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Paul Khalifeh

Les privilèges, la plaie invisible de l’état

L'enquête, publiée dans cette édition de Magazine, sur le financement public des communautés religieuses et les exemptions fiscales et autres facilités dont elles bénéficient, lève le voile sur un domaine peu connu des Libanais. Elle révèle une infime partie du régime des privilèges accordés par l’Etat à de nombreux secteurs, catégories socioprofessionnelles ou, parfois, à des individus. Ces avantages alourdissent le budget de l’Etat et, surtout, génèrent un manque à gagner qu’il est difficile de chiffrer exactement mais qui s’élève, sans doute, à des dizaines, voire des centaines de millions de dollars. Telle est la triste histoire de l’Etat libanais, traité comme une vache laitière par ceux-là mêmes qui sont supposés protéger ses droits et gérer son patrimoine. Entre les privilèges financiers et fiscaux, la mauvaise gestion des biens domaniaux, le gaspillage des deniers publics, le détournement de fonds, les délits d’initiés, l’Etat n’est plus qu’un corps inerte, maltraité par une classe politique parasitaire.
Face à cette réalité, on imagine que le redressement du Liban est une tâche titanesque, sinon impossible, tant que l’Etat est phagocyté par des hommes politiques corrompus, agissant comme des sangsues, qui pompent l’énergie de leur victime en prenant soin de la maintenir en vie.
Pour que se perpétue le pillage des ressources de l’Etat, la classe politique a installé de multiples verrous, visibles ou dissimulés. Leur fonction est d’empêcher un véritable changement, pendant qu’elle se régénère. Ce cercle vicieux peut durer une éternité, si les Libanais n’en prennent pas conscience et décident de le briser.
L’adoption d’une loi électorale assurant une représentation authentique des forces vives de la société est le meilleur moyen pour se débarrasser de cette classe politique et élire des députés méritants et compétents. L’inertie des Libanais et leur désintérêt contribuent à maintenir le système actuel en place. Il est de la responsabilité de chacun de faire pression sur les politiciens, afin qu’ils présentent des concessions au niveau de la loi électorale. L’ouverture d’une brèche dans le mur du système permettra, avec beaucoup de patience et de détermination, d’aboutir à un réel changement.
En attendant ce jour, de nombreuses initiatives peuvent être prises pour faire reculer, progressivement, le niveau de corruption et juguler le gaspillage. L’informatisation à outrance des différentes administrations
en fait partie.

Paul Khalifeh

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