Peu connu, le cancer de l’œil menait, jusqu’aux années 1990 à une énucléation (retrait de l’œil), voire à la mort du patient. Aujourd’hui, de nouveaux traitements permettent d’éviter ces deux issues dramatiques.
Comme tout organe, l’œil est formé de plusieurs couches. Il est, par conséquent, susceptible d’être rongé par le cancer. «Techniquement, n’importe quel tissu du corps humain peut être touché par le cancer. L’œil n’est pas une exception. Toutefois, cette maladie demeure très rare, raison pour laquelle peu de personnes en ont entendu parler», explique le Dr Hassan Abdel Aziz, oncologue spécialiste de la rétine venu au Liban pour tenter d’instaurer le premier centre de traitement du cancer de l’œil au Moyen-Orient. Pour comprendre comment la maladie parvient à l’œil, il suffit d’en étudier l’anatomie. L’œil est, en effet, formé d’un globe oculaire qui englobe la cornée (un tissu transparent) et la sclère, ou sclérotique, qui constitue le «blanc» de l’œil. Habituellement, ces deux composantes ne se régénèrent pas et ont donc peu de risques d’être sujettes à un cancer. Recouvrant la partie antérieure de la sclérotique et produisant un mucus lubrifiant, la conjonctive est une muqueuse transparente et très fine. Une très grande exposition au soleil entraîne impérativement une conjonctivite (inflammation de la conjonctive) qui, si elle est mal traitée ou négligée, peut provoquer un cancer de l’œil. Dans ce dernier cas, le traitement consiste en des gouttes anti-cancer, chimiothérapeutiques. Toutefois, ces gouttes oculaires peuvent être toxiques, bien qu’il s’agisse du seul traitement du cancer de l’œil, avec la chirurgie. «Fort heureusement, les symptômes apparaissent directement et sont généralement visibles à l’œil nu, affirme le Dr Abdel Aziz. Nous pouvons ainsi constater un changement de la couleur, de la forme, l’apparition d’un nouvel «élément» intrusif, etc.»
DIFFÉRENTS TYPES DE CANCER
Hormis l’atteinte cancéreuse de la partie externe de l’œil, le spécialiste indique que cette pathologie peut aussi attaquer la partie intérieure de l’œil. Dans ce cas, il y a deux types d’atteintes. Le cancer qui commence primitivement dans un organe déterminé et qui se propage pour atteindre l’œil; et celui qui commence primitivement dans l’œil et se métastase ensuite à d’autres parties ou organes du corps. Dans le premier cas, le plus répandu, il faut traiter la tumeur primitive sur la partie du corps concernée. Chez les hommes, ce sont surtout les poumons qui sont touchés, alors que chez les femmes, c’est le cancer du sein qui voit la maladie se propager à l’œil.
Dans le deuxième cas, quand la tumeur primitive est dans l’œil, puis migre dans dans d’autres parties du corps, il est utile de faire la distinction entre les enfants et les adultes.
Pour détecter un rétinoblastome chez les enfants, la prise de photos joue un rôle important. Etant donné qu’il s’agit d’un cancer qualifié de blanc et que le «flash» de l’appareil photo reflète l’intérieur de l’œil, cela permet de constater que l’enfant pris en photo a un œil de couleur blanche. «Il ne faut surtout pas s’affoler dès la première observation. Il peut s’agir d’un simple mouvement de l’œil qui lors de la prise de photo a fait en sorte que ce soit le nerf optique qui a été reflété par le flash», souligne le Dr Abdel Aziz. Dans les années 80-90, les enfants mourraient d’un rétinoblastome qui se propageait pour attaquer le cerveau. Aujourd’hui, dans 100% des cas, le patient survit, avec un traitement qui n’est pas sans risque, surtout lorsque le rétinoblastome grandit dans le nerf optique ou dans la partie centrale «responsable» de la vision.
Chez l’adulte, le mélanome uvéal consiste en une tumeur qui apparaît dans la partie interne de l’œil. Il est, lui, détecté lors d’un examen médical régulier, souvent par hasard. Une fois repéré, une échographie oculaire par ultrasons (A-scan et B-scan) est effectuée. Le traitement se fait par radiation, après ouverture de l’œil. Il détruit la tumeur, la réduisant au maximum, ce qui permet au médecin de la retirer et de coudre l’œil.
Qu’il s’agisse d’un cancer touchant la partie interne ou externe de l’œil, il est bon de savoir que la médecine a franchi des pas de géant quant aux modalités de traitement. Le Liban pourrait bientôt jouer un rôle crucial à ce niveau, avec l’éventuelle ouverture du premier centre de traitement du cancer de l’œil au Moyen-Orient, qui devrait être installé au Clemenceau Medical Center (CMC).
Natasha Metni Torbey