Le Festival international de Byblos se poursuit. Le mardi 28 juillet, Gregory Porter et ses musiciens ont offert au public libanais une merveilleuse nuit de jazz et de soul, unique, inattendue, les yeux dans les étoiles.
«Je sens que je suis dans un club de jazz à Harlem». C’est la phrase d’accueil que Gregory Porter a lancée au public libanais, dès la fin de la première chanson, avant de nous emmener «On (his) way to Harlem». Cette sensation prenante d’être effectivement dans un club enfumé, quelque part ailleurs, loin d’ici, dans un espace-temps illimité, durera tout au long du concert, une heure et demie, où le charme de Gregory Porter et de ses musiciens nous coupera le souffle.
On ne s’y attendait peut-être pas, mais ce fut une nuit magique, empreinte de tant de chaleur. L’osmose, la synergie entre la scène et la salle s’est tout de suite instaurée. Et le public s’est laissé emporter, à son insu, par celui qui est considéré comme l’un des meilleurs vocalistes de son temps, lauréat d’un Grammy Award pour son 3e album Liquid Spirit en 2014.
«Certains l’appellent groove, énergie, mojo… Moi je l’appelle l’esprit». C’est cela le pouvoir de la musique de guérir tous les maux, de s’insinuer dans le bonheur du corps et de l’esprit, pour atteindre une sensation de bien-être, indescriptible, indicible, le temps d’une nuit suspendue. Gregory Porter nous l’a offert, par sa voix de baryton, capable de se glisser dans toutes les nuances des sentiments humains, d’émouvoir et d’entraîner, par ses textes tout à la fois emplis d’humanisme et de contestation, par sa présence de charme sur scène, sa simplicité déroutante, par la brillance des musiciens qui l’accompagnent, Chip Crawford au piano, Aaron James à la contrebasse, Emanuel Harrold à la batterie et Yosuke Sato au saxophone, longuement et chaleureusement applaudis.
A mesure que «le temps suspend son vol», reviennent à l’esprit ces mythes, ces légendes et ces histoires de «crossroad, du fantôme de Robert Johnson, de pacte avec le diable contre le don de la musique… Il est impossible parfois, souvent, de déterminer quel est ce grain magique, cet élément insaisissable qui fait d’un concert une réussite. Cette nuit-là, ce mardi 28 juillet à Byblos, c’était bel et bien cet état de fait qui s’est immédiatement ressenti de part et d’autre de la scène. De tous les recoins, des exclamations émerveillées fusaient, et en quittant la place, elles se sont poursuivies, les sourires reflétant le bien-être, ce «feel good» inhérent à la musique, au jazz, à la soul. «There will be no love that’s dying here», grâce à la musique, à travers la musique. Merci M. Porter!
Leila Rihani