Le New York Times s’est procuré un rapport de 55 pages établi par la cellule antiterroriste mise en place quelques semaines après les attentats de Paris et remis au ministre français de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Dans un long article publié lundi 21 mars, on apprend surtout que la menace terroriste en Europe est loin d’être terminée, malgré la capture de Salah Abdeslam vendredi 18 mars. On y apprend que Abdel-Hamid Abaaoud, tué lors de l’assaut de Saint-Denis le 17 novembre 2015, avait voyagé jusqu’en Europe en se dissimulant parmi le flot de migrants, en compagnie de 90 candidats kamikazes. La majorité d’entre eux s’y trouveraient, encore aujourd’hui, éparpillés dans la nature et, sans doute, prêts à agir. Abaaoud aurait raconté à un proche avoir voyagé sur un bateau en Méditerranée avec 90 kamikazes en pleine crise des migrants. Il aurait choisi de poser ses valises en France car «les chances de réussite étaient plus grandes». Les papiers de ces jihadistes auraient, quant à eux, été confectionnés en Belgique. La vague de milliers de migrants qui a déferlé sur l’Europe apparaît comme une cache idéale pour des jihadistes qui souhaiteraient entrer sur le territoire.
Le rapport démontre aussi l’importance grandissante de Boubaker el-Hakim, auprès des jihadistes français et, plus largement, francophones. Celui qui a déclaré qu’il voulait «mettre la France à feu et à sang», aurait ainsi permis la professionnalisation des attentats et le changement de stratégie de Daech à l’extérieur, pour faire place à des attentats de plus en plus sanglants, en combinant plusieurs modes opératoires, allant de la fusillade à la prise d’otages, comme cela avait été le cas au Bataclan. Connu des services français, Boubaker el-Hakim, est surnommé «père des Français» au sein des réseaux jihadistes. Dans le magazine francophone de l’EI publié sur Internet, Dar al-Islam, Hakim déclare dans une interview: «Mon conseil est d’arrêter de viser des cibles symboliques. Frapper tout et tout le monde».
Le rapport apporte également des révélations sur les explosifs utilisés par les terroristes. A Paris, les explosifs auraient été fabriqués à partir de peroxyde, triacétone triperoxyde, mieux connus sous le terme de TATP, des composants faciles à trouver dans le commerce dans des produits courants. Le TATP serait désormais la marque de fabrique de Daech, qui entraînerait depuis 2013 ses combattants en partance pour l’Europe à l’utilisation et à la conception de ces explosifs.
Nº 3046 du vendredi 25 mars 2016
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