Magazine Le Mensuel

Nº 3035 du vendredi 8 janvier 2016

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The Revenant: Epique et poétique

Fort du succès, l’an dernier, de Birdman, le réalisateur mexicain Alejandro González Iñárritu revient, cette année, avec The Revenant, mettant à l’affiche Leonardo DiCaprio.
Un film épique et poétique.

 

Leonardo DiCaprio aura-t-il, cette année, enfin, un Oscar? Le film The Revenant, dont il tient la tête d’affiche, qu’il partage avec Tom Hardy, Domhnall Gleeson et Will Poulter notamment, permet de fonder cet espoir, de réaliser cette possibilité, devenue une anecdote au fil de ses nominations sans récompenses qui se sont succédé. Tout permet de le croire et la critique s’empresse déjà de souligner et d’encenser la performance de Leonardo DiCaprio jugée, à l’unanimité, comme l’un des points forts du film, qui lui, en revanche, divise.
The Revenant, signé Alejandro González Iñárritu, est une adaptation du roman de l’écrivain Michael Punke, The Revenant: a novel of revenge, qui s’inspire d’une histoire vraie, devenue presque une légende, celle du trappeur Hugh Glass qui, dans une Amérique profondément sauvage, en 1823, s’associe au capitaine Andrew Henry dans une expédition périlleuse afin de traquer des bêtes sauvages et de revendre les peaux. Quelques jours après le départ, il est attaqué par un ours. Gravement blessé, la gorge et l’abdomen dévastés par les coups de pattes de l’animal, il survit miraculeusement. Mais pour le reste de l’équipée, il est impossible de le ramener à la civilisation, en raison de la difficulté du terrain. Andrew Henry, peu téméraire et pressé de se sortir de cette situation et de poursuivre l’aventure, charge alors deux membres de l’équipe, John Fitzgerald et Jim Bridger, ainsi que Hawk, le fils de Glass, de veiller sur ce dernier. Entre accord, violence et manipulation, Glass est laissé pour mort. Mais la vie en veut autrement… Glass survit. Porté par un intense désir de vengeance, avec sa seule volonté pour unique arme, il doit affronter un environnement hostile, un hiver brutal et des tribus guerrières, dans une inexorable lutte pour sa survie.

 

Entre la nature et l’homme
Un scénario somme toute assez simple, même s’il est entouré de sous-intrigues, pour un film qui, selon Iñárritu, possède tous les éléments dans la tradition de Jack London. L’aventure, la nature sauvage et la nature humaine. Une approche cinématographique entièrement différente donc, notamment au point de vue esthétique, par rapport à son dernier film Birdman, l’un des plus grands succès de l’année dernière, et qui lui a permis d’obtenir notamment l’Oscar du meilleur film et celui du meilleur réalisateur.
Avec un budget estimé à plus de 135 millions de dollars, son long métrage le plus cher, et de loin par rapport à ses autres films, 21 grams, Babel, Biutiful et Birdman, Iñarritu a été jusqu’au bout de ses exigences artistiques. En premier lieu, tourner son film chronologiquement par souci de réalisme, et ne tourner qu’en lumière naturelle, c’est-à-dire à peine quelques heures par jour. Conséquence pratique: selon le calendrier de départ, le tournage aurait dû se terminer en 80 jours, mais il s’est étalé sur neuf mois, en extérieur, au Canada, parfois par moins 40 degrés. Le résultat est à couper le souffle devant la splendeur des séquences filmées qui prennent tout leur temps, sans jamais être statiques; des tableaux de chaque arrêt sur image. Panoramas, lumières, parfois les mots n’ont plus aucun sens; l’essentiel, et plus si nécessaire, peut être dit par l’image.
Une image signée Emmanuel Lubezki, le directeur de la photographie qui est fidèle au réalisateur mexicain et qui a fait ses preuves: il a remporté, durant deux ans d’affilée, l’Oscar de la meilleure photographie, en 2014 et 2015, respectivement pour Gravity et Birdman. D’ailleurs, la critique s’accorde également à saluer largement son travail. The Hollywood Reporter prévoit déjà une statuette, une troisième statuette, qui ferait entrer Lubezki dans l’histoire des Oscars comme le premier chef opérateur à recevoir trois prix de suite.
Réaliser un film épique et poétique, telle était l’intention d’Iñárritu. Epique sûrement, le but est atteint, tout le monde s’accorde à le dire. Poétique, il s’agirait plutôt d’une question de goût, la critique relevant  l’aspect violent, brutal, viscéral, voire gore, de son long métrage. Si certains critiques, notamment les professionnels du cinéma qui font partie de l’Académie des Oscars, qualifient The Revenant de chef-d’œuvre, d’autres seraient carrément sortis de la salle, ne pouvant aller jusqu’au bout du film. Là où la violence se fait à la fois œuvre de la nature et de l’homme, ce film selon Lubezki, est «une affirmation de la vie, une lutte pour la survie, dans chaque prise de vue». En tout cas, Iñárritu et DiCaprio s’accordent à dire qu’il s’agit du film le plus difficile qu’ils aient jamais eu à faire, DiCaprio, confiant être «sorti de rivières glacées», avoir «dormi dans des carcasses d’animaux» et avoir «régulièrement mangé du foie de bison cru». Au-delà de tout, The Revenant reste un des films à ne pas rater en cette année.

Nayla Rached

Circuit Empire – Grand Cinemas

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