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Nº 3062 du vendredi 15 juillet 2016

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Békaa, Jezzine, Batroun, Bhamdoun. La route du vin au Liban

Le Liban est l’un des berceaux de la culture viticole dans le monde. Le pays compte aujourd’hui une cinquantaine de producteurs et le vin libanais est très apprécié au-delà de ses frontières. Outre la qualité de ses crus, le Liban offre au voyageur des paysages en tous genres par une visite de ses vignobles.

Au Liban, la culture du vin fait partie intégrante du terroir local et de l’histoire du pays. On dit que c’est à Zahlé qu’est enterré Noé qui se serait même arrêté à Sannine pour y planter des vignes.
Aujourd’hui, il est possible de visiter presque tout le Liban par le vin. Seuls l’extrême sud et le Akkar ne comptent pas de producteurs de vins. Les circuits touristiques combinant dégustation de vin, visite de domaines et randonnées sont ainsi de plus en plus en vogue. Que ce soit par des agences de voyages traditionnelles ou par des groupes sur les réseaux sociaux, il est désormais possible de faire le tour du Liban par de belles visites guidées autour de ses vins.
Georges Jabbour, fondateur de Living Lebanon, organise même un tour du vin du Liban en une semaine pour découvrir le pays par son terroir gastronomique et viticole. Sa route du vin fétiche? «Une escapade par le chemin du Chouf jusqu’au Château Qanafar, dans la Békaa-Ouest, puis une visite des domaines à proximité de Zahlé», répond-il sans détour.
Mais si au Liban, certains grands domaines se sont fait une place de choix au niveau international, il existe une pléiade de nouveaux petits producteurs partout dans le pays qui méritent aussi le détour. De Batroun, à la Békaa en passant par Jezzine, la route des vins du Liban est un retour sur l’histoire du pays.

 

La Békaa, le berceau
Dans la Békaa, le visiteur sera subjugué par la plaine, les montagnes du Mont-Liban, mais aussi le lac Qaraoun et le mont Hermon. Pour Jabbour, «quand vous arrivez à Château Qanafar, c’est, sans aucun doute, l’un des plus beaux paysages visibles d’un vignoble au Liban». L’idéal est de visiter les vignobles de la Békaa aux mois de juin ou d’octobre pour profiter d’une température adéquate et de paysages pas trop arides.
Il ne faut pas passer dans la région sans visiter la ville de Baalbeck et ses temples mythiques de Bacchus, Jupiter et Vénus.
Les vestiges de ces temples datent des trois premiers siècles après Jésus-Christ à l’époque romaine. Le nom de Baalbeck vient de Baal, le nom d’un dieu phénicien. Le site témoigne de la puissance de l’Empire romain.
Poursuivez votre visite de la Békaa par un détour vers Anjar pour visiter les ruines qui témoignent de l’urbanisme des Omeyades. Un détour par Zahlé est ensuite de rigueur. Vous pouvez déjeuner sur les rives du Berdaouni et profiter ensuite pour visiter les caves à proximité des lieux.
Il ne faut pas manquer la visite des caves de Ksara, des galeries se déployant sur plus de 1 800 mètres et datant de l’époque romaine!
Aux alentours de Zahlé, on trouve cinq caves à moins de dix minutes les unes des autres. Outre Ksara, vous pouvez visiter le Domaine Wardy, Château Khoury, Coteaux du Liban et Domaine Baal.
La région de Zahlé est connue pour la qualité de son raisin, en particulier l’obeidi, une variété typiquement libanaise utilisée pour les vins blancs et la production d’arak.

