Magazine Le Mensuel

Nº 3011 du vendredi 24 juillet 2015

Confidences Liban

Confidences Liban

Le ras-le-bol de Salam
Le président Tammam Salam, comme l’indiquent des sources ministérielles, a prévenu le ministre Mohammad Fneich du Hezbollah qu’il ne supporte plus l’escalade de la campagne aouniste menée contre lui, ni la tentative d’imposer un sujet non consensuel à l’ordre du jour du Conseil des ministres en sabotant ses prérogatives. Pour le calmer, Fneich lui a recommandé d’éviter le heurt, mais le Premier ministre a répondu: «Je suis celui qui supporte le plus. Ou bien je reste tel que je suis en exerçant mes prérogatives et une politique d’entente ou, alors, je vous cède la place pour que vous assumiez vos responsabilités. Vous, vous cherchez à ménager le général Michel Aoun. Je suis sérieux, ma tolérance a des limites après ce que j’ai entendu… Je n’accepterai pas qu’on me manque de respect en Conseil des ministres. Je compte réagir et advienne que pourra». Fneich aurait participé avec Nouhad Machnouk à trouver un règlement à l’algarade en poussant Gebran Bassil à accepter l’entente conclue dans le bureau de Salam.

 

Marchandages autour d’une session
Les contacts relatifs à l’ouverture d’une session parlementaire extraordinaire se poursuivent loin de toute agitation. Le décret sera signé avant la fin du mois par la majeure partie du gouvernement, selon les prévisions, et il est fort possible que la séance législative soit convoquée au début du mois d’août. Parmi les signataires, les trois ministres du président Michel Sleiman qui attendent des garanties spécifiques du président Nabih Berry, les ministres du Hezbollah et certains chrétiens indépendants, et si les Kataëb s’abstiennent, ils ne bloqueront pas l’adoption du décret. Le général Michel Aoun, pour sa part, lie son approbation au règlement du mécanisme de fonctionnement du gouvernement que le Premier ministre, Tammam Salam, a promis de débattre dans le calme lors du prochain Conseil des ministres. Le président de la Chambre, Nabih Berry, souhaite réactiver l’action législative à travers un décret ambulant qui sera validé s’il recueille 13 voix de ministres (la moitié +1).

Le Moustaqbal, grand absent
La vague de solidarité avec le chef du gouvernement, Tammam Salam, a pris un caractère plus politique que populaire, avec un grand absent qui s’est fait remarquer: le Moustaqbal. Selon ses sources, cheikh Saad Hariri a voulu éviter l’escalade pour deux raisons: ne pas se laisser entraîner dans un conflit sunnite-chrétien, comme le souhaitent Michel Aoun et le Hezbollah avec lui, et éviter de conférer à Salam une plus grande dimension dans la rue sunnite. C’est ce qui explique la précipitation du ministre Nouhad Machnouk à régler la querelle qui a éclaté entre Salam et Gebran Bassil en plein Conseil des ministres et qui a été clôturée par un score nul.

Le Moustaqbal déçu par les chrétiens du 14 mars
«Nous nous attendions à être soutenus par Samir Geagea et Samy Gemayel, mais ce sont Sleiman Frangié et Michel Sleiman qui nous ont soutenus…». Tels sont les propos de certains députés du Moustaqbal tenus sur un ton de reproche à l’égard des chrétiens du 14 mars. Mais, ajoutent-ils, cela ne signifie pas que les divergences qui opposent Nabih Berry et Sleiman Frangié au général Michel Aoun puissent aboutir à une rupture… Il est cependant préférable de circonscrire la querelle avec le chef du CPL pour éviter qu’il se jette complètement dans les bras du Hezbollah qui mise sur un conflit chiite-sunnite.

Du tic au tac
Le secrétaire général du Hezbollah a répondu aux propos de Nouhad Machnouk sans le nommer. «La lune arabe l’emportera sur le croissant iranien», avait clamé le ministre de l’Intérieur dans le cadre d’un discours, sayyed Hassan Nasrallah a rétorqué: «Nous refusons l’accusation faisant référence à un projet perse ou un croissant chiite. Cela est insensé!».
Quant à la déclaration de Nasrallah sur «la route de Jérusalem qui passe par le Qalamoun, Deraa et autres villes syriennes», elle a été commentée comme suit par Saad Hariri: «La route de la Palestine ne passe ni par Zabadani, ni par Damas. La route de Beyrouth à Téhéran passe, en revanche, par la Syrie et l’Irak. Pas celle de la Palestine».

