institutionnel à l’échéance du 25 mai.
Le patriarche a-t-il évoqué sa crainte d’un vide à la première présidence?
Naturellement. Le sujet est abordé tous les jours. Nous espérons avoir un nouveau président, le 25 mai. Je pense que c’est le souhait de toutes les parties.
Qu’en est-il de la liste des présidentiables de Bkerké?
Non. Cela est impensable. Nous n’avons pas du tout abordé ce sujet. Je ne pense pas que quelqu’un ait réclamé une liste de noms au patriarche.
Quels sont les résultats des rencontres successives entre les présidents Berry et Siniora à Aïn el-Tiné?
Tout échange est préférable à l’absence d’échange, comme l’a dit le président Berry. Mais, grâce à Dieu, il existe toujours au moins des constantes communes, dont la plus importante est l’accord de Taëf et le refus de la vacance au niveau de la première présidence. Ils ont également abordé le dossier de l’énergie et de la nouvelle orientation que nous avions proposée depuis longtemps, à savoir demander aux Nations unies de tracer une ligne maritime à l’instar de la ligne bleue afin que nous puissions exploiter nos ressources énergétiques.
Au cas où le tracé se concrétise, accepteriez-vous, en tant que Moustaqbal, la tenue d’une réunion du Conseil des ministres consacrée à ce dossier?
C’est un sujet totalement différent. Une réunion du Conseil de ministres démissionnaire, qui prendrait des décisions engageant le Liban, est impossible. Nous serions en train de violer les bases constitutionnelles du pays. Nous considérons que l’expédition des affaires courantes n’englobe pas des décisions de cette envergure liées à l’avenir économique et financier du pays. Cela nécessite un consensus national et un gouvernement qui bénéficie de la confiance de la Chambre. Le problème avec un cabinet démissionnaire, c’est qu’il n’a pas de comptes à rendre. De telles décisions ne peuvent pas être adoptées en l’absence d’un contrôle de la part du Parlement.
Le quotidien al-Moustaqbal a accusé les experts du Hezbollah d’apporter une aide logistique aux combattants de Jabal Mohsen, ce que le parti a démenti. Avez-vous des preuves tangibles du soutien que leur apporte le Hezbollah?
Certainement, il s’est passé quelque chose de grave lors du dernier round, l’activité des francs-tireurs de Jabal Mohsen a évolué faisant un grand nombre de victimes dont des enfants. Le Hezbollah était le seul détenteur de ce type d’armes. Aujourd’hui, le Hezb, c’est certain, coopère avec le Parti arabe démocratique. Des informations, non confirmées, signalent que ce sont même des éléments du Hezbollah qui tirent à partir de Jabal Mohsen. Si ces informations sont vérifiées, ce serait très grave! Le Hezbollah pense avoir pris le contrôle de Beyrouth après le 7 mai, et de Saïda après les incidents de Abra. Maintenant, il essaye de mettre la main sur Tripoli.
L’accord iranien sur le nucléaire va-t-il renforcer le Hezbollah? Le secrétaire général du Hezbollah vous conseille d’accepter l’équation 6+ (9×2) à l’heure qu’il est, parce que, plus tard, il ne s’en contentera plus, comme si l’équilibre des forces allait changer en sa faveur…
Il est clair que sayyed Nasrallah a l’intention d’étendre son emprise sur l’ensemble du pays et d’imposer ses conditions. Il veut dicter ses volontés au Parlement, en matière constitutionnelle et gouvernementale, par la force. L’accord nucléaire avec les Etats-Unis constitue une grande victoire pour Israël. Israël est le grand gagnant, il s’est débarrassé des armes stratégiques syriennes et maintenant des armes stratégiques iraniennes. Sayyed Nasrallah peut être fier de la plus grande victoire stratégique remportée par Israël au cours de son histoire, qui lui garantit cinquante ans de paix. Surtout parce que sayyed Nasrallah a retiré ses armes du Sud pour s’impliquer dans les combats en Syrie, à Tripoli et à Beyrouth et qu’il s’est transformé en milice. Quel meilleur service aurait-il pu rendre à Israël? Il existe un recoupement évident d’intérêts entre Israël et l’Iran dans la région.
Propos recueillis par Saad Elias