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Nº 3083 du vendredi 3 novembre 2017

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Françoise Nyssen, ministre française de la Culture: Un pont culturel privilégié entre la France et le Liban

Troisième manifestation la plus importante après celles de Paris et Montréal, Beyrouth accueille du 4 au 12 novembre la 24e édition du Salon du livre francophone. Il sera inauguré par Françoise Nyssen, ministre française de la Culture. Entretien.
 

Vous vous rendez au 24e Salon du livre de Beyrouth qui rend hommage cette année à Samir Frangié. C’est une première pour vous en tant que ministre de la Culture… Quel est votre état d’esprit?
Je m’y rends en tant que ministre chargée de la politique du livre, en soutien à nos auteurs et éditeurs français à l’international, mais également avec une ambition pour la francophonie. Cette dernière est une chance pour la France, elle pourrait être davantage animée et nous travaillons en ce sens. J’ai la conviction que l’amitié franco-libanaise pourrait jouer un rôle moteur dans cette aire linguistique.

 

En tant qu’ancienne éditrice, être ministre change-t-il votre regard sur le livre?
Je soutiens aujourd’hui ce secteur avec une grande détermination, non parce que je suis une ancienne éditrice, mais parce qu’il est l’une des grandes composantes de la vie culturelle de notre pays. Je soutiens d’abord ceux qui sont à sa racine: les écrivains, en défendant le droit d’auteur. En assurant le bon respect de la loi Lang sur le prix unique du livre, je soutiens aussi les éditeurs et les libraires.
Et je porte une politique pour le développement de la lecture, avec mon collègue du ministère de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer.

 

En quoi le Liban est-il une étape importante?
Le Liban fait partie des pays avec lesquels la France a développé des ponts culturels privilégiés, notamment sur le plan littéraire. Le Salon du livre de Beyrouth en est une illustration. Nous sommes très attachés à les entretenir, et à les nourrir. La culture en France est façonnée par cette ouverture aux autres cultures, aux autres langues, aux femmes et aux hommes nés ailleurs.

 

 

 

 

 

 

«L’amitié franco-libanaise pourrait jouer un rôle moteur dans cette aire linguistique, qu’est la francophonie»

 

 

 

 

 

Quel regard portez-vous sur la littérature libanaise et avez-vous des auteurs que vous appréciez particulièrement?
Je pourrais citer Salah Stétié, Wajdi Mouawad ou Amin Maalouf, mais il y en aurait tant d’autres à évoquer… La littérature libanaise est d’une extraordinaire richesse et d’une très grande diversité. Les liens avec la France sont déjà denses, beaucoup d’auteurs libanais, comme les trois que je viens de citer, y ayant des attaches particulières, et beaucoup d’auteurs français ayant, à l’inverse, développé une fascination pour le Liban. Mais je souhaite renforcer encore les échanges, et l’accès du public français à la littérature libanaise.

Vous avez placé la jeunesse au cœur de vos priorités. Quel message souhaiteriez-vous adresser à la jeunesse libanaise francophone?
Comme à la jeunesse de France, je rappellerais d’abord à la jeunesse du Liban que la vie culturelle de son pays lui appartient : poussez les portes des lieux culturels, écrivez, chantez, lisez, c’est vous qui donnez sens à la culture dont vous avez hérité, et qui façonnez celle de demain. Je voudrais ensuite dire aux jeunes Libanais francophones que la France est déterminée à faire de cette langue que nous partageons un vecteur d’échanges et de liens privilégié pour ce XXIème siècle.

Comment faire pour promouvoir davantage la francophonie?
La promotion de la francophonie passe par le rayonnement de la langue française dans le monde entier, auquel le ministère de la Culture s’emploie – aux côtés du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères – à travers le développement de son enseignement, des traductions, et de l’organisation de diverses manifestations culturelles qui mettent en valeur les créations francophones. Nous souhaitons amplifier ces actions, et aller plus loin. Comme l’a annoncé Emmanuel Macron à l’occasion de la foire du livre de Francfort, des initiatives pour la francophonie seront présentées en 2018.

Vous vous définissez comme une ministre des «travaux pratiques», qu’entendez-vous par là?
Une ambition culturelle ne se paye pas de mots : elle passe par des projets très concrets, qui répondent à des problématiques de terrain, et qui transforment le quotidien de nos concitoyens. Je pense par exemple au projet que nous portons pour les bibliothèques : elles sont le premier lieu culturel de proximité en France, avec une densité identique à celle des bureaux de poste, mais elles sont ouvertes à des heures auxquelles beaucoup de nos concitoyens travaillent. Nous avons donc entamé un travail avec les collectivités territoriales pour adapter ces horaires, en ouvrant par exemple davantage le weekend et en soirée. Je parle de « travaux pratiques » car je crois, à partir d’impulsions données au niveau national, au savoir-faire et au pouvoir de faire des acteurs du terrain.
 
Quels chantiers sont à venir?
Ma politique culturelle vise à redonner de la liberté à celles et ceux qui souffrent d’une forme d’exclusion ou d’un sentiment d’exclusion aujourd’hui en France. Cette exclusion se combat dès le plus jeune âge, c’est pourquoi l’un de mes chantiers prioritaires est la généralisation de la pratique artistique à l’école. Nous avons aussi lancé les travaux sur le Pass Culture de 500€ destiné à accompagner les jeunes dans l’entrée dans la majorité par l’accès à des biens et des sorties culturels et des cours de pratique artistique. Parmi les projets phares, nous travaillons aussi à une stratégie de revitalisation patrimoniale, notamment dans les zones rurales et les villes qui se dépeuplent. Et je suis très engagée, au niveau européen, pour défendre notre modèle et porter des projets fédérateurs. Tous ces chantiers suivent une ambition : contribuer par la culture à la construction d’une société toujours plus émancipatrice, plus juste, plus tolérante.

Jenny Saleh

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