Pour déjeuner sur le pouce ou bien pour s’attarder autour d’une bonne tablée, faire appel à un cuisinier professionnel est la nouvelle tendance qui réinterprète la tradition de la «cuisinière de famille».
Aller au restaurant est une pratique courante dans notre société contemporaine. Une habitude interrogée sans cesse par des concepts voulant réinterpréter d’une nouvelle manière ces moments parfois négligés par manque de temps que sont les repas. Parmi eux, celui des chefs à domicile. L’idée est simple: faire appel à un professionnel pour concocter un beau menu directement dans nos cuisines, de l’entrée au dessert, ou seulement l’un des trois, car, comme au restaurant, c’est à la carte. Un menu pensé avec le chef lui-même, selon ses spécialités et son expertise culinaire, disponible selon nos envies et si nos équipements permettent de les mettre en œuvre. Si d’emblée, on imagine ce service à domicile comme un luxe destiné à des événements particuliers, il se prête pourtant très bien à toute occasion et… non-occasion. De quoi rendre moins moroses nos déjeuners hebdomadaires, et plus conviviaux nos dîners familiaux ou amicaux. Que ce soit par manque de temps, d’appétences ou de compétences pour la cuisine, la gastronomie reste un sport dans lequel nous ne sommes définitivement pas tous égaux. Michèle Diab et Léa Freiha font partie de ces passionnés qui ont mis leur talent et leur potentiel au service de la gastronomie à domicile.
Cuisine et voyage
Après une première vie professionnelle dans le monde de la finance, Michèle Diab décide d’enfiler sa toque pour se consacrer à la cuisine. Passée par les grandes écoles françaises de gastronomie – Ducasse, Ritz Escoffier et Lenôtre – elle fait ses armes auprès des meilleurs ouvriers de France et obtient un CAP, puis se forme à l’œnologie auprès du sommelier Olivier Pousset. Les fondamentaux, Michèle les forge aux côtés du chef Michel Guérard, qui l’initie aux liens de la nutrition avec la santé, notamment pour ceux souffrant de pathologies particulières ou d’intolérances alimentaires. Cette soif d’apprendre la projette rapidement aux fourneaux de ses amis, pour faire de la cuisine à domicile son métier. Aujourd’hui, cette «chef traveller», est parvenue à lier ses deux amours que sont le voyage et la gastronomie. Un service qu’elle propose aux quatre coins du monde, lui permettant de nourrir son art de ses rencontres. Une cuisine saine, constituée de la richesse du marché de quartier et inspirée de ses origines méditerranéennes, pour concevoir des plats et des desserts savoureux dont la maîtrise et la simplicité font à son sens, la beauté. Même si elle propose ses services à l’étranger, en France notamment, Michèle Diab souligne que c’est au Liban qu’elle trouve un plus grand retentissement, la tradition de recevoir les personnes qu’on aime à la maison faisant partie intégrante de la culture levantine. Elle garantie des assiettes consistantes et «clé en main» pour n’avoir plus qu’à déguster. Pour le futur, elle souhaite s’atteler en plus de la pâtisserie, à la boulangerie et pourquoi pas ouvrir son propre lieu, une cantine proposant une nourriture à la fois saine et gourmande.
Si le parcours de Léa Freiha est à des égards différents, leur ardeur commune l’a menée aussi aux cuisines des particuliers. Après avoir travaillé pendant 8 ans en tant que barmaid au Liban, elle entrevoit dans la cuisine une évidence. Avec, comme seuls bagages, une curiosité exacerbée et une force de caractère, Léa traverse la Méditerranée pour apprendre à Paris, où elle se voit confrontée à de nombreux obstacles. En frappant aux portes des écoles, elle réalise que leur accès est compliqué et mise alors sur la bonté d’un chef qui aura la patience de lui transmettre son savoir-faire. C’est ainsi que sa persévérance, illustrée par son tatouage en langue elfique «seuls les esprits inébranlables survivent», la mène dans les cuisines d’un restaurant levantin du 19ème arrondissement de Paris, tenu par une Libanaise. La jeune femme y apprend beaucoup et se voit propulser de commis à sous-chef. Avant son départ en France, elle avait déjà créé son propre catering «Léa’s kitchen» transformé en «La petite ratatouille» à son retour, il y a quelques mois. Grâce à l’initiative Achrafieh 2020, qui promeut les entrepreneurs libanais, elle parvint à constituer un carnet d’adresses pour proposer des services à domicile.
Comme une roue qui tourne, la petite cuisine de Léa Freiha rencontre un grand succès. Elle conçoit une carte franco-italienne avec une fusion libanaise pour de nombreux dîners mais aussi pour les repas quotidiens. En parallèle, elle a peaufiné son coup de fouet dans plusieurs établissements beyrouthins, comme celui du chef français Antoine Bonnet. Elle a aussi mis sa créativité au service d’une carte bistronomique pour L’Appartement à Sioufi et dorénavant, au profit du restaurant Hus à Mar Mikhael. Si elle envisage son avenir dans de grandes cuisines, «La petite ratatouille» existera toujours, son «petit bébé», comme elle se plaît à la nommer.
NOEMIE DE BELLAIGUE