Nous les payons régulièrement. Machinalement. Ces taxes municipales dont nous ignorons tout, mais auxquelles même l’Etat est soumis. Economiste, Roger Melki nous dévoile tout sur ce sujet.
Pour couvrir leurs dépenses, les municipalités ont besoin de ressources. On distingue ainsi:
● les taxes perçues directement par la municipalité
● les taxes perçues par l’Etat, par les offices autonomes, par les établissements publics, ou par les services gouvernementaux pour le compte de la municipalité
● les taxes perçues par l’Etat pour le compte de l’ensemble des municipalités, et déposées dans la caisse municipale autonome.
S’y ajoutent les diverses ressources extraordinaires comme les dons, les emprunts, les amendes, les recettes des années antérieures, les soldes reportés, les subventions, etc.
Le président du Conseil municipal peut décider seul des dépenses dont les sommes s’élèvent jusqu’à 3 millions de L.L. Celles qui atteignent les 20 millions de L.L. ont besoin de l’aval du conseil municipal. Entre 20 millions et 80 millions de L.L., il faut obtenir le feu vert du Qaemaqam. Au-delà de 80 millions, la signature du Mohafez est requise.
Taxes directes
La première partie de la loi sur les taxes municipales n° 88/60 du 18 août 1988 énumère les taxes perçues par la municipalité. Sont véritablement substantielles la taxe sur la valeur locative (habitation et commerce) et la taxe sur les permis de construire. La première est collectée sur toutes les unités d’habitation ou de commerce, lorsqu’il y un contrat de location. Le montant dépend de la valeur du bien et de l’estimation de la valeur locative.Sur cette valeur, la municipalité retient 6,5% lorsqu’il s’agit d’un logement. Par contre, pour les unités commerciales, la municipalité prélève 8,5%. Pour les grandes municipalités ceci constitue un revenu consistant, s’élevant à des dizaines de millions de livres libanaises. Les permis de construire sont également générateurs de ressources. Le montant des taxes dépend de la valeur des terrains, des biens immobiliers et des régions. Il est donc minime lorsque l’immeuble est situé dans un village encore «vierge».
Autres ressources
L’Etat et les établissements publics participent aussi au financement des municipalités. Ceci est régi par la deuxième partie de la loi sur les taxes municipales n° 88/60 du 18 août 1988. Ainsi, cette loi fixe-t-elle une surtaxe de 3 % sur les plus-values immobilières et une autre de 10% sur les abonnements et communications téléphoniques fixes. La Caisse des municipalités est également alimentée par des taxes collectées par le gouvernement pour le compte des municipalités: téléphones mobiles, importations, douanes, etc. Toutefois, la distribution de ces taxes aux mairies ne se fait pas de manière équitable. Tout dépendrait – en principe – du revenu de chacune d’entre elles. Les municipalités n’ont donc pas la maîtrise de l’argent collecté, ni le moyen de savoir quelle somme leur est due par les services publics, ni le pouvoir d’obliger ces services à leur transférer les sommes dues.
Au Liban, la Caisse Autonome des Municipalités (CAM) est chargée de la distribution des fonds collectés par le gouvernement central aux municipalités. Les revenus de cette caisse se composent des surtaxes et taxes suivantes :
● Surtaxe progressive de 10% sur l’immobilier.
● Surtaxe de 15% sur les profits des entreprises commerciales, industrielles et non commerciales.
● Surtaxe de 10% sur les dons et les droits de succession.
● Surtaxe de 5% sur l’enregistrement des propriétés immobilières.
● Taxe sur le port de 3,5%.
● Taxe de 6% sur les assurances, excepté l’assurance vie.
● Surtaxe de 25% due à l’enregistrement des voitures et des motocycles.
● Surtaxe de 1,5% sur des centaines de marchandises importées comme la bière, le vin, d’autres boissons alcooliques, la viande, le poisson, les eaux gazeuses, etc.
● Surtaxe de 10% collectée par le ministère des Postes et des télécommunications.
● Surtaxe de 10% sur la consommation d’électricité, collectée par l’EDL. Depuis 30 ans, comme l’explique M. Melki, les municipalités et l’EDL procèdent par compensation. Les premières s’abstiennent de payer leurs factures d’électricité. En contrepartie, l’EDL «s’engage» à ne pas leur verser cette surtaxe de 10%.
● Surtaxe de 10% sur la consommation d’eau.
● Surtaxe de 5% sur les cigarettes et les tabacs.
Notifications
Nous sommes notifiés annuellement et de manière officielle via le Journal officiel, mais aussi à travers deux journaux locaux en plus de l’avertissement par radio ou par télévision. C’est donc à partir de cette date de publication que nous sommes considérés comme étant «officiellement» notifiés. Le délai pour l’opposition s’étend sur deux mois à partir de la date de publication officielle. Dans le cas des notifications (dans le cadre de cas bien spécifiques), le droit d’opposition est valable pour un mois. Lorsqu’une opposition est présentée, la municipalité étudie le cas. Si elle juge que le demandeur a raison, un bordereau dégressif est annoncé pour annuler le taux de l’impôt sur lequel le demandeur s’est opposé. Dans le cas contraire, elle est en mesure de refuser la demande et l’envoie, par conséquent, à une commission d’opposition présidée par un magistrat. Si celle-ci la rejette, le demandeur peut attaquer la décision au Conseil d’Etat dans un délai d’un mois à partir de la date du refus de l’opposition de la commission.
Les exonérations? Sont exonérés les immeubles voués à la construction de cultes religieux, les immeubles occupés par des missions diplomatiques sous réserve de réciprocité, les immeubles occupés par les Nations unies et les immeubles occupés par les institutions à but non lucratif (certaines universités ayant plus de 100 ans de présence, certaines ONG, etc.). Les familles ayant un enfant à besoins spéciaux ne paient pas de taxe municipale.
Natasha Metni Torbey