Magazine Le Mensuel

Nº 3062 du vendredi 15 juillet 2016

general

Electricité: déficit chronique de production

Les «on dit» circulent comme une traînée de poudre à Beyrouth, d’autant que l’affaire se rapporte à l’un des fleurons du secteur de l’hôtellerie de luxe, à savoir l’hôtel boutique Le Vendôme. De bouche à oreille, les Beyrouthins se sont perdus en supputations, faisant de ce dossier un indicateur clé de l’état des lieux de l’industrie hôtelière et touristique dans le pays. Or, cette affaire s’insère simplement dans le cadre de l’application des dispositions de la circulaire 135 de la Banque du Liban (BDL), portant sur la restructuration des dettes du secteur privé. Cette circulaire ne s’applique qu’à trois catégories de prêts bancaires qualifiés par la BDL de dettes à suivre et à régler; dettes partiellement recouvrables et dettes douteuses. La Société des grands hôtels du Liban (SGHL), propriétaire des hôtels Phoenicia et Le Vendôme, a souhaité profiter des effets de cette circulaire, optant pour une formule de dation en paiement avec un droit de préemption en sa faveur portant sur l’hôtel Le Vendôme, assortie d’une condition de rester aux commandes de l’établissement en collaboration avec l’enseigne InterContinental pendant deux ans avec un droit  de préemption au cours de cette période. Ainsi, une grande partie de la dette de l’hôtel Phoenicia se trouverait supprimée. C’est que la dation en paiement est une opération juridique qui consiste à se libérer d’une dette par une prestation ou un bien différent de celui qui était initialement. Un consortium de banques a été formé et s’est saisi du dossier de la SGHL. Ce consortium compte Bankmed et Bank Audi, le leader de celui-ci étant Bankmed du fait qu’elle détient la plus grande partie de la dette. Beaucoup de détails sont à peaufiner vu les exigences de la circulaire, qui enjoint entre autres à la SGHL de discuter rien qu’avec la banque leader. C’est que selon les dispositions de la circulaire 135, dans le cas d’un consortium de banques et d’institutions financières, afin que la restructuration du prêt soit approuvée, il faut l’accord des trois quarts des membres du consortium qui détiendraient au moins 60% de l’emprunt. Ces gestionnaires de la dette doivent nommer «un directeur», chargé d’établir un rapport financier de l’emprunteur. Le délai légal imparti pour le classement de l’affaire est de trois mois renouvelables une seule fois pour une période identique. Les créanciers qui n’auraient pas approuvé la restructuration ne sont pas tenus de respecter ses termes. La formule finale du rééchelonnement de la dette requiert l’accord de la BDL qui prend en considération le rapport de la Commission de contrôle bancaire.

La Société des grands hôtels du Liban s.a.l.
La SGHL a été formée en 1954 en vue de la réalisation du rêve de feu Najib Salha de construire un hôtel de classe mondiale sur les rives de la Méditerranée. L’architecte américain Edward Durell Stone a été chargé de la tâche. Le Phoenicia, surnommé «Grande Dame», a vu le jour en 1961. La deuxième tour de l’hôtel a été construite en 1967, alors que l’hôtel Le Vendôme était acquis en 1974 en tant qu’établissement sœur du Phoenicia. A la fin de la guerre, les deux hôtels ont été rénovés, Le Vendôme a été rouvert en 1996 et le Phoenicia en 2000.
Le conseil d’administration de la SGHL est formé comme suit: Mazen Salha, P.D.G.; Marwan Salha, directeur; Najib Salha, Faouzi Farah, Ramzi Akkari, Farouk Jabr, Me Sami Nahas (conseiller juridique), Me Charles Noujaim, Raymond Khalifé, Hamad el-Humaidi, Taraf Ayoubi et Beirut Hotel Investment Ltd., membres.

Production d’électricité
Le Liban est toujours à la case départ   

La production d’électricité est un vrai défi au Liban. Dès que la politique se mêle des affaires internes des établissements de service public, le processus de la recherche d’un règlement radical est ralenti, pour ne pas dire paralysé. A ceci s’ajoute, avec les années qui passent, l’aggravation de la crise de pénurie d’énergie vu la hausse de la demande en courant électrique en raison de la croissance démographique et l’industrialisation du pays. Depuis près d’un mois, Beyrouth, privilégiée en alimentation en courant électrique, est soumise à un rationnement d’une durée de six heures chaque vingt-quatre heures au lieu de trois heures. Ce statut d’exception est dû à la concentration, dans la capitale, des sièges des ministères, des établissements de service public, des ambassades et d’organisations internationales. Ce rationnement supplémentaire serait dû à la capacité limitée de transport du câble de Horsh-Aramoun de 220 kV, qui alimente en courant une partie du Beyrouth administratif. Les milieux du ministère de l’Energie ont souligné qu’il serait extrêmement difficile de trouver une source suppléante tant que la jonction du câble à haute tension de Mansourié ne serait pas installée. Cette démarche, rappelle-t-on, a été largement décriée par les habitants de la région qui ont évoqué des menaces d’ordre de sûreté publique. Ce qui mène à déduire que ce programme de rationnement serait répétitif chaque été. La deuxième raison est liée à la surcharge qui pèse sur les transformateurs 66/150 kV implantés dans les stations de Bsalim et Jamhour. Sachant que des efforts sont déployés pour réduire l’impact de ce problème en accélérant les travaux de construction de la station de transformation située à Achrafié et d’un transformateur à la station de Bsalim d’une puissance de 70 MW. Quant à la troisième raison, elle est due à la panne qui a touché le câble Jamhour-Basta de 150 kV. «Le recours aux générateurs d’électricité flottants n’est certainement pas la solution définitive au problème chronique de production d’énergie au Liban. Elle est provisoire en attendant que de nouvelles stations soient construites», souligne Ralph Fayçal, représentant de la société Karadeniz au Liban, qui fabrique les navires-générateurs. Sachant que la construction d’une centrale électrique nécessite une moyenne de quatre ans pour être opérationnelle. Ainsi, il recommande vivement de nouvelles centrales opérant sur le gaz dont la construction serait confiée au secteur privé ou à un partenariat entre les secteurs privé et public.
Le contrat liant le gouvernement à la société Karadeniz a été reconduit pour deux ans à partir du 1er octobre 2016. Cette prorogation n’a pas besoin d’approbation du Conseil des ministres puisqu’elle avait été mentionnée dans les dispositions du contrat initial signé il y a trois ans entre les deux parties. Ceci dit, Ralph Fayçal insiste sur le fait que le kW fourni par les navires-générateurs est de 11 cents (tout compris). Durant l’été, le Liban a besoin de 3 500 MW pendant les périodes de pic, tandis que l’offre est de 1 800 MW, sachant que les générateurs flottants fournissent près de 27% de l’offre. A l’ombre d’une indifférence totale de la part des responsables et d’un trou entre la demande et l’offre, il est clair que les Libanais devraient longtemps encore vivre les affres du rationnement.

Liliane Mokbel

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