Selon un rapport des Nations unies, les investissements dans des projets d’énergies renouvelables (ER) dépassent à présent ceux effectués dans des projets d’énergies fossiles. Sur le plan mondial, les investissements dans les ER ont atteint 211 milliards de dollars en 2010 et 257 milliards en 2011, alors qu’ils n’avaient totalisé que 39 milliards de dollars en 2004. Et comme les investissements sont en train de croître, il existe de plus en plus de risques inhérents à l’appropriation, à la construction et à la gestion des installations d’ER. Ceci dit, les avantages du recours aux ER ne sont pas du tout négligeables. Un article paru en février 2013, sur Bloomberg, intitulé Les énergies renouvelables sont aujourd’hui moins coûteuses que les nouveaux combustibles fossiles, a indiqué qu’en Australie, l’électricité peut être fournie à partir de parcs fermés éoliens à un prix de 83$/Mgh, soit 14% moins chère que celle qui serait fournie par des centrales à charbon et 18% inférieure au coût de l’énergie produite par des installations fonctionnant au gaz de schiste.
Au Liban, le plan quinquennal de réforme du ministère de l’Energie et de l’Eau a prévu d’assurer 12% du total de l’alimentation en courant électrique à partir d’installations d’énergies renouvelables d’ici 2020. Un premier pas a été franchi à ce niveau, mais le pays est encore loin des normes internationales, qui sous-tendent un environnement amical aux ER. La part des énergies renouvelables du total de la consommation domestique de l’électricité s’est élevée à un pourcentage marginal de 5,53% en 2011, alors que cette proportion était de 5,34% en 2010 et de 4,52% en 2009. Plus de 90% de la production d’énergie ont pour origine des centrales thermiques et une part marginale provient d’hydroélectricité. D’ailleurs, le concept des ER est encore peu connu des Libanais. Ainsi, Berytech a lancé tout récemment l’initiative Shaams (soleil en arabe) en coopération avec l’Association des incubateurs des affaires de Tripoli (Biat) et la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Beyrouth (CCIAB). Ce projet vise à élargir le prisme de la sensibilisation de l’opinion publique à l’énergie solaire, afin de paver la voie à une adoption plus en douceur par les ménages des technologies de production de l’énergie solaire. L’initiative est financée par l’Union européenne et douze partenaires régionaux. Il n’y a pas de doute que l’énergie solaire dépasse les autres sources d’énergie en termes de coût/efficience du fait qu’elle réduit la dépendance de la facture énergétique aux fluctuations des prix des combustibles fossiles, à savoir le pétrole et le gaz. Fin 2013, une joint-venture entre la firme Phoenix Energy, Asaco General Trade & Contracting, l’unité industrielle Dalal Steel Industries et l’entreprise chinoise China’s Yingli Solar, a remporté l’appel d’offres lancé par le ministère de l’Energie et de l’Eau portant sur l’exécution du projet «Beirut River Solar Snake» (BRSS). Ce projet consiste en la création d’une centrale solaire qui regrouperait des panneaux photovoltaïques sur une étendue de 20 000 m2 le long du fleuve de Beyrouth. L’achèvement de la première phase de «Beirut River Solar Snake» permettrait de produire 10 MW fin 2014. Le coût total du projet est de 3,1 millions de dollars. Il consiste en la construction d’une structure de base qui enjambe le fleuve pour la somme de 0,7 million de dollars et l’installation d’un système photovoltaïque (PV) pour la somme de 2,4 millions de dollars. Un total de 32 compagnies avaient exprimé un intérêt pour ce projet, dont 25 ont été présélectionnées et douze autorisées à soumettre des offres. La sélection de la joint-venture a été effectuée sur base de son score final réparti entre 70% (volet technique) et 30% (volet financier). Phoenix Energy a pour corps de métier les applications relatives à l’énergie renouvelable et elle est membre du groupe Indevco. Pour sa part, Yingli Solar est l’usine la plus grande à travers le monde pour la fabrication de panneaux solaires, tandis que Dalal Steel Industries livre principalement des maisons préfabriquées, des conteneurs et des escaliers métalliques. Parallèlement, depuis 2010, les prêts verts ont été lancés grâce à un partenariat entre la Banque du Liban et le ministère de l’Energie et de l’Eau (Neerea), qui bénéficie du support technique du Pnud à travers un financement sécurisé par Global Environment Facility (GEF), une entité relevant de l’Union européenne. Ce programme national est destiné tant aux PME qu’aux individus. Le montant des prêts accordés peut varier entre un euro et un million d’euros donsac, sans montant minimum exigé. Ces prêts verts bénéficient d’un taux d’intérêt nul et sont remboursables sur une période s’étendant entre 5 et 10 ans. Pour les prêts dont les montants dépassent un million d’euros, un taux d’intérêt de 3% est appliqué. Les bénéficiaires de ce financement sont susceptibles de profiter également de dons dont la somme pourrait représenter le total du coût de l’investissement. Les crédits verts subventionnés peuvent être obtenus à partir des banques commerciales.
Ceci dit, l’énergie éolienne constitue un complément naturel à l’hydroélectricité. Les centrales hydroélectriques permettent, à certaines conditions, de compenser le caractère intermittent de l’énergie éolienne. En contrepartie, les éoliennes permettent de moins solliciter la réserve hydraulique des réservoirs. Un consortium formé d’un partenariat entre Goldwind, Hawa Akkar et CCC a soumis la première offre pour la création d’un parc éolien au Akkar le 25 juin 2013.
Selon les chiffres d’organismes internationaux, les nouvelles politiques sur les énergies alternatives suivies par les gouvernements régionaux permettraient au Proche-Orient une croissance multipliée par dix des parcs éoliens en 2015 par rapport à 2010 et de 23 fois en 2020 en comparaison avec 2010.
Les risques d’un projet ER
Certains experts estiment que le risque de
gestion d’un projet d’ER est un élément crucial au niveau de la sécurisation des fonds de financement surtout lorsque le pourvoyeur de capitaux considère qu’il s’agit d’investissement dans une industrie qui demeure à un niveau relativement embryonnaire. Par ailleurs, il existe des risques liés à des changements des lois par les gouvernements comme à titre indicatif la suppression des subventions. Des risques liés au recul du volume de la production d’énergie en raison du manque de vent ou de jours
ensoleillés. Les volumes du vent peuvent
fluctuer de 25% par rapport au volume normal et les radiations solaires de moins de 4%. Ce qui signifie que le risque de défaut est supérieur dans le cas d’un projet de production d’énergie éolienne. Ainsi, le facteur climatique est
susceptible de menacer tout court la viabilité du projet d’ER. Enfin, il faut prendre en compte les risques technologiques qui se traduiraient par une obsolescence rapide des équipements.
Liliane Mokbel