La rencontre qui a eu lieu entre les présidents Amine Gemayel et Michel Sleiman, les dialogues, ainsi que l’élection présidentielle ont été au centre d’un entretien avec Elie Marouni, ancien ministre et député de Zahlé, membre du parti Kataëb.
Que pouvez-vous nous dire à propos de la rencontre qui a eu lieu entre les présidents Amine Gemayel et Michel Sleiman?
Ils ont tous deux déclaré qu’il s’agissait d’une rencontre de concertation sur des sujets qui concernent tous les Libanais. Les deux présidents ont également passé en revue le mécanisme pour la prise des décisions au sein du Conseil des ministres. Le but de cette rencontre est d’apporter un appui au président Tammam Salam et à son gouvernement. Elle n’a pas eu lieu dans le but de créer un parti ou un front, mais c’est une rencontre autour des dossiers dans l’intérêt de chaque Libanais.
Cette réunion comprenait huit ministres. Pourrait-on penser à la formation d’un tiers de blocage?
Dans ce gouvernement, il n’y a pas de tiers de blocage car chaque ministre constitue à lui seul le tiers de blocage puisque les décisions sont prises à l’unanimité. Il suffit qu’un seul ministre s’abstienne de signer un décret, pour que celui-ci soit bloqué. A partir de là, on ne peut pas parler d’un tiers de blocage.
Nous avons l’impression que le parti Kataëb fait cavalier seul ces temps-ci…
Le parti Kataëb est partout. Il est représenté au gouvernement par ses ministres et au Parlement c’est le bloc qui a présenté le plus de projets de loi. Nous appuyons fermement tout dialogue. A un moment où tous ceux qui dialoguent aujourd’hui ne se parlaient pas, nous appelions au dialogue et invitions les Libanais à se parler. Nous sommes entièrement convaincus que le dialogue reste la meilleure solution pour résoudre tout conflit. Nous soutenons tout dialogue pouvant aboutir à réduire les tensions et à mener à l’élection d’un président de la République. Les différents dialogues qui ont lieu aujourd’hui, que ce soit celui du Hezbollah avec le Courant du futur ou celui du Courant patriotique libre avec les Forces libanaises, prouvent que nous avons raison d’être favorables à toute forme de dialogue répondant à notre conviction. Si les Forces libanaises dialoguent aujourd’hui avec le Courant patriotique libre, c’est parce que les différends qui existent entre eux sont trop profonds et remontent très loin dans le temps. Nous n’avons pas les mêmes différends. Les Forces libanaises sont nos alliées au sein du 14 mars et nous avons de simples divergences de vue avec le Courant patriotique libre. Quant au dialogue entre le Hezbollah et le Courant du futur, il a surtout pour but de réduire la tension sectaire. Par ailleurs, le parti Kataëb a aussi établi un dialogue avec le Hezbollah et tient avec lui des réunions régulières sur tout ce qui concerne l’intérêt du pays, sans pour autant avoir un ordre du jour déterminé.
Avez-vous le sentiment d’être tenus à l’écart par le CPL et les FL?
Nous nous rencontrons au Parlement avec les membres du Bloc du Changement et de la Réforme. Notre dialogue est permanent. Celui-ci se poursuit également au sein du gouvernement et rien ne nous empêche de rencontrer ses membres. Quant aux Forces libanaises, il y a des visites régulières entre nous et nous sommes des alliés dans le cadre du 14 mars. Nous n’en sommes pas loin et nous nous imposons sur la scène politique locale.
Peut-on espérer assister bientôt à une élection présidentielle?
J’écarte cette probabilité. Tous les indices montrent que nous sommes encore loin de cette échéance car chacun campe sur sa position, alors que la priorité de chaque dialogue devrait porter sur l’élection présidentielle. Ce sujet doit être le premier point de tout ordre du jour. Le pays ne peut pas fonctionner sans tête. Le président de la République est une nécessité. Nous sommes toujours dans une période d’attente. C’est comme si l’on donnait de la morphine au peuple. Nous reportons nos décisions d’échéance en échéance. Certains attendent l’issue des négociations entre les Etats-Unis et l’Iran. Et si elles étaient encore une fois reportées? Personnellement, je n’ai pas vu un seul navire de guerre qui empêche les députés de se rendre au Parlement pour élire un président et aucun ambassadeur n’a chuchoté à l’oreille de quelqu’un de ne pas se rendre à la Chambre. Nous avons, en tant que Libanais, l’art de lier notre destin à des échéances extérieures qui peuvent éventuellement avoir des retombées négatives sur la scène locale, alors que nous avons pour but l’intérêt du pays.
Propos recueillis par Joëlle Seif