«Je ne regrette pas mon acte», aurait dit Tarek Yatim interrogé par la police, un sourire glacial se dessinant sur sa figure de meurtrier. Le bourreau ayant mis fin aux jours de Georges Rif mercredi 15 juillet, dans le quartier de Gemmayzé, en raison d’«une priorité de passage». La conductrice de la Kia Picanto qui a poursuivi le véhicule de Rif provoquant l’accident meurtrier a fait l’objet d’un mandat d’arrêt, le 22 juillet, alors que Yatim était déjà arrêté.
Aujourd’hui, plus question d’être «insulté» ou «pourchassé» au Liban. Vous êtes victime d’une insulte? Tuez la personne qui porte atteinte à votre dignité. Vous êtes pourchassé par une autre voiture parce que vous avez voulu la doubler après l’avoir cognée? Poignardez celui qui vous harcèle, sans état d’âme. Une leçon que vient nous apprendre Tarek Yatim qui, durant son interrogatoire, affirme, sans sourciller: «J’étais en colère, car il me pourchassait en voiture après avoir refusé de céder le passage. Il m’a insulté lorsque je me suis dirigé vers lui, ce qui m’a davantage mis en colère. Qui se croit-il? La police? Qui est-il pour qu’il me pourchasse?». Qui êtes-vous M. Yatim pour rendre une femme veuve et des enfants orphelins de père?
Retour sur les faits
Alors que Georges Rif raccompagne son épouse, Roula, de son travail, le mercredi 15 juillet, tous deux sont surpris par l’agressivité d’une conductrice d’une Kia Picanto, qui essaie de les doubler peu avant l’entrée du tunnel Salim Salam. Georges Rif refuse de lui ouvrir la voie. C’est alors qu’encouragée par son compagnon à bord, Tarek Yatim, Lina Hassan Haïdar, menant la Kia, cogne volontairement la voiture de Georges Rif, qui perd tout contrôle, et le dépasse. Le véhicule de Georges heurte un mur du tunnel mais continue à rouler, poursuivant la Kia Picanto et enregistrant le numéro de la plaque d’immatriculation. Il est 19h02, lorsque Roula Rif contacte les Forces de sécurité intérieure (FSI), pour les informer qu’ils pourchassaient une voiture qui les avait harcelés sur la route de l’aéroport, selon le communiqué publié samedi par les FSI. L’agent, contacté par Roula Rif, prévient alors deux patrouilles se trouvant dans les parages, entre Bachoura et Tabaris, afin d’intercepter la voiture de l’agresseur. Quatre minutes plus tard, à 19h06, Roula Rif déclare à la police se trouver avec son mari à côté de l’église Saint-Maron, en direction de Saïfi. C’est alors que des cris se font entendre à l’autre bout du fil, et que la ligne est coupée, l’agent n’ayant pu recueillir d’informations supplémentaires. Après trois tentatives de reprise du contact avec Roula, les FSI reçoivent un appel à 19h09, les informant qu’un homme gît sur la chaussée, au niveau de l’hôtel Saïfi Suites. Georges Rif, ayant suivi la Kia jusqu’à une route qui se révèle être une impasse, se voit traîné par Tarek Yatim hors de sa voiture, attaqué à coups de couteau et frappé violemment au visage avec le manche de l’arme de Yatim. Roula, qui a essayé de secourir son époux de la barbarie de ce dernier, reçoit également des coups. Un employé de l’hôtel subit le même sort que celle-ci, après avoir essayé d’intervenir. Les policiers s’étant rendus sur place «le plus vite possible», comme l’assure la direction générale des FSI, Georges Rif agonisait déjà.
Des rumeurs ont commencé à circuler, dès jeudi, sur les réseaux sociaux, annonçant que l’assassin serait un garde du corps du président-directeur général de la SGBL, Antoun Sehnaoui. Cependant, le bureau du conseiller juridique du banquier n’a pas tardé à publier un communiqué où il était fermement affirmé qu’aucun lien ne s’établissait entre Sehnaoui et l’affaire en question et que «chaque mention de son nom dans ce dossier fera l’objet de poursuites devant les tribunaux afin de mettre un terme aux mensonges, au chantage et à toute tentative de modifier la véracité des faits». Sehnaoui a dénoncé ce crime odieux et exprimé sa sympathie envers la famille du défunt, réclamant que les «peines les plus lourdes soient retenues à l’encontre du meurtrier».
Tarek Yatim est à l’origine de plusieurs actes criminels, restés impunis. La justice n’a pas tardé à lui faire payer son crime, alors que sept jours plus tard sa compagne Lina Hassan Haïdar fait l’objet d’un mandat d’arrêt.
Natasha Metni
Twitter s’enflamme
Lancé sur le réseau social Twitter, le hashtag #Justiceforgeorge a été rapidement repris et retweeté par des centaines d’internautes qui ont souhaité exprimer leur solidarité avec la victime et sa famille. Le député de Beyrouth et ministre du Tourisme, Michel Pharaon, le ministre de l’Energie et de l’Eau, Arthur Nazarian, le député Mohammad Kabbani, et le chef du Courant patriotique libre (CPL), Michel Aoun, ont condamné ce meurtre le qualifiant de «barbare». Le CPL avait également indiqué que Georges Rif était membre du courant.