Entre leur rôle de plus en plus important et leurs moyens de subsistance, les médias vivent au Liban une période particulièrement difficile. Dans leur course effrénée pour préserver leur place, il leur est, souvent, reproché de jouer sur les divergences communautaires ou politiques.
Cette situation difficile dure depuis plusieurs années. Les médias ont connu une période de licenciements de centaines de salariés sans que nul n’intervienne pour les soutenir. Depuis 2010, entre 1 600 et 2 000 journalistes et employés ont été remerciés dans les différents médias et dans la presse écrite. La raison évidente est financière.
La plupart des médias sont dépendants financièrement. Ils ne jouissent d’aucune autonomie. Leurs ressources, notamment la publicité, ne suffisent plus à couvrir leurs frais. Selon les experts, il existe trois modèles économiques d’entreprises médiatiques au Liban: celles qui sont soutenues financièrement par un parti, et n’ont pas besoin des recettes publicitaires; celles qui tentent de survivre à travers la publicité, et celles qui survivent grâce aux profits de compagnies affiliées.
Les chaînes de télévision locales, les radios, les médias satellitaires, les journaux et les magazines se partagent un marché publicitaire qui ne peut suffire à financer l’ensemble du paysage médiatique libanais, surtout qu’il a chuté de 15 à 20% durant les dernières années.
De nombreux sites Internet sont apparus. Il y en a aujourd’hui 264. La plupart de ces nouvelles plates-formes sont financées par un parti politique ou une communauté.
Médias et autocensure
La presse et les différents médias libanais sont, en principe, libres et non contrôlés par l’Etat. Ils sont régis par un code fondé sur la liberté. Pendant les périodes de fortes crises, ils avaient opté pour l’autocensure afin de protéger une unité nationale fragile. C’est un moyen de sauvegarder la liberté sans porter atteinte à l’authenticité de l’information.
En octobre 1958, à la suite des événements qui ont divisé le pays en deux régions antagonistes, les journalistes ont adopté l’autocensure. Les résultats de cette expérience furent encourageants. En 1962, le gouvernement ne décréta pas l’état d’urgence et admit l’autocensure sous le contrôle du conseil de l’Ordre de la presse. Plus de quarante quotidiens et cinquante magazines y adhérèrent.
En 1989, après la conclusion des accords de Taëf, le paysage médiatique libanais a changé. Son évolution s’est faite grâce aux nouvelles technologies d’information et de communication. Cependant, la question communautaire n’a pas disparu du nouveau paysage politique. En 2005, l’apparition des deux camps opposés, le 14 mars et le 8 mars, a marqué de ses empreintes la situation des médias. Ils se sont divisés en deux camps, chacun ayant sa propre chaîne de télévision.
Certains ont cependant continué à faire primer le traitement professionnel de l’information sur les considérations politiques partisanes.
Le Media Sustainability Index (MSI) montre un net déclin de la situation des médias depuis 2006. De 2,45 sur un total de 4 points, en 2006, le MSI libanais a chuté à 2,01 au cours de 2012. Le Liban est ainsi classé dans la catégorie de «système mixte non durable», dans la même catégorie des Etats dont le gouvernement et le système juridique s’opposent à la liberté des médias. Cet indice se fonde sur les évaluations d’experts, de journalistes, d’éditorialistes, d’avocats, d’académiciens, de propriétaires de médias et de défenseurs des droits de l’homme, à travers un système d’évaluation numérique.
Aujourd’hui, les problèmes des différents médias sont nombreux. En l’absence de solutions magiques, ils continuent à se battre pour s’affirmer malgré les critiques.
Arlette Kassas
Le paysage médiatique
aIl existe aujourd’hui au Liban onze quotidiens en langue arabe, un en français, un en anglais et un en arménien. Magazine est le seul hebdomadaire francophone au Liban. Une chaîne de télévision officielle et sept chaînes locales privées, ainsi qu’une radio officielle et vingt-sept privées se partagent le paysage audiovisuel.