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Nº 3035 du vendredi 8 janvier 2016

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POLITIQUE

Désaccord sur la présidentielle. Aoun boycottera-t-il Bkerké?

Entre Bkerké et Rabié, les relations ont toujours été tumultueuses, ponctuées par des hauts et des bas. Mais il semble, aujourd’hui, à la lumière de la candidature de Sleiman Frangié à la présidence de la République, que rien ne va plus entre le patriarche Béchara Raï et le général Michel Aoun.

Dès le début, le patriarche maronite a fait part de son appui à l’initiative de Saad Hariri, estimant qu’elle était sérieuse et qu’elle représentait une grande opportunité pour mettre, enfin, un terme à la vacance présidentielle. Cette position, le cardinal Béchara Raï en a d’ailleurs informé ses différents interlocuteurs. Au cours de sa rencontre avec l’homme d’affaires Gilbert Chaghouri en Allemagne, qui l’avait tenu au courant des détails, Raï aurait manifesté son soutien à cette initiative. A leur tour, le président Tammam Salam et l’ambassadeur d’Arabie saoudite, Ali Awad Assiri, auraient entendu des propos similaires de la part du prélat maronite.  
Dans ses vœux adressés à l’occasion de Noël, le patriarche avait clairement appelé à l’élection d’un président de la République dans les plus brefs délais, exhortant les blocs parlementaires à envisager avec sérieux la nouvelle initiative qui a déjà eu, selon lui, des retombées positives sur les plans financier et monétaire. Selon le patriarche, cette initiative a également donné un nouvel élan aux relations entre le 8 et le 14 mars et opéré un rapprochement entre les deux camps. C’est une occasion pour les blocs politiques et parlementaires de se retrouver autour de cette initiative et de se rendre au Parlement pour élire un président.
Le patriarche maronite s’est également interrogé sur le rapport entre le «panier» ou «compromis global» et l’élection d’un président. Les observateurs ont vu dans ces propos une critique indirecte concernant le fait de lier l’élection présidentielle à un accord politique global portant sur la loi électorale, le gouvernement et sa composition, la répartition des parts à l’intérieur de celui-ci et la politique étrangère du président de la République. Les reproches adressés par le patriarche Raï n’épargnent pas non plus le Hezbollah qui lie l’élection d’un président à tous ces titres.
 

Le ras-le-bol de Aoun
Les propos du patriarche auraient provoqué un ras-le-bol chez le général Michel Aoun et auraient occasionné une rupture entre Bkerké et Rabié, qui s’est manifestée par une violente réponse de la part du Courant patriotique libre à travers ses organes de presse. Le général Aoun ne serait plus disposé à contacter ou à visiter Bkerké. Malgré les efforts déployés pour cerner la crise, celle-ci est encore loin d’être résolue. Les clarifications apportées ultérieurement par le patriarche sur la distinction entre l’initiative et le nom proposé n’ont pas réussi à dissiper le différend entre les deux pôles chrétiens. Les uns ont vu dans les propos du prélat une clarification et d’autres, au contraire, y ont vu une confirmation de son appui à l’initiative de Saad Hariri.
Les visiteurs de Bkerké rapportent que le patriarche s’estime sur la même longueur d’onde que le Vatican, avec lequel il partage un souci majeur, celui de l’élection d’un président de la République. Raï, non seulement appuie l’initiative de Hariri concernant la candidature de Sleiman Frangié, mais manifeste aussi un grand enthousiasme à cet égard. Il estime que c’est une chance inestimable qui ne risque pas de se reproduire et qu’il ne faut pas rater tant qu’il n’existe pas une autre alternative. Le prélat considère que la candidature de Frangié a imposé une nouvelle réalité et a limité la présidence à Aoun et Frangié. Cette candidature a surtout consacré le fait que le prochain président sera impérativement issu des rangs du 8 mars. Frangié aurait alors plus de chances que Aoun. Tous les deux bénéficient de l’appui des chiites, mais le leader des Marada a réussi à obtenir celui des sunnites. Selon ses visiteurs, le patriarche n’a nullement l’intention de réunir les quatre présidentiables à Bkerké, car il est certain que leur réunion sera un échec total.

Joëlle Seif

Réunions séparées
Le patriarche Béchara Raï pourrait tenir des réunions séparées avec chacun des quatre pôles, en particulier avec Michel Aoun et Samir Geagea pour leur demander de sortir de la politique de refus et de présenter une alternative convaincante à la candidature de Sleiman Frangié. Sinon, il serait préférable de voter pour Frangié, avec l’accord de Aoun et Geagea, pour que la situation n’apparaisse pas comme si les musulmans imposaient le président. Pourtant, le cardinal Raï ne mise pas sur un accord entre les chrétiens, en particulier entre Aoun et Geagea. Ils s’accordent contre Frangié, mais ne s’entendent pas sur un même candidat. Malgré cela, Raï serait prêt à adopter n’importe quel accord qui aurait l’aval de Rabié et Maarab, que ce soit Aoun ou Frangié ou un troisième candidat qui ne fasse pas partie ni du 8 ni du 14 mars.

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