Magazine Le Mensuel

Nº 3088 du vendredi 6 avril 2018

Film general

Michel Ocelot. Le conte pour parler de tout

Convié par l’Institut français du Liban, Michel Ocelot revient pour présenter des séquences de son prochain film d’animation, Dilili à Paris, au cinéma Montaigne. Il sera aussi l’invité d’honneur de My Youth Film Festival, organisé par Metropolis.

Comment vous est venu Dilili à Paris?
Je m’applique à explorer tous les aspects passionnants de la planète. La France est un de ces endroits, en particulier Paris. Et comme j’y habite, la célébration était particulièrement facile. Parallèlement à une civilisation intéressante, créatrice et prenant en compte hommes et femmes ensemble, j’ai montré l’inverse: les hommes se tenant mal avec femmes et filles, phénomène grave et mondial.

Vous avez passé votre enfance à Conakry avant de vous installer à Angers, y-a-t-il un peu de vous dans cette petite fille?
Bien sûr! Il est rare qu’un héros ne soit pas une variation sur l’auteur lui-même —un héros ou plusieurs en même temps. Je suis aussi Orel, le grand garçon livreur en tricycle.

Pourquoi avoir choisi la Belle époque comme cadre temporel à votre récit?
Pour une raison assez frivole, les dernières robes longues en Occident, c’est si beau. En étudiant l’époque, j’ai constaté qu’on buttait dans un grand personnage à tous les coins de rue, Picasso, Marie Curie, Proust, Eiffel, Toulouse-Lautrec, Rodin, Renoir, Zola, Isadora Duncan, les frères Lumière…

Comment envisagez-vous les nouvelles techniques de réalisation dans l’animation?
J’y suis plutôt à l’aise, même si parfois je les maudis, comme toutes les techniques par lesquelles je suis passé… La 3D informatique est lourde, nécessite trop de corps de métiers différents. Elle fait regretter la simplicité et le bricolage du papier découpé. Mais elle permet bien des perfectionnements impossibles en dessin animé traditionnel.

Qu’est-ce qui vous attire dans l’univers du conte et de l’enfance?
Je ne cherche pas particulièrement l’enfance, c’est une étiquette qu’on me met. J’ai trouvé mon langage avec le conte, j’y tiens et je continue. Le conte répond à mes deux désirs. D’un côté je veux faire du beau, de l’agréable. Avec le conte, c’est facile. D’un autre côté, je veux traiter tous les sujets. Avec le conte, tout est possible et net. On va droit où il faut aller, sans se prendre les pieds dans les câbles de la vraisemblance qui n’a rien à voir avec le message voulu. Dans la forme «contes», je suis comme un poisson dans l’eau.

Quel souvenir gardez-vous de vos deux derniers voyages au Liban?
Je me suis senti rempli à ras-bord d’impressions. La beauté des lieux et des paysages, les délices de la cuisine… Une fascination pour un pays à à la complexité exceptionnelle. De l’admiration et aussi de l’embarras à la vision, la première fois, de traces terribles de l’interminable guerre civile. J’ai été séduit pas les gens, par leur aisance dans les langues. Je me souviens avoir rencontré une jeunesse séduisante au possible. Cette fois, je vais me laisser aller et goûter tranquillement tout ce qui s’offre à moi.

Philippine de Clermont-Tonnerre

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