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Nº 3037 du vendredi 22 janvier 2016

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Fingers Verities Senses. Quand la femme ploie et se déploie

A la galerie 392Rmeil393, Leila Sbaïti, Mayssa Abou Rahal et Shayma Aziz, trois artistes femmes, donnent à voir, jusqu’au 31 janvier, leurs œuvres, peintures et poteries. Fingers Verities Senses, et la femme se décline…

On pénètre dans la galerie comme on pénètrerait dans un labyrinthe à la recherche d’un manuscrit dont on ignore le contenu. Qui se révèle progressivement, lentement, à mesure que les œuvres s’inscrivent dans la mémoire, passent par l’affect, transitent par l’intellect. Trois artistes, trois artistes femmes, présentent quelques-unes de leurs œuvres dans une exposition collective intitulée Fingers Verities Senses. Leila Sbaïti, Mayssa Abou Rahal et Shayma Aziz, deux Libanaises et une Egyptienne. C’est un peu par hasard que les œuvres des trois artistes se sont retrouvées au cœur d’une exposition collective. Loin de l’intention d’une thématique commune, les œuvres présentent toutefois des convergences, notamment entre les poteries de Leila Sbaïti et les peintures de Shayma Aziz.
D’ailleurs, c’est avec ces dernières, accrochant le regard dès l’entrée, que s’élance l’exploration. Une exploration au féminin, forcément au féminin. L’artiste égyptienne s’attelle à décortiquer le corps de la femme dans une multitude d’états et de positions qui, tout en étant différents, se ressemblent pourtant et déploient une kyrielle de sensations, complexes, diversifiées. Flexibilité, souplesse, distorsion, violence, le corps féminin se cambre, se plie, se tord, s’accroupit, se relève. Des formes, presque des ombres, croquées de manière brute, tout en aplats empreints d’une diversité de nuances. Des formes, des ombres et une impression prenante d’une marionnette qui tente de se libérer des fils qui la tendent, qui la tendaient. Sanguine, Dance, Stretch, Tribal dance… Les toiles de Shayma Aziz pourraient facilement constituer une étude du corps de la femme. Autant de mouvements saisis au vif non dans une intention purement esthétique. Il ne s’agit nullement d’enjoliver ce qui est représenté, mais de restituer ce qui est flouté par la vision d’une société pétrie de machisme, de violence, de guerre où la femme, dans son corps, dans sa chair, est la première à payer le prix.

 

Le corps autrement
Ludiques et espiègles, les poteries de Leila Sbaïti s’amusent à détourner la vie. Des vases, des pots, des assiettes, des récipients, toujours contenant, à l’image de la femme, jamais filiforme, mais enrobés dans des distorsions jaillies au détour d’une manipulation des mains de l’artiste. Ambrées, arquées, arc-boutées, pleines ou étroites, en angles aigus ou en formes arrondies, nées de la terre, nées de la boue, les œuvres de Leila Sbaïti déploient à la fois leurs côtés pratique et esthétique. Loin des feux de la rampe, en toute discrétion et en toute puissance, depuis sept ans elle s’attelle à donner forme et consistance à la vie, à travers ses poteries, qu’elle expose pour la première fois au grand public. Et l’attroupement se condense; intrigué, le visiteur découvre dans chacune d’elles un élément de surprise, de détournement, d’originalité, loin de correspondre à des normes préétablies, elles surprennent. Tantôt par les bords d’une assiette plus larges et élagués que prévu, des formes exiguës et délicates pour une série de vases qui se déclinent en exemplaires jamais pareils, et, une des œuvres phares de l’exposition, ces trois vases aux formes féminines qui attirent d’un coup le regard. La femme dans la dualité de son existence, de ses sens, de son entité, de son mystère; une invitation au voyage.
Le voyage se poursuit à travers les peintures de Mayssa Abou Rahal. Artiste autodidacte, ses acryliques transmettent des états d’âme nés de situations immédiates, qui se déploient dans une minutieuse recherche sur la texture. Peace of mind, Walking away, Bleeding heart, Hope, Apart, Circle… La forme concentrique revient comme un leitmotiv dans ses œuvres, dans son apparence première, dans le mouvement des vagues, dans l’ondoiement du brouillard, l’ourlet d’un pont suspendu, la portée symbolique de chaque élément… Une impression de liberté qui cherche à empoigner le visiteur.

Leila Rihani
 

L’exposition se poursuit jusqu’au 31 janvier, à la galerie 392Rmeil393, de mardi à samedi de 11h à 19h, et le dimanche de 14h à 18h.

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