Magazine Le Mensuel

Nº 2941 du vendredi 21 mars 2014

  • Accueil
  • Culture
  • Livre
  • Nour, entre ombres et lumière de Randa Sadaka. «La société libanaise peut être surprenante»
Livre

Nour, entre ombres et lumière de Randa Sadaka. «La société libanaise peut être surprenante»

Nour, entre ombres et lumière est un ouvrage qui relève du roman et de l’essai. L’auteure Randa Sadaka y dissèque les rouages du pouvoir, la liberté des mœurs, l’apport de l’art…
Un ouvrage à l’écriture fine et nuancée. Interview.

 

Votre héroïne, Nour, fait un tour dans les coulisses du pouvoir. Qu’y découvre-t-elle?
Elle découvre les bassesses politiciennes, les manipulations, les tractations, ce qu’il y a de plus noir dans l’être humain, son côté machiavélique. Ce qui est surprenant pour elle et autant pour le lecteur, c’est qu’elle pénètre dans cet univers avec une certaine naïveté. C’est une jeune femme anti-fataliste. Elle croit dans un certain humanisme dans l’individu et c’est ce qui guide ses choix.

Vous avez vécu à l’étranger où la liberté des mœurs, 
la liberté d’être, de penser et d’agir est source 
d’épanouissement, alors qu’au Liban et dans la majeure partie des sociétés arabes, ces libertés font défaut. Le regard de la société et ses lois 
notamment fondés sur des structures 
communautaires étant sévères sur ce point, qu’en pensez-vous?
Je crois que ce qui doit définir l’individu où qu’il vive, c’est son libre arbitre. L’homme et la femme devraient être en mesure d’agir dans leur âme et conscience au-delà de leur nationalité, de leur confession et surtout de leur héritage familial inconscient qui, en Orient, est très lourd.

Comment sortir de ce cercle vicieux?
Par le progrès. Comprendre le monde qui nous entoure. Se retrouver autour d’une réflexion complexe et individuelle. C’est l’objet de ce livre qui se place dans le courant littéraire déconcertant. C’est l’éveil des consciences citoyennes. L’art à cet égard peut être d’un grand secours.

C’est ce qu’on retrouve en filigrane dans  le roman…
Dans son rôle justement de questionnement, l’art est d’un grand secours. Nous allons qualifier cet ouvrage d’engagé, de transgressif. Un exemple concret. On parle beaucoup d’art contemporain dans le livre. Il s’agit simplement de la remise en question de la société de consommation.
Si on parle d’impressionnisme, on est dans l’art figuratif dans toute sa splendeur puisqu’il s’agit d’une rupture. On rompt avec la peinture religieuse, avec les sujets historiques pour aboutir à la conscience selon la volonté du peintre. Ce qui est intéressant, c’est que si on s’approche de trop près, on ne voit que de brefs coups de pinceaux sans comprendre l’intention de l’auteur. Mais, en reculant, on plonge dans la réalité subjective du peintre et c’est peut-être là le secret: avoir une réflexion, un recul et un questionnement pour construire sa propre analyse au-delà des préconçus sociétaux.

Ce roman est-il autobiographique?
Je laisse l’imagination du lecteur le guider.
 

A quelles conclusions arrivez-vous?
J’ai simplement voulu exprimer une passion, sans retenue et sans compromis. C’est la mise à nu de rencontres, d’observations et, pour une certaine part, d’expériences. Ce que j’espère simplement c’est prendre le lecteur par la main et ne pas la lâcher jusqu’au bout du récit.

A l’instar de votre héroïne, placez-vous un espoir dans l’humanité de l’individu?
Dans l’humanité de l’individu, mais aussi du citoyen libanais. C’est une responsabilité d’avoir la chance de posséder une biculture. Si parfois la société libanaise brille par son inconstance ou sa volonté de poser un regard sur les actes de l’autre avec une sorte d’ingérence patriarcale, je crois que cette même société peut être surprenante par sa richesse, par les hommes et les femmes qui la composent et les opportunités qu’elle peut offrir.

Propos recueillis par Danièle Gerges

Bio en bref
Née au Liban, elle a vécu à Paris toute sa vie. Randa Sadaka est de retour à Beyrouth depuis 2011. Juriste de formation, elle travaille dans le domaine culturel francophone où elle prend activement part à la promotion linguistique et humaniste de la langue française. L’écriture est son outil d’expression, inspirée par des rencontres, l’observation de la société, 
l’expérience et l’ouverture sur l’autre pour explorer des thèmes actuels et s’interroger sur le monde qui l’entoure.

Related

L’empereur à pied, de Charif Majdalani. «Pour faire encore… durer un peu l’éternité»

Leila Barakat. Une révolution contre la corruption

Ghassan Tuéni (1926-2012). Chadia Tuéni: «Sa philosophie, être utile et faire face»

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.