Magazine Le Mensuel

Nº 2931 du vendredi 10 janvier 2014

Film

The List. Le retour à une réalité irakienne noire

Au Capitol Hill, à Washington D.C., a été projeté un important film, The List, produit par la documentariste Beth Murphy. L’occasion de revenir sur le sort des ressortissants irakiens ayant travaillé avec les forces militaires américaines pendant la guerre en Irak.
 

Kirk Johnson, fondateur d’un projet visant à réinstaller les alliés irakiens aux Etats-Unis, a récemment publié un livre intitulé Etre un ami peut être fatal: la lutte pour sauver les Irakiens que les Américains ont laissés derrière eux. Dans cet ouvrage, il serait intéressant de s’attarder sur une citation, entre bien d’autres. Il s’agit d’une déclaration de Henry Kissinger reprise plus tard à Johnson par l’un de ses collègues irakiens forcé de fuir son pays. «Etre un ennemi des Etats-Unis serait dangereux, mais être l’un de leurs amis est parfois mortel», lui aurait-il déclaré. Il semble que le sort de ces alliés d’origine irakienne est loin d’être rose. Et c’est ce que tente de démontrer Kirk Johnson.
La réalisatrice de The list l’a suivi en mission et a mis en lumière la vie de ces 1 500 Irakiens amis des Américains et qui ont besoin de visas spéciaux pour profiter du programme de réinstallation des réfugiés établi par les Etats-Unis. Ce programme a été adopté par le Congrès, en 2008, et il inclut un grand nombre de recommandations de Johnson. A la base, l’objectif était de fournir 25 000 visas spéciaux aux Irakiens qui ont joué un rôle crucial en aidant les forces américaines depuis l’invasion de l’Irak. Or, à ce jour, seuls 7 000 visas ont été déjà octroyés. Autre réalité, selon les autorités américaines, environ 70 000 Irakiens travaillaient pour des agences américaines en tant que traducteurs, ingénieurs, experts de la société civile et des conseillers. Mais seuls 10% ont reçu des papiers pour pouvoir émigrer. Les autres étant obligés de subir le pire: être chassés de leurs maisons ou devenir la cible de ceux qui s’opposent à leur travail. Mais il y a de l’espoir. Projeter ce documentaire au Capitol Hill est une autre façon de mettre en évidence l’importance de l’assistance nécessaire et la bravoure des citoyens irakiens qui ont risqué leur réputation et leur vie tout au long de la guerre en Irak. Alcee Hastings, membre du Congrès, souligne au cours de l’événement: «Ce film est une occasion d’avoir des conversations avec des législateurs et des avocats qui peuvent travailler ensemble pour aider ceux qui ont risqué leur vie pour aider les Etats-Unis». «Je n’ai rien à dire, ajoute-t-il, sauf que c’est immoral… C’est fatal d’être notre ami».
Une fatalité ou un drame qui n’a pas arrêté de frapper des milliers d’Irakiens.

Pauline Mouhanna, Illinois, états-Unis  

L’Irak, des chiffres alarmants
En 2012, après la fin du retrait de l’armée américaine d’Irak, des bilans officiels sont établis. Selon l’Iraq Body Count (IBC), environ 162 000 personnes, essentiellement des civils, à 79%, ont péri de mort violente depuis l’invasion du pays, dont plus de 4 000 au cours de la seule année 2011. Les policiers ont également payé un lourd tribut à la guerre avec 9 019 morts enregistrés. Pour la seule année 2011, 4 059 civils sont tués, soit plus qu’en 2010 (3 976).

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