«Il Canto degli Italiani» a retenti le jeudi 13 février à Beyrouth après l’hymne national libanais, devant les plus hauts dignitaires de la magistrature, marquant ainsi la présence de l’Italie à la grande salle de la Cour de cassation, à l’occasion de la signature d’un protocole d’accord entre le Conseil supérieur de la magistrature libanais et le Consiglio Superiore Della Magistratura italien.
C’est en présence de l’ancien ministre de la Justice, Chakib Cortbaoui, de l’ambassadeur d’Italie, Giuseppe Morabito, de la représentante de la Délégation de l’Union européenne, Elsa Fenet, et des deux bâtonniers de Beyrouth et de Tripoli qu’a eu lieu la signature d’un protocole visant à établir les fondations d’une coopération bilatérale entre les deux institutions judiciaires.
Prenant la parole, le président du Conseil supérieur de la magistrature, Jean Fahd, a fait défiler en quelques lignes, sept siècles d’histoire entre le Liban et l’Italie.
Mais avant, il s’est attardé sur l’apport d’un des quatre sages du droit de tous les temps. Domitius Ulpianus, ce Libanais de Tyr qui veille toujours sur Rome depuis la façade principale du palais de justice et qui est l’un des pères du droit romain. 1 600 ans avant le siècle des Lumières, il a établi le principe humain selon lequel, si au regard du ius civile, les esclaves ne comptent pas, il n’en est toutefois pas ainsi par rapport au droit naturel, car pour ce qui touche à ce dernier, tous les hommes sont égaux.
Le président Fahd s’est appuyé sur l’histoire pour se propulser vers l’avenir en évoquant que «l’heure actuelle est à l’instauration par voie de conventions judiciaires internationales de garanties et de mécanismes judiciaires standardisés dans tous les Etats. Les organismes judiciaires sont animés de mouvements de convergences et d’emprunts réciproques. L’heure est d’assurer que la justice est attentive, compréhensive, tolérante, rapide et équitable». Ainsi, la justice libanaise ne peut pas rester à l’écart de cette mondialisation des normes de la justice. «Nous devons être au rendez-vous», a-t-il dit. Avant d’ajouter que «le projet de modernisation du CSM dans son mode de fonctionnement, dans ses moyens logistiques et administratifs, s’inscrit dans cette voie. Les efforts du ministère de la Justice et le soutien de l’Union européenne constituent une pierre angulaire dans ce projet».
Le président Fahd n’a pas manqué l’occasion de mettre l’accent sur l’indépendance de la justice. «Qui oserait dire aujourd’hui qu’il n’est pas favorable à l’indépendance de la justice? Mais comment le CSM peut-il être garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire, quand ses décisions les plus importantes doivent être munies d’un visa sous la forme d’un décret du pouvoir exécutif? Un visa qui contrarie la prise de décision rapide et fait perdre à la gouvernance de la justice sa stabilité et sa souplesse», a-t-il rappelé.
Pour sa part, le vice-président Michele Vietti qui trône sur la plus haute marche de l’institution judiciaire italienne, a fait le déplacement à Beyrouth malgré la situation sécuritaire critique pour témoigner de l’amitié sincère et durable, qui lie l’Italie et le Liban et dont les racines plongent dans la commune appartenance à la mer Méditerranée, dans leur ancienne civilisation et dans les millénaires d’histoire partagée. Il a souligné que «la magistrature libanaise a fortement contribué à établir une paix solide et durable et a toléré, pour cette raison, un énorme coût en termes de vies humaines. Ce destin la rapproche de la magistrature italienne dont plusieurs magistrats ont perdu la vie dans la lutte contre le crime organisé et le terrorisme.
Vietti a abordé le thème de l’autonomie et de l’indépendance de la magistrature. Tout en martelant que «l’indépendance de la magistrature n’est pas un cadeau. Le corps judiciaire doit la conquérir par sa compétence, son travail, son professionnalisme et la qualité de la justice rendue».
J.SE.
Le site du CSM
L’événement a vu le lancement du site Web du Conseil supérieur de la magistrature
(www.csm.gov.lb) pour être un outil de
communication entre le CSM et les magistrats et entre les magistrats eux-mêmes à travers les Conseils consultatifs des magistrats, ainsi qu’un moyen d’information fiable pour les citoyens. Ce site Web s’inscrit dans la politique de transparence prônée par le CSM.
Et pour clôturer cette journée à la Cour de cassation, le président Fahd a invité Chakib Cortbaoui, Michele Vietti et le grand sculpteur Rudy Rahmé pour dévoiler la statue de la «Dame Justice». Ce dernier a fait surfer la salle sur les paroles émouvantes d’une poésie magnifique chargée d’émotions.