Durant de nombreuses années, le quartier de Hazmié – notamment Mar Takla, et aujourd’hui New Mar Takla – apparaissait comme une bonne alternative pour se loger non loin de Beyrouth à des prix abordables. Est-ce toujours le cas? Comment évolue ce quartier? Y investir est-il avantageux? Enquête.
Mar Takla, Mar Roukoz et, aujourd’hui, New Mar Takla. Cela fait de nombreuses années déjà que le quartier de Hazmié est en vogue et ne cesse de s’étendre, les constructeurs n’hésitant plus à investir jusqu’à dans la vallée pour créer de nouveaux projets.
Au départ, la zone a séduit par son emplacement stratégique, à deux pas de Beyrouth, ses écoles et ses nombreux commerces. Les acquéreurs pouvaient aussi bénéficier d’une vue imprenable sur la capitale et d’un espace relativement vert; le tout à un prix raisonnable. Est-ce toujours le cas aujourd’hui?
«Mar Takla a, de tout temps, constitué le cœur de la demande à Hazmié, explique Walid Moussa, président de la Real (Real Estate Association of Lebanon). On y trouve de beaux biens, une vie de quartier, un environnement assez joli, mais presque plus de terrains aujourd’hui. Le prix du mètre carré y avoisine les 3 000 dollars, soit pratiquement les mêmes tarifs que dans certains quartiers d’Achrafié. Mar Takla, c’est d’ailleurs un peu «le Sioufi d’Achrafié».
Face au développement fulgurant de Mar Takla, les promoteurs ont commencé à construire un peu plus loin, notamment du côté de New Mar Takla, où se concentrent la plupart des nouveaux projets.
Chadi Saroufim est architecte et l’un des promoteurs du projet Elev 8, à New Mar Takla. Il a lancé le chantier, en 2010, pour un investissement initial de 3 millions de dollars avec huit partenaires.
Lui aussi a vu en New Mar Takla une zone pouvant séduire un large public. «L’inauguration de la nouvelle autoroute de Damas permet un accès facile à la capitale, explique-t-il. Hazmié peut aussi séduire des personnes qui viennent de la Békaa, tout comme des Beyrouthins qui souhaitent se loger à prix plus réduits, tout en restant à proximité de la capitale. Hazmié est donc le pari d’un large public».
Quid de l’infrastructure?
Le projet immobilier de Chadi Saroufim comprend vingt biens, dont deux duplex et dix-huit appartements. Seuls quatorze de ses appartements sont aujourd’hui vendus. Il faut dire qu’à l’époque, la demande se concentrait encore sur des biens à un demi-million de dollars pour de grands logements. Actuellement, avec le ralentissement de l’activité, le budget des ménages a été divisé par deux et la demande se porte plutôt sur des biens plus petits.
«Nous avons commencé à commercialiser les premiers appartements, en 2011, à 2 050 dollars le mètre carré, explique le promoteur. Maintenant, nous les vendons à 2 400 dollars le mètre carré pour des surfaces de 200 à 220 m2».
Pour l’homme d’affaires, il est hors de question de «bazarder» ses biens, malgré le ralentissement du marché. «Nos appartements sont un peu grands pour la demande actuelle. Mais comme nous n’avons pas fait appel aux banques pour ce projet, nous préférons donc attendre une reprise du marché, plutôt que de trop baisser nos prix, comme certains peuvent le faire avec des remises à 30%».
Des projets comme Platinum, dans la même région, qui comprennent de plus petits appartements vendus entre 200 000 et 300 000 dollars, ne sont pas restés très longtemps sur le marché.
Un constat qui ne ravit pas M. Saroufim. «La multiplication de projets plus petits, comme celui de Platinum qui a rapidement tout écoulé, peut, à long terme, changer le visage de Hazmié qui était un quartier tranquille. Car, forcément, de plus petites surfaces signifie un nombre plus important de biens sur le marché et donc plus de monde, plus de places de parking, comme le prévoit la nouvelle loi qui impose une place pour les invités pour chaque appartement et, donc, davantage d’embouteillages… Or, en matière d’infrastructures, le quartier de Hazmié souffre d’un développement trop rapide et soudain, explique le promoteur. Les services publics n’ayant pas prévu ce développement si brusque, le quartier est mal approvisionné en électricité, de même pour les lignes téléphoniques, sans parler des routes, comme le pont des Arcades qui, fermé durant l’hiver, provoque souvent des embouteillages monstres. Aujourd’hui, même New Mar Takla arrive presque à saturation».
Selon le promoteur, si, autrefois, investir à Hazmié pouvait constituer un bon plan, aujourd’hui, vu que les prix des terrains n’ont pas baissé, cela signifie devoir vendre des appartements à 2 700 $ le mètre carré à New Mar Takla, pour rentrer dans les frais, et la demande ne pourrait pas suivre.
Pour le moment, il est difficile de convaincre les investisseurs à développer des projets dans ce quartier et, en réalité, partout au Liban. «Mais on ne sait jamais, ajoute le promoteur; un simple accord trouvé en Syrie pourrait bien changer la donne et faire repartir les prix à la hausse».
Soraya Hamdan