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Nº 3060 du vendredi 1er juillet 2016

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Iran vs Arabie saoudite. Regain de tension sur tous les fronts

Entre l’Iran et l’Arabie saoudite, tous les indices annoncent un regain de tension. Le fossé se creuse, la scène du conflit s’élargit et les foyers de friction se multiplient.

De nombreux indices montrent un regain de tension entre l’Arabie saoudite et l’Iran. Les plus importants sont les suivants:
L’échec de la conclusion d’un accord entre les deux pays au sujet de la saison du hajj. Résultat: les Iraniens boycotteront et n’iront pas en pèlerinage à La Mecque.
Si Téhéran accuse Riyad d’avoir refusé de lui fournir les garanties nécessaires pour la sécurité de ses citoyens, Riyad, pour sa part, insiste à dire que Téhéran est mal intentionné et veut politiser ce rituel religieux.
Le blocage des négociations politiques sur le Yémen. Alors que les rebelles houthis et leurs alliés considèrent qu’un consensus sur la présidence du pays est une priorité à inscrire au menu des négociations de paix parrainées par les Nations unies au Koweït, des sources pro-saoudiennes à Aden estiment que les Houthis ne reconnaissent aucun régime, et que ce sont des anarchistes dont le but est la déstabilisation. C’est ainsi qu’ils ont exploité la trêve pour réactiver plusieurs fronts. Ce qui prouve qu’ils n’ont aucune volonté de participer à de quelconques négociations visant à ramener la paix dans le pays.
La montée en flèche de l’intervention de l’Arabie en Syrie au double niveau militaire et financier, à l’ombre d’une synchronisation croissante avec la Turquie qui, elle aussi, a haussé le tempo de son ingérence en Syrie. Des sources russes évoquent une intervention turque directe, étayée par des preuves techniques militaires et de renseignements qu’elles ont montrés aux Américains. Ceux-ci, après s’être accordés avec l’administration russe sur une feuille de route pour un règlement politique, se sont rétractés, ajournant le projet jusqu’à l’avènement de la nouvelle Administration américaine, cela pour satisfaire leurs amis turcs et du Golfe. Quelque 1 500 soldats venus de Turquie ont ainsi participé aux batailles dans le rif sud d’Alep sous la bannière d’al-Nosra, c’est ce qui aurait contribué à l’ampleur des pertes enregistrées par le Hezbollah et l’armée syrienne.
La flambée du conflit sunnite-chiite en Irak avec l’opération militaire menée par le gouvernement de Bagdad soutenu par l’Iran à Fallouja. Sans compter l’exacerbation de la crise et l’approfondissement du fossé qui sépare le gouvernement de Haïdar el-Abadi de l’alliance des forces sunnites au Parlement, qui l’accusent de vouloir monopoliser la décision politique et renforcer l’influence de l’Iran en Irak, sous couvert de la lutte anti-Daech.
La crise à Bahreïn qui a dopé le bras de fer irano-saoudien dans le Golfe à la suite de deux événements majeurs: l’exécution du principal opposant chiite Nimr el-Nimr et le retrait de la citoyenneté bahreïnie du premier dignitaire chiite, l’ayatollah Issa Kassem. L’annonce américaine de la suspension des efforts pour la réconciliation à Bahreïn est venue renforcer les craintes de la reprise du conflit sur le terrain.
Chacun des deux camps mise sur le facteur temps et les changements régionaux pour consolider sa position. Alors que les Saoudiens estiment que le projet iranien régional est en perte de vitesse, Téhéran n’ayant pu enregistrer aucune victoire déterminante, ni en Irak, ni au Yémen où ses alliés houthis ont dû se replier… De plus, il a fallu que la Russie intervienne pour sauver Bachar el-Assad… sans oublier l’impasse dans laquelle se trouve le Hezbollah et les pertes humaines et politiques accumulées dans son milieu social à l’ombre de son encerclement politique, médiatique et financier.
Du côté iranien, la lecture des données est bien différente.
Téhéran pense que l’Arabie saoudite se débat avec ses problèmes, hantée par un sentiment de crainte face à la multiplication des dangers. Sentant que les Américains se rétractent en Syrie, les Saoudiens sont également inquiets des ententes irano-américaines sur la scène irakienne. Il est clair que le royaume ne peut pas mener la guerre en solo contre la République iranienne, alors que même les Emirats, qui ont retiré leurs troupes du sud Yémen, continuent de renforcer leurs liens commerciaux avec Téhéran. Par ailleurs, l’actuelle Administration américaine semble ne pas vouloir d’une victoire saoudienne politique ou militaire décisive. Washington exerce plutôt des pressions sur Riyad pour l’amener à poursuivre les négociations sur le Yémen au Koweït.

Chaouki Achkouti
 

Quid du Liban?
La tension saoudo-américaine pourrait entraîner, à «un moment donné», le royaume wahhabite à utiliser la scène libanaise pour faire pression sur l’Occident. Riyad souhaitant améliorer ses capacités de négociations dans d’autres dossiers. Et si Riyad décidait d’aller dans cette direction pour embarrasser les Américains qui resserrent l’étau autour de lui? Du point de vue des Iraniens, l’affaire ne se résume pas à assiéger le Hezbollah, elle est plutôt liée aux grandes et graves questions concernant l’avenir du Liban.

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