Alors qu’en France, les accidents de voitures font 54 morts pour un million d’habitants, au Liban, ce nombre est encore plus aberrant et atteint la barre des 226. Quelle politique publique la France adopte-t-elle? Quelles conclusions le Liban peut-il en tirer en matière de sécurité routière?
En 2015, la France comptait 3 461 morts par accidents de voitures et 35 000 blessés. «Il s’agit d’un bilan de guerre, ces accidents étant la première cause de morts violentes en France et de handicaps chez les jeunes», affirme Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière en France, dans une conférence à l’Université Saint-Joseph, le 13 juin 2016, sous le titre Cadre institutionnel et réglementaire de la sécurité routière en France. Bien que le nombre de morts ait baissé en France par rapport aux années précédentes, il n’en demeure pas moins qu’il reste une très forte marge d’efforts à faire pour améliorer les chiffres. Toutefois, cette légère chute du taux de mortalité demeure remarquable et elle est due à plusieurs facteurs, dont la désignation d’un délégué à la sécurité routière, rattaché au Premier ministre et dont la fonction consiste à promouvoir une politique interministérielle, la sécurité routière touchant nombre de domaines: à savoir les transports, la santé, le travail, la justice, l’intérieur, la recherche, l’éducation, etc. Ce délégué interministériel à la sécurité routière joue également le rôle de directeur au ministère du Transport, disposant ainsi de conseillers techniques et d’un observatoire interministériel de la sécurité routière. «A cette création du poste de délégué interministériel, s’est ajoutée celle de deux organismes supplémentaires au niveau national: le Conseil national de la sécurité routière, qualifié de parlement de la sécurité routière, ne disposant cependant pas de pouvoir normatif et le Comité interministériel de la sécurité routière», précise Barbe. C’est dans ce sens que le délégué en question a la charge de proposer les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs préétablis, organiser le travail du Conseil national de la sécurité routière et mettre en œuvre les décisions du Comité interministériel de la sécurité routière.
«Nous avons mis en place un triptyque sur le plan de la sécurité routière: les infrastructures, les véhicules et le comportement des conducteurs», indique Emmanuel Barbe. Au niveau de l’infrastructure, la France a fait en sorte que lorsque des routes sont en voie de construction, la sécurité routière soit au cœur même de la conception. Autre point important: la qualité et la cohérence de la signalisation. Il s’agit, en effet, de suivre partout dans le pays des modes de signalisation identiques pour que les conducteurs puissent s’approprier la manière selon laquelle ils doivent axer leurs comportements dans la conduite d’un véhicule. Plus encore, des règles de conduite en ville ont été déterminées et les vitesses précisées. Au niveau des véhicules, la France axe sa politique autour de deux points essentiels: essayer de faire la promotion des équipements de sécurité et instaurer le contrôle technique. Le comportement des conducteurs, n’étant pas à négliger, il s’agit de promouvoir la connaissance du phénomène de la violence routière, d’encourager l’éducation routière, de mettre la lumière sur les problèmes de conduite sous influence, sur la protection du conducteur et de renforcer, surtout, la communication en matière de sécurité routière.
Politique applicable au Liban?
«Il n’y pas de fatalité. Tout est question de volonté et de politique publique», certifie Emmanuel Barbe. Il estime que beaucoup de politiques publiques sont difficiles à appliquer aujourd’hui parce que dépendantes de beaucoup de facteurs externes à tel point que, souvent, les décideurs politiques ne peuvent plus trancher et, qu’au fond, ce qui gouverne le monde ce sont des règles qui viennent d’ailleurs. Cependant, en matière de sécurité routière, la situation se présente différemment parce que conditionnée par des facteurs internes. C’est ici l’expression de la volonté politique et collective qui agit et le Liban peut, certes, éviter tous les problèmes liés à la sécurité routière.
Natasha Metni