 

Taymour s’installe
Après avoir été adoubé pour prendre la relève du leadership druze, Taymour Walid Joumblatt a entamé sa participation à la gestion des relations extérieures tissées par son père à travers le monde, à commencer par la relation avec la Russie héritée de père en fils. C’est dans ce cadre que s’est inscrite la visite de Taymour à Moscou en compagnie du ministre Waël Abou Faour. Cette démarche est intervenue après les critiques adressées par le député Walid Joumblatt au président Vladimir Poutine lui faisant assumer la responsabilité de la poursuite de la guerre en Syrie à cause du soutien apporté à Bachar el-Assad. Et aussi, après l’ouverture de Moscou sur le député Talal Arslan qui a rencontré Sergueï Lavrov, il y a environ un mois, dans la capitale russe.


Les lignes rouges du Hezbollah
La crise n’a pas explosé à la face du Hezbollah comme prévu, avancent des sources du 8 mars. Les responsables du parti ont réussi à absorber la colère du général Michel Aoun en le laissant s’exprimer de la façon qu’il juge adéquate, mais en lui traçant une limite, à savoir ne pas dépasser la ligne rouge qui se résume au maintien du gouvernement. Ainsi, le Hezb a pu tirer son épingle du jeu de la rue sans renoncer à l’appui qu’il apporte à Aoun, malgré le message sécuritaire en provenance de Saadiyate. Ces sources ajoutent: le Moustaqbal a sans doute oublié que les priorités du Hezbollah sont certes en Syrie, mais conserver la scène interne libanaise à l’abri du conflit régional est tout aussi important à ses yeux. L’accord irano-occidental aura sans doute des incidences sur le Liban et ce qui importe au Hezb c’est une transition en douceur permettant à tous d’en digérer les résultats. Ainsi, il n’admettra pas l’isolement de ses alliés mais, en même temps, il ne veut pas lâcher le Moustaqbal en l’absence d’un autre partenaire sunnite.


Français et Russes se concertent
Il est aujourd’hui nécessaire que la communauté internationale se penche sur le dossier libanais, de l’avis d’un diplomate européen. Nécessaire mais pas urgent. A l’étape précédente, les affaires libanaises étaient remisées au fond du tiroir, et l’intérêt était focalisé sur la stabilité sécuritaire et gouvernementale. Mais, la semaine passée, on a enregistré un contact franco-russe au sujet de la présidentielle. Une feuille de route aurait été établie à cet égard, mais le diplomate français Jean-François Girault ne reviendra pas à Beyrouth.

 

Entre la Jamaa islamia et le Moustaqbal
Après les différends qui les ont opposés à Saïda au cours du mois du Ramadan, des sources islamiques prévoient une amélioration des relations entre le Moustaqbal et les Ikhwan du Liban. La nouvelle politique adoptée par Riyad mise sur l’octroi d’un rôle régional aux Ikhwan, dont la Jamaa islamia au Liban et le Hamas palestinien. Les sources construisent ces probabilités sur l’approfondissement du fossé au niveau stratégique sur l’axe Riyad-Le Caire. La Jamaa à Saïda n’a pas réussi, comme le rapportent des observateurs locaux, à empêcher le cheikh Hassan Merheb de prononcer un prêche dans la mosquée Bahaeddine Hariri située sur l’autostrade est de la ville. Les responsables des Ikhwan avaient demandé aux habitants de boycotter la cérémonie et d’interdire à Merheb de pénétrer à l’intérieur de la mosquée parce qu’il avait fait l’éloge du président Abdel-Fattah el-Sissi. Mais, contrairement aux attentes de la Jamaa, la mosquée était remplie de fidèles venus écouter le cheikh Merheb, originaire du Akkar et rentré au Liban, après avoir résidé en Egypte, pour occuper le poste d’inspecteur au «wakf» du Nord. On dit que la députée Bahia Hariri, qui s’oppose à tout extrémisme, a joué un rôle déterminant en refusant d’annuler l’intervention de Merheb au grand dam des Ikhwan. Elle a prôné le calme et la tolérance. Le cheikh des Ikhwan, Abdallah el-Bakri, l’un des ulémas de la mosquée où la célébration a eu lieu, a quand même récité la prière en présence de Merheb.

