Selon Michel Moussa, député du Liban-Sud, membre du bloc parlementaire de Nabih Berry, les pourparlers lancés par le chef du Parlement n’ont pas abouti à ce jour. Quant à la tentative du président de la République Michel Sleiman de former un gouvernement neutre, elle ne contribuera qu’à une détérioration de la situation politique. Interview.
Le chef du Parlement, Nabih Berry, tente de convaincre les différents blocs de constituer un gouvernement de 3×8.
Où en sont les pourparlers?
Le Liban plonge dans un marasme politique à nul autre pareil. Le pays passe par une phase très difficile et les élections présidentielles pointent déjà à l’horizon. Nabih Berry propose une formule susceptible de régler certains problèmes cruciaux, dont la sécurité et la création d’un climat favorable à l’échéance présidentielle. Il semble, qu’à ce jour, il n’y a toujours pas de consensus sur sa proposition.
En concertation avec les différents bords politiques et, précisément avec le chef du Parlement, Walid Joumblatt tente de proposer une formule qui privilégie plutôt celle proposée par le 8 mars, 9/9/6. Or, certaines forces du 14 mars
considèrent qu’il est hors de
question de former un
gouvernement avec le Hezbollah tant qu’il poursuit ses combats en Syrie. Cette tentative se
soldera-t-elle aussi par un échec?
Le leader socialiste constitue le balancier tant au Parlement qu’au gouvernement. Son rôle est essentiel dans cette phase critique. Il tente l’impossible pour sauver le pays du gouffre au bord duquel il se trouve. Par ailleurs, nous ne devons pas perdre de vue que le Hezbollah est un parti libanais. La communauté dont il fait partie, en l’occurrence chiite, le soutient. Il a également des alliances politiques sur le plan local. Un éventuel isolement du parti conduira nécessairement à une crise au lieu de contribuer à sa solution.
Le président Michel Sleiman a, lui aussi, une formule gouvernementale: il semble, selon ses propos, que dans les semaines à venir un
gouvernement neutre sera formé.
Encouragez-vous cette initiative?
Je ne pense pas qu’il entreprendra une telle démarche. Je suis sûr qu’il est tout à fait conscient que la formation d’un gouvernement neutre contribuera à la crise.
Risque-t-on un second «7 mai» si un cabinet du fait accompli est formé?
Je ne le crois pas du tout. Mais dans cette phase difficile, nous devons éviter toute provocation.
Nabih Berry a déclaré récemment que l’élection imminente d’un
président de la République est possible. Est-ce une façon
indirecte de dire aux forces du 14 mars que le prochain chef de l’Etat sera issu des rangs du 8 mars si elles n’acceptent pas la formule gouvernementale proposée?
Nabih Berry tente de dire que si les différents bords ne s’entendent pas sur la formation d’un cabinet, pourquoi ne pas aller tout de suite à l’élection d’un président et éviter la peur les dangers d’un vide constitutionnel et la dégradation de la situation sur le plan sécuritaire.
Certains considèrent que l’intervention militaire
du Hezb en Syrie a contribué précisément à la dégradation sur le plan de la sécurité.
Qu’en pensez-vous?
En Syrie, avant l’intervention militaire du Hezbollah, le conflit était entre le régime présidé par Bachar el-Assad et l’opposition syrienne. Ce conflit n’a pas tardé à se transformer en bras de fer entre différents protagonistes avec l’intervention des extrémistes. N’oublions pas que ces derniers ont pour but de faire mainmise sur tous les régimes de la région et leurs cellules sont partout, parfois dormantes, en attendant le moment propice pour intervenir et souvent avec la violence qui les caractérise. La plupart des territoires arabes sont la proie d’un conflit sunnite-chiite et les tentacules de ce conflit s’étendent partout, et le Liban n’y échappe pas.
Dans ce contexte extrêmement délicat et dangereux, il est de la responsabilité de tous d’arriver à une formule consensuelle susceptible de protéger le Liban.
Propos recueillis par Danièle Gergès