La prescription médicale unifiée est entrée en vigueur le 10 du mois en cours. Les pharmaciens et les importateurs de médicaments, deux des parties concernées par cette mesure de réforme du secteur de la santé, semblent mécontents, donnant de la voix chaque fois que cela leur est possible. Quant aux tiers payants comprenant entre autres la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), le ministère de la Santé et les assureurs privés, ils se sont conformés strictement aux directives et ne couvrent plus que les médicaments figurant dans la prescription unifiée. Pour l’ancien député, le Dr Ismaïl Succarié, la prescription unifiée, en dépit de certains aspects positifs, n’atteint pas ses objectifs en raison de l’absence de critères d’une bonne gestion et d’un contrôle scientifique efficient du marché du médicament. Il a mis en garde contre l’existence sur le marché de centaines de médicaments dont les compositions et l’origine de fabrication sont méconnues en plus de ceux qui sont frauduleusement introduits au Liban via la Syrie. Il a pointé un doigt accusateur sur les médicaments génériques dont les boîtes ne sont pas dotées de prospectus. La loi à ce niveau est explicite dans la mesure où elle interdit aux pharmaciens de remplacer le médicament prescrit par un générique dont la composition n’est pas spécifiée. Aussi le Dr Succarié s’est-il interrogé sur la baisse arbitraire des prix de certains médicaments à un niveau tel que les prix de leurs correspondants génériques sont devenus plus élevés. Sachant que les prix des génériques se doivent d’être faibles du fait qu’ils ne sont pas soumis à l’imposition de la TVA ni aux impôts sur les matières premières dont ils sont composés surtout pour ceux importés d’Europe. Ceci sans compter la disparition injustifiée du marché d’autres médicaments essentiels. Une enquête express, effectuée par Magazine auprès de plusieurs pharmaciens de la capitale, a montré le mécontentement de ceux-ci qui s’assimilent amèrement à «des vendeurs dans des supermarchés», insistant sur la suppression de leur rôle de conseillers du malade liée surtout à l’administration de certains médicaments qui ne nécessitent pas l’intervention d’un médecin. «Ces médicaments sont ceux qui ont subi d’une manière drastique la décision du ministère de baisse des prix et qui assuraient des profits aux pharmaciens, alors que les prix des médicaments à la base suffisamment chers sont restés inchangés», souligne un pharmacien. En réponse à une question, un autre pharmacien relève que «les prix des médicaments importés d’Europe avaient déjà reflété le recul de la valeur de l’euro, ce recul ne représentant pas plus de 1%». Dans ce même contexte, il a exprimé sa surprise de voir que les médicaments administrés pour le traitement du cancer et d’autres anxiolytiques n’avaient subi aucune baisse de prix. Ces mêmes sources croient savoir que la révision à la baisse effectuée par les importateurs de médicaments aurait été délibérément importante afin de couper l’herbe sous les pieds de certaines parties influentes dans le pays qui planifiaient l’appropriation de l’importation de génériques. D’après le président de l’Ordre des pharmaciens Rabih Hassounah, l’octroi d’un générique ne devrait être mis à la disposition du public que sous la supervision d’un pharmacien. Quelle que soit la conjoncture du moment en termes de pertes et/ou de gains financiers des pharmaciens et des importateurs de médicaments, le citoyen bénéficie jusqu’à nouvel ordre d’une réduction de près de 30% de sa facture de médicaments.
Liliane Mokbel