Un succès. C’est ainsi qu’on peut qualifier la manifestation du Courant patriotique libre (CPL), place des Martyrs, le vendredi 4 septembre. Malgré les derniers remous au sein du parti et la désignation d’un président qui ne fait pas l’unanimité, les partisans du CPL ont encore une fois renouvelé leur support au général Michel Aoun, démentant toutes les rumeurs sur un recul de sa popularité et sa représentativité.
Ils ont tous répondu présents à l’appel du général. Des quatre coins du Liban, son Chaab Loubnan el-azim a accouru. Des milliers de personnes ont pris d’assaut la place des Martyrs faisant revivre un bref instant la magie du fameux 14 mars 2005, dont le CPL fut l’un des principaux artisans.
Tôt dans l’après-midi, du Nord, du Sud, du Metn, de Jbeil, du Kesrouan et de toutes les régions libanaises, des groupes se sont rassemblés pour se diriger en convoi vers Beyrouth. Prenant la tête des partisans du Metn, Ibrahim Kanaan, accompagné de son épouse, est arrivé vers cinq heures à la place des Martyrs. De nombreux députés et ministres, notamment Nabil Nicolas, Abbas Hachem, Simon Abi Ramia, Elias Bou Saab et Gebran Bassil, fraîchement désigné président du CPL, se sont joints aux manifestants. Toutes les figures du CPL étaient là. Nicolas Sehnaoui, Gaby Layoun, Ziad Abs. A leurs côtés, des citoyens de tous les milieux et catégories, des jeunes et moins jeunes, des hommes, des femmes, des enfants. Certains sont venus en famille, se vantant d’être de fervents partisans du «Général», comme ils l’appellent affectueusement, depuis 1988. Pour la première fois, on notait également la présence d’artistes venus témoigner ouvertement de leur soutien au général Aoun tels que Zein el-Omr, Samir Sfeir et Mouïn Chreif.
Alliés et adversaires surpris
Selon les observateurs, cette manifestation a surpris aussi bien les alliés que les adversaires. Contrairement à ce que certains affirment, le gigantesque rassemblement populaire a clairement démontré que le général Michel Aoun jouissait toujours d’une grande popularité et qu’il pouvait encore rassembler des dizaines de milliers de personnes. Si la place des Martyrs s’est couverte de l’orange du flux de participants, nombreux étaient ceux qui sont restés bloqués dans leurs voitures, ne réussissant pas à accéder au lieu du rassemblement. Chose remarquable au cours de cette manifestation, il n’y eut aucun débordement ni aucun dérapage. Aucun incident ou accrochage ne fut enregistré avec les forces de l’ordre, d’ailleurs présentes, en nombre réduit. Cette manifestation était on ne peut plus pacifique et civilisée. Beaucoup l’ont même comparée à un nouveau tsunami. Pour les manifestants, c’était surtout la volonté et le désir de s’opposer à ce qu’on appelle désormais la décision «de briser Michel Aoun». Cette manifestation avait plus d’un but. Non seulement elle voulait démontrer la popularité du général Michel Aoun, mais aussi récupérer les slogans «volés» par les manifestants de la société civile et montrer la force du CPL sur le terrain. L’organisation de l’événement a été scrupuleuse. Le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a appelé lui-même des partisans qui ne sont pas proches de lui et qu’il n’avait pas rencontrés depuis longtemps pour les inviter à participer à cette manifestation. Même ceux qui avaient «boudé» l’élection de Bassil et avaient présenté leur démission ou exprimé leur désaccord ont fait savoir qu’ils se rendraient à la place des Martyrs pour la simple raison qu’ils croyaient encore dans la politique du CPL et que celui-ci représentait une cause et ne pouvait se résumer à des noms ou des positions.
Cette manifestation qui a rendu le général Aoun très fier a eu le mérite de pousser les «aounistes» à mettre leurs différends de côté et à se retrouver tous ensemble dans cette fameuse place, témoin de tant d’événements. Dans une brève allocution retransmise à partir de Rabié, le général Aoun a remercié ses partisans et s’est aussi adressé à eux à travers son compte Twitter: «Je suis fier de vous aujourd’hui, comme j’ai été fier de vous par le passé. Je vous ai appelés et vous avez répondu à mon appel».
Joëlle Seif