Il est le premier centre de traitement des addictions à offrir des consultations externes. Depuis 2003, Skoun accueille et offre un soutien aux personnes souffrant d’addiction à l’alcool et aux drogues. Trois piliers: traitement, prévention et législation.
Dans ce discret appartement situé au 4ème étage d’un immeuble de la rue Badaro, sont reçus des toxicomanes qui viennent chercher des soins et du réconfort auprès de l’équipe clinique. Dans ce centre, comme dans celui de l’hôpital Rafic Hariri, à Jnah, inauguré en 2017, «ils viennent suivre leurs sessions avec les psychiatres, psychologues et conseillers. Ils font leurs tests avec les infirmiers puis ils repartent», explique Tatyana Sleiman, responsable du développement et de la collecte de fonds. C’est là tout le concept de Skoun: recevoir des patients en consultation externe pour leur permettre de garder un rythme de vie normal. Tous les soins sont gratuits, seul le test d’urine est payant. «En principe, le patient vient ici et nous procédons à une première évaluation réalisée par le psychiatre et la thérapeute, pour voir quel est le traitement adapté. Cela dépend de la drogue consommée, de la durée et comment. C’est du cas par cas, il n’existe pas un seul traitement type». Autre département chez Skoun, la prévention. En 2018, l’association a mené ses campagnes de sensibilisation dans 115 établissements scolaires et universitaires, auprès de 13 342 étudiants «afin de leur donner les bonnes informations sur comment agir quand ils sont confrontés à des situations où la drogue n’est pas loin, et leur donner des outils pour s’en prémunir».
Législation. C’est le cheval de bataille de Skoun. Décriminaliser l’usage de drogues et éviter la case prison puisqu’au Liban, il s’agit d’un acte criminel passible de 3 mois à 3 ans d’emprisonnement. En 1998, une loi sur les drogues, en criminalisant l’usage, établit aussi le «traitement comme alternative aux poursuites judiciaires». Une loi jamais concrétisée avant 2013, date de la création du «Comité de l’addiction aux drogues» sous la tutelle du ministère de la Justice. Un travail de longue haleine qui aura donc duré 7 ans initié et conduit par l’association. «Nous espérons aller vers la décriminalisation de l’usage de drogues par le biais d’un amendement. Les consommateurs ne seront plus arrêtés et détenus mais directement transférés vers un centre de traitement».
Récemment, Skoun a reçu un fond de l’Agence française de développement (AFD), en partenariat avec l’association Médecins du Monde (MDM) pour la construction de deux cliniques supplémentaires à Baalbeck et à Tripoli où les besoins sont immenses. «Il y a un grand besoin en dehors de Beyrouth. Ce sont des villes très exposées. Beaucoup de jeunes font face à un taux très élevé de pauvreté et de chômage, ce qui facilite la toxicomanie. Il n’y a pas de prévention, pas d’éducation sur le sujet et pas de centres disponibles, donc le problème augmente. Tripoli nous a donc semblé prioritaire et on a vu que Baalbeck était tout aussi problématique». MDM et Skoun y travailleront ensemble, avec une ouverture respective avant fin 2019 et début 2020.
Marguerite Silve