 

Batroun en plein essor
«Le vin blanc produit à partir de ce raisin fait partie intégrante du terroir libanais, insiste Aziz Wardy, propriétaire du Domaine Wardy. Pour les vins rouges de la Békaa, ils sont corsés, profonds et très concentrés».
Dans la région de Batroun, la production de vin est en plein essor. La route des vins dans le Nord offre des paysages à couper le souffle avec des vues panoramiques sur la baie de Jounié et la côte. «Vous verrez la mer de Batroun Mountains, les cascades à Bsattine al-Ossi, des vignobles d’Aurora, de très belles églises le long de la route entre Atibaia et Ixsir, etc…», décrit Georges Jabbour.
On compte neuf caves sur les hauteurs de Batroun. Parmi elles, l’incontournable Ixsir dont les vignes valent le détour, mais aussi Coteaux Botrys, Najm, Atibaia, Phoenix, Aurora et Adyar.
La ville de Batroun vient du grec Botrys qui signifie grappe de raisin, car au temps des Phéniciens, elle était le port principal de la région. La cité avait le droit de frapper sa propre monnaie pour faciliter les échanges. «Sur les pièces de monnaie étaient gravées des grappes de raisin», raconte Hadi Kahalé, gérant et partenaire d’Ixsir.
S’il est difficile de visiter toutes les caves dans la journée, la ville de Batroun dispose aujourd’hui de plusieurs belles chambres d’hôte. L’idéal est d’y passer une nuit afin de profiter au maximum de ce que la région a à offrir.

 

Villages typiquement libanais
«Au Liban, nous avons aussi nos deux ‘‘B’’: la Békaa, qui représente, en quelque sorte, la grande production, et Batroun, qui concerne des petites caves, plus artisanales, mais qui valent définitivement le détour», décrit Kahalé.
Comment visiter la région sans s’arrêter à Batroun? La ville côtière est bourrée de charme et offre une promenade chargée d’histoire.
Une balade à pied sur le port phénicien mettra le visiteur dans l’ambiance. La ville date de 2 000 ans avant Jésus-Christ. A voir absolument: le mur phénicien, la citadelle édifiée au IXe siècle avant J.-C. par le roi de Tyr Ithobaal pour arrêter l’avancée assyrienne, l’Eglise Saint-Georges et celle de Notre-Dame de la mer. Ne manquez pas non plus la découverte des joyaux de la ville: les maisons anciennes libanaises et les vieux souks.
Enfin, outre la Békaa et Batroun, vous pouvez prendre la route entre Château Karam à Jezzine et Château Bellevue à Bhamdoun, en passant par Château Florentine à Majd el-Maouch, le paysage est celui des villages typiquement libanais, aux pentes escarpées et aux routes sinueuses dans un décor encore très vert.

Soraya Hamdan

Un peu d’histoire
Au Liban, la production de vin remonte à 6 000 ans avant Jésus-Christ. Elle a été développée par les Phéniciens.
Ce n’est qu’au XXe siècle, après le déclin de l’Empire ottoman, que la production de vin reprend au Liban. Même si la production est assez modeste avec 3 000 hectares, les vins libanais sont particulièrement appréciés dans le monde. Aujourd’hui, le défi pour les professionnels est de produire davantage face à une demande en pleine expansion. Ces cinq dernières années, la production de vin libanais a augmenté de 50%, passant d’un chiffre d’affaires de 12 millions de dollars à 15 millions. Car le marché du vin libanais a un potentiel immense même si le territoire est restreint et très urbanisé.
Les premiers importateurs de vins libanais sont le Royaume-Uni et la France. Le domaine Wardy exporte 72% de sa production (600 000 bouteilles de vin et d’arak par an). Ixsir, lui, exporte 45% de sa production. «Nos premiers clients étrangers sont les Etats-Unis et la France. Nous avons au Liban un climat idéal pour la culture du vin, explique Hadi Kahalé. Même si nous sommes un pays chaud, nous parvenons tout de même à produire un vin frais, grâce à notre position en altitude. A Ixsir, nous sommes à 1 800 mètres d’altitude». Les Libanais consomment autour de deux bouteilles de vin par habitant et par an, soit huit fois plus qu’il y a vingt ans.

Photos: Domaine des Tourelles – DR – No garlic No onions

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