Le général Roukoz et la bataille de Aoun
Certains blocs au sein du cabinet n’appuient pas la désignation du général Chamel Roukoz à la tête de l’armée, malgré tout le respect et l’estime qu’ils lui vouent. Le problème réside dans le fait que menant la campagne en faveur de Roukoz, le général Michel Aoun le dessert en donnant l’impression que ce dernier lui porte allégeance. Il est nécessaire, ajoutent ces milieux, que toutes les parties sentent que le commandant de l’armée est à égale distance de tous. Les parties qui manifestent peu d’enthousiasme à la désignation de Roukoz ne veulent pas tant mettre un veto sur sa personne, mais craignent l’insistance de Aoun à se porter candidat à la présidence et donc ne souhaitent pas qu’un seul camp politique prenne le contrôle de la présidence et du commandement de la troupe. Pourquoi, se demandent les sources, le général de Rabié reste attaché à sa candidature à la première magistrature et continue à refuser tout règlement qui porterait le général Roukoz à la tête de l’armée et un candidat consensuel à la tête du pays? Ces craintes sont justifiées, de leur point de vue, puisque le général Aoun, qui se positionne toujours dans l’axe politique du Hezbollah, ne peut pas se présenter en rassembleur.

Transfert de prisonniers de Roumieh à Tripoli
Le transfert de Roumieh à la prison de Kobbé à Tripoli d’un nombre de détenus islamistes qui ont trempé dans les événements de Bihnine et du chef-lieu du Nord, incluant plusieurs chefs de groupes armés responsables d’attaques contre des militaires, permettra la poursuite de leurs procès devant les tribunaux de la ville. Cette opération s’inscrit dans le cadre de la séparation des prisonniers en faveur de laquelle œuvrent le ministère de l’Intérieur et la direction des prisons pour alléger le surpeuplement carcéral et consolider la sécurité dans le milieu. La source juridique, qui rapporte l’information, estime que toute amélioration sur ce dossier reste partielle. Les capacités d’accueil de la prison de Kobbé avec son infrastructure sont limitées et le bâtiment, originairement composé d’anciennes étables, ne peut pas recevoir plus de 250 personnes alors, qu’actuellement, il en compte 780. L’augmentation du taux d’occupation entraînera des difficultés sécuritaires entre les détenus et avec la garde qui doit accomplir sa tâche dans des conditions déplorables. Les familles des quelque 85 prisonniers transférés, inquiètes, ont effectué des contacts à ce sujet avec les instances politiques surtout que des rumeurs font état d’agressions mentales et corporelles que feraient subir les takfirsites islamistes à ces derniers.
Ce qui n’exclut pas les déclarations d’appui à la mesure prise par le ministre de l’Intérieur dans le but de «calmer les tensions», notamment celle du cheikh Nabil Rahim.

Les pressions sur Dar el-Fatwa
Une délégation de l’Union internationale des ulémas de la Résistance a demandé un rendez-vous au mufti de la République, le cheikh Abdel-Latif Derian. Après avoir pris connaissance de la liste des noms, le mufti a choisi de recevoir le cheikh Hassan Masri du mouvement Amal et refusé d’accueillir le président de l’union, le cheikh Maher Hammoud. L’attitude du cheikh Derian n’est pas surprenante depuis qu’il a complètement abandonné ce qu’on appelle «Le règlement égyptien» de Dar el-Fatwa, et décidé de se départir de tous les fonctionnaires qui portaient allégeance à l’ex-mufti, le cheikh Mohammad Rachid Kabbani. Une source concernée considère que Derian cherche à ménager certains milieux du Golfe importunés par le rôle de Hammoud dans l’apaisement de la tension entre sunnites et chiites et par ses déclarations critiques envers les dignitaires et organisations qui prêchent l’idéologie takfiriste. La source dément l’existence d’un différend personnel entre Hammoud et Derian, mais rapporte que ce dernier fait l’objet de pressions de la part des sympathisants du président Fouad Siniora qui veulent contrôler les fonctions principales à Dar el-Fatwa. Hammoud souhaitait inviter Derian au congrès Unis pour la Palestine qu’il organise le 28 juillet courant. Sachant que le cheikh druze Naïm Hassan, proche de Walid Joumblatt, a reçu tous les membres de la délégation sans exception